16ème législature

Question N° 537
de Mme Louise Morel (Démocrate (MoDem et Indépendants) - Bas-Rhin )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère attributaire > Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Réduction des forfaits MaPrimeRénov' à l'installation d'équipement de chauffage

Question publiée au JO le : 06/02/2024
Réponse publiée au JO le : 14/02/2024 page : 999

Texte de la question

Mme Louise Morel attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la réduction de 30 % des forfaits MaPrimeRénov' pour l'installation d'équipement de chauffage fonctionnant au bois. Dans son budget pour 2024 publié début décembre 2023, l'Agence nationale de l'habitat (Anah) a prévu cette réduction, sans plus de précision sur cette information. Cette décision de baisse drastique de la prise en charge touchera donc tout aussi bien les poêles individuels de confort que les chaudières biomasse. Au-delà de l'incompréhension face à une annonce aussi brutale et sans concertation, c'est une réelle inquiétude qui traverse aujourd'hui les chaudiéristes français. Pour rappel, ces derniers ont été lourdement impactés par la crise des pellets de 2023. Ces derniers avaient vu leur prix bondir de manière exponentielle, entraînant par la même occasion la perte de confiance de nombreux consommateurs dans cette énergie et un effondrement des ventes des équipements de chauffage fonctionnant au bois sur la dernière année. Entre septembre 2022 et septembre 2023, le volume des ventes a ainsi diminué de 72 %. La situation est donc alarmante et la réduction des forfaits MaPrimeRénov', effective au 1er avril 2024, est un nouveau coup dur pour cette filière qui représente plus de 40 000 emplois directs et 450 000 emplois indirects dans le pays. À l'heure où les tarifs de l'électricité vont encore grimper de plus 10 % en 2024, la facture pour les ménages disposant d'une pompe à chaleur ou d'un chauffage électrique comme seule solution de chauffage va encore sensiblement augmenter, notamment dans les régions les plus froides de France. À l'inverse, les ménages disposant d'un système hybride bi-énergie pourront voir leur facture s'alléger. Dans un contexte volontariste de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur du bâtiment, la décision de l'Anah va marquer un coup d'arrêt pour les remplacements des chaudières au fioul par des chaudières biomasse plus performantes et neutres en carbone. Cela va à l'encontre des objectifs aussi bien environnementaux qu'en matière de réindustrialisation de la France. Aussi, elle lui demande quelle solution le Gouvernement peut apporter à cette filière, qui participe à sa mesure à renforcer l'indépendance énergétique de la France.

Texte de la réponse

MAPRIMERÉNOV'


Mme la présidente. La parole est à Mme Mathilde Desjonquères, pour exposer la question de Mme Louise Morel, n°  537, relative à MaPrimeRénov'.

Mme Mathilde Desjonquères. Le 31 janvier, lors des questions au Gouvernement, mes collègues Louise Morel et Laurent Croizier ont demandé à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires d'éclairer notre assemblée sur les véritables raisons de la baisse de 30 % des forfaits MaPrimeRénov' pour l'installation d'équipements de chauffage fonctionnant au bois, baisse annoncée par l'Agence nationale de l'habitat (Anah). M. le ministre a alors évoqué « ce que nous avons à faire par ailleurs au titre de la biomasse ».

La situation est pressante : la décision de l’Anah, prise sans concertation avec la filière bois énergie, qui se structure pourtant depuis des années pour accompagner la transition énergétique des bâtiments, sera effective le 1er avril 2024, autrement dit demain. Soyons clairs : cette décision marquera un coup d’arrêt pour le remplacement des chaudières au fioul par des chaudières biomasse, plus performantes et neutres en carbone ; cela va à l’encontre des objectifs environnementaux et de réindustrialisation de la France. D’après la trajectoire prévue par l’Agence de la transition écologique (Ademe), le nombre de foyers chauffés au bois passera de 8 à 11 millions d’ici à 2030, sans que cela augmente la consommation de matière première. La décision de l’Anah entre en totale contradiction avec ce développement.

Je tiens à rappeler la vive inquiétude qui règne au sein de la filière quant à la pérennité de ses 450 000 emplois directs et indirects, sachant qu’elle a eu à subir l’an dernier la crise des granulés de bois. À la suite de l’effondrement des ventes d’équipements de chauffage au bois en 2023, la filière enregistre ses premières pertes d’emploi et fermetures d’entreprise.

À l’heure où nous devons plus que jamais être vigilants sur notre consommation d’énergie, ces annonces semblent en décalage et inquiètent nos concitoyens et concitoyennes, en particulier ceux qui vivent dans les régions les plus froides de notre pays.

Quelles solutions le Gouvernement peut-il apporter, en partenariat avec l’Anah et l’Ademe, à la filière bois énergie, qui contribue à sa mesure au renforcement de l'indépendance énergétique de la France ? J’aimerais également vous entendre sur la place des granulés de bois dans notre mix énergétique ; il convient de se prémunir face à une nouvelle crise dans ce secteur.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation. Nous sommes confrontés à un enjeu de « bouclage biomasse » : les besoins de biomasse liés à la transition énergétique sont croissants, mais l'offre ne suit pas. D'un côté, il sera mobilisé davantage de biomasse pour remplacer les énergies fossiles. De l'autre, la production supplémentaire de biomasse énergétique est limitée par un certain nombre de facteurs et de priorités.

Dans le cadre de la planification écologique, le Gouvernement a donc engagé une réflexion d'ampleur sur la priorité d’usage qu'il nous faut donner. Au regard de sa disponibilité et de la hiérarchisation de ses usages, la biomasse devra être en priorité allouée aux usages pour lesquels il n'existe pas de meilleure solution de décarbonation. Je pense par exemple à la haute chaleur industrielle. Pour le chauffage de certains bâtiments, il existe des solutions alternatives à la biomasse, par exemple le recours aux pompes à chaleur ou celui, de plus en plus fréquent, à la géothermie.

Dans ce contexte, un recentrage progressif des aides MaPrimeRénov’ pour l’installation d’appareils de chauffage biomasse a été décidé, après plusieurs réunions de travail avec les représentants de la filière. Il s’agit non pas d'une suppression, mais d’une baisse de l’aide MaPrimeRénov’. En 2024, les projets de rénovation d’ampleur incluant l’installation d’appareils de chauffage biomasse continuent à bénéficier de subventions dans le cadre du parcours accompagné. En outre, l’installation d’appareils de chauffage – chaudières ou appareils indépendants – reste éligible aux aides forfaitaires par geste, sachant qu'une baisse homogène de 30 % des barèmes d’aides s'appliquera à partir du 1er avril prochain, option pour laquelle la filière avait émis une préférence claire.

Je rappelle aussi que, malgré cette baisse de 30 %, les aides pourront atteindre 7 000 euros pour une chaudière à granulés. Le soutien de l’État reste donc important. Par ailleurs, le taux réduit de TVA pour l’installation d’appareils de chauffage biomasse performants sera maintenu.

Enfin, je rappelle que le développement et la structuration de la filière bois font l’objet d’un soutien conséquent, non seulement par le fonds Chaleur, depuis 2009, mais aussi par le plan France 2030. Des engagements financiers importants ont également été pris ces dernières années en faveur de l'amont forestier, en vue de favoriser l’adaptation des forêts au changement climatique.