Question écrite n° 5412 :
Mise en danger des agriculteurs suite à l'interdiction des néonicotinoïdes

16e Législature

Question de : M. Victor Catteau
Nord (5e circonscription) - Rassemblement National

M. Victor Catteau alerte M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la mise en danger des agriculteurs français suite à l'interdiction des substances à base de néonicotinoïdes. En effet, la décision rendue le 19 janvier 2023 par la Cour de justice de l'Union européenne actant l'interdiction d'utiliser des pesticides à base de néonicotinoïdes a été accueillie sans la moindre récalcitrance par le gouvernement français, qui a refusé de renouveler la demande de dérogation auparavant formulée. Pourtant, ces substances utilisées par les agriculteurs, en particulier par une immense majorité de betteraviers, permettent de lutter contre les insectes nuisibles à l'origine de la transmission de virus, à l'image des pucerons, et d'empêcher ainsi leur prolifération au sein des plantations. Sans ce moyen, qui ne connaît d'ailleurs aucune alternative en la matière, les agriculteurs se sentent complètement démunis face à l'apparition de virus, à l'image de la jaunisse pour les betteraviers qui est apportée par les pucerons. Pour rappel, en 2020, ce virus contre lequel les betteraviers n'étaient pas autorisés à lutter, avait été capable d'anéantir à lui seul plus de 70 % de leur récolte et de faire s'écrouler de moitié la production sucrière française. C'est d'ailleurs cet élément qui fut à l'origine de la dérogation accordée à la France en vue de sauver sa filière sucrière. Avec le non-renouvellement de cette dérogation, les betteraviers français sont de nouveau empêchés de lutter contre les insectes à l'origine de virus et craignent donc de voir une nouvelle fois la rentabilité de leur production s'effondrer sévèrement. Au total, ce sont aujourd'hui plus de 50 000 emplois qui se retrouvent directement impactés par cette décision prise unilatéralement et se retrouvent menacés de disparition tout comme la filière sucrière qui se voit poussée au bord du gouffre. La situation est ainsi éminemment préoccupante, d'un point de vue social d'une part vis-à-vis de ces métiers indispensables qui nourrissent les Français mais aussi au regard des légitimes inquiétudes relatives à la protection de la souveraineté alimentaire française. Nombreux sont ceux qui redoutent que la France, alors qu'elle demeure à ce jour le premier producteur mondial de betteraves sucrières, se retrouve à devoir importer du sucre ou de l'éthanol en provenance de pays qui ne sont pas soumis aux mêmes normes et réglementations que celles imposées par l'Union européenne, en qui le gouvernement français démontre un peu plus chaque jour son aveugle allégeance. Par conséquent, il l'interroge sur les mesures qui sont envisagées pour aider les agriculteurs en danger et pour empêcher le déclin de la filière sucrière française, pilier historique de la souveraineté alimentaire du pays.

Réponse publiée le 2 mai 2023

Le Gouvernement a pris acte de la décision rendue le jeudi 19 janvier 2023 par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) excluant l'utilisation des néonicotinoïdes (NNI) pour les semences et le droit de déroger à l'interdiction européenne dans le cadre de l'article 53 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 21 octobre 2009. Par conséquent, aucune nouvelle dérogation autorisant l'utilisation des NNI pour les semences de la campagne 2023 n'a été accordée. Dès 2020, le Gouvernement avait mis en place un plan national de recherche et d'innovation (PNRI) sans précédent de plus de 20 millions d'euros face à la menace de la jaunisse. Ce plan a permis de coordonner un important effort de recherche autour de la filière afin d'apporter des solutions alternatives techniquement et économiquement viables pour sortir des NNI en 2024. La décision de la CJUE est venue percuter ce programme de travail établi pour 3 ans et provoque des inquiétudes légitimes chez les planteurs, sucriers et semenciers sur la campagne des semis de mars 2023. Elle oblige la France à s'adapter pour la troisième et dernière année, l'État sera en soutien de la filière pour y parvenir. Dès le 23 janvier 2023, conscients des impacts qu'emporte l'arrêt de la CJUE pour la campagne betteravière, le ministre a reçu les professionnels de la filière afin d'échanger avec eux sur la situation. Le 9 février 2023, il a annoncé avec la filière le déploiement d'un plan d'actions afin de garantir une production suffisante de betteraves en 2023 et l'approvisionnement de l'ensemble de la filière sucre française. Dans ce cadre, afin que les producteurs ne pâtissent pas d'une distorsion de la concurrence, une action est menée à l'échelle européenne, afin de s'assurer que la décision de la CJUE soit uniformément appliquée par l'ensemble des pays de l'Union européenne. De plus, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a demandé, lors du Conseil européen « agriculture et pêche » du 30 janvier 2023, le déclenchement d'une clause de sauvegarde permettant d'interdire l'importation de produits traités avec des néonicotinoïdes. En outre, ce plan d'actions vise à déployer rapidement des mesures de protection des cultures. À cette fin, de nouveaux itinéraires techniques ont été élaborés en liaison avec les professionnels et selon les recommandations du PNRI. Ils seront mis à disposition des producteurs via l'institut technique de la betterave et pourront être utilisés en cas de jaunisse dès le printemps 2023. En parallèle, toutes les solutions immédiatement disponibles, issues du PNRI, concernant notamment l'utilisation des plantes compagnes sont mises en œuvre par la profession. À des fins préventives, des mesures ambitieuses de gestion des réservoirs viraux sont à l'étude et un plan d'actions et de surveillance sur la gestion de ces réservoirs sera présenté prochainement. Les modèles de prévision des vols de pucerons issus des travaux du PNRI seront déployés prochainement. Enfin, une aide sera accessible aux planteurs en cas de pertes liées à un épisode de la jaunisse au cours de l'année 2023. Le Gouvernement a demandé l'activation d'une mesure de crise européenne et engagé le travail de construction du dispositif, en lien avec la Commission européenne.

Données clés

Auteur : M. Victor Catteau

Type de question : Question écrite

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Agriculture et souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Agriculture et souveraineté alimentaire

Dates :
Question publiée le 14 février 2023
Réponse publiée le 2 mai 2023

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