16ème législature

Question N° 5385
de M. Raphaël Schellenberger (Les Républicains - Haut-Rhin )
Question écrite
Ministère interrogé > Travail, plein emploi et insertion
Ministère attributaire > Travail, plein emploi et insertion

Rubrique > retraites : généralités

Titre > Mode de calcul de la retraite des frontaliers

Question publiée au JO le : 07/02/2023 page : 1084
Réponse publiée au JO le : 09/05/2023 page : 4282

Texte de la question

M. Raphaël Schellenberger appelle l'attention de M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion sur le nouveau mode de calcul de la retraite des frontaliers depuis la mise en place de la LURA (liquidation unique des régimes alignés) et effectif depuis le 1e juillet 2022. Dans le régime français, le montant de la retraite est déterminé notamment par le RAM (revenu annuel moyen). Jusqu'en 1993, cette moyenne était calculée sur la base des 10 meilleures années de la carrière française de l'assuré. A partir de 2008, on retenait les 25 meilleures années. Cependant, dès 2004, une nouvelle réglementation prévoyait une proratisation en cas de cotisations à plusieurs régimes de retraite (régime alignés français et AVS suisse) afin ne pas entraîner de distorsions par rapport aux personnes ayant accompli la totalité de leur carrière dans un seul régime. Or depuis la mise en place de la LURA en 2016, la proratisation a été supprimée et la base des 25 années civiles (même si elles sont lointaines et partielles) est devenue l'unique référence utilisée pour le calcul du RAM par la CNAV. Dans les faits, cela conduit à retenir la totalité des années travaillées en France, dont les emplois estivaux, années d'apprentissage et premières années de travail ou les revenus sont faibles. Mécaniquement, la base de calcul du revenu moyen est tirée vers le bas. La suppression de la proratisation pour les frontaliers entraîne donc une diminution significative de la masse salariale et donc du montant de la pension servie par le régime français. Cette situation est d'autant plus paradoxale que la proratisation s'applique toujours aux ressortissants européens ayant travaillé quelques années en France et non aux Français à situation équivalente. Cette inégalité de traitement entre travailleurs européens apparaît peu conforme aux droits et valeurs européens. Aussi, il lui demande quelles sont les dispositions qu'il pourrait mettre en œuvre afin de permettre aux frontaliers de proratiser la durée d'assurance CNAV dans la sélection des meilleures années, pour le calcul du montant de leur retraite française.

Texte de la réponse

L'article L. 173-1-2 du code de la sécurité sociale, créé par l'article 43 de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, a prévu, pour les retraites prenant effet à compter du 1er juillet 2017 et pour les assurés ayant été affiliés à au moins deux régimes alignés (régime général, régime social des indépendants et régime des salariés agricoles), un calcul et un paiement unique de la retraite de base par un seul des régimes concernés. Il s'agit de la liquidation unique des régimes alignés (LURA). La LURA est une mesure de simplification importante pour les futurs retraités : leur pension est liquidée de la même façon qu'ils aient validé des droits dans un ou plusieurs de ces régimes, et qu'ils aient cotisé en même temps ou successivement dans ces régimes. Elle permet aussi aux assurés de n'avoir plus qu'un seul interlocuteur au moment du départ à la retraite, une carrière comptabilisée dans son ensemble au sein des régimes alignés, un seul calcul de la retraite et une seule pension de retraite de base servie. Par ailleurs, cette disposition a permis de remédier aux différences de traitement entre les assurés selon qu'ils sont mono pensionnés ou polypensionnés. La situation précédente désavantageait certains polypensionnés et en avantageait d'autres, en fonction de leur profil de carrière. En effet, certains polypensionnés étaient désavantagés par les mécanismes antérieurement en vigueur, notamment les personnes faiblement rémunérées dans chaque régime et dont les revenus ne permettaient pas de valider quatre trimestres dans l'année civile car ils étaient pris en compte séparément. Désormais, c'est le montant global de leurs rémunérations qui est apprécié, ce qui permet un traitement équitable entre ces assurés. Par exemple, un salarié ayant travaillé 250 heures au salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) en 2017 en étant affilié au régime général et 250 heures au SMIC en étant affilié à la mutualité sociale agricole (MSA) salarié valide 1 trimestre de plus avec la réforme. La totalisation de ses salaires lui permet en effet d'atteindre un total de 500 heures SMIC (soit 3 trimestres selon la règle 150 heures SMIC = 1 trimestre), au lieu de deux trimestres (1 trimestre au régime général et 1 trimestre au régime des salariés agricoles) avant la réforme. Les revenus assurés par chacun des régimes alignés sont agrégés et écrêtés au plafond de la sécurité sociale. Si ce mécanisme a pu être pénalisant pour certains polypensionnés, il a surtout répondu à une injustice et bénéficie à ces derniers. En effet, dans le cas d'un assuré poly-affilié avant la création de la LURA, le nombre d'années pris en compte pour déterminer le salaire annuel moyen dans chacun des régimes alignés était obtenu en proratisant 25 par la durée d'assurance dans le régime sur la durée d'assurance totale requise (25 étant le nombre d'années prises en compte pour calculer le salaire annuel moyen d'un mono-affilié). Par exemple, si un assuré avait effectué 40 % de sa carrière à la MSA et 60 % au régime général, alors la MSA calculait la pension du régime agricole sur la base des 10 meilleures années de salaire dans ce régime et le régime général calculait la pension sur la base des 15 meilleures années de salaire au régime général. Cette méthode pénalisait les poly-affiliés par rapport aux mono affiliés, notamment dans les cas où les assurés voyaient certaines de leurs meilleures années non comptabilisées au titre de cette proratisation. Dans notre exemple, l'assuré ayant effectué plus de 15 de ses meilleures années au régime général, ne les a pas vu comptabilisées pour le calcul de son salaire annuel moyen, là où de moins bonnes années au régime agricole sont, elles, prises en compte dans le calcul de sa pension. Un mono-affilié, était quant à lui certain de voir ses 25 meilleures années de revenu prises en compte pour ce calcul. La LURA a donc permis de résoudre certaines iniquités dans la mesure où elle agrège les rémunérations des régimes alignés et applique les mêmes règles que celle d'un mono affilié comme si l'assuré n'avait en réalité été affilié qu'à un seul de ces régimes.