Question orale n°546 : Vente à la découpe pour le groupe GMD : cas d'école de la politique industrielle

16ème Législature

Question de : Mme Catherine Couturier (Nouvelle-Aquitaine - La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale)

Mme Catherine Couturier appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la situation des salariés de « La Souterraine Industrie » du groupe GMD, spécialisée dans les équipements automobiles. Le groupe étant en passe d'être vendu à la découpe, les salariés risquent de se retrouver licenciés. Suite au rachat de l'entreprise GM&S en 2017, seuls 157 des 277 salariés de l'entreprise avaient préservé leurs postes. Maintenant, ils ne sont plus que 89 salariés dont une dizaine en passe de partir à la retraite. Cette entreprise d'équipement automobile est un sous-traitant des industriels français de l'automobile : PSA et Renault Nissan. En dépit de contrats pris devant l'État, PSA et Renault Nissan n'ont toujours pas honoré leurs engagements de commandes. L'entreprise ne fonctionne maintenant plus qu'à 30 % de son potentiel. Parallèlement, le groupe Renault enregistre une marge historique de plus de 7,5 % en 2023 avec un bénéfice net de plus de 2 milliards d'euros. La Creuse fait partie du programme « Territoire d'industrie » de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT). Ce programme vise à réimplanter des industries dans les territoires, mais semble en incohérence avec la dilapidation du tissu industriel existant. Mme la députée demande à M. le ministre de prouver sa volonté de préserver le tissu industriel français existant en trouvant un repreneur français qui mettra en valeur les outils industriels de « La Souterraine Industrie » à des fins de planification écologique. Elle lui demande également de s'engager à préserver le nombre d'emplois industriels du site. Et finalement, elle lui demande de faire évoluer la législation sur la responsabilité des donneurs d'ordres dans les contrats de sous-traitance pour éviter que ce scénario ne se reproduise en mettant à l'ordre du jour sa proposition de loi sur la responsabilité des donneurs d'ordres.

Réponse en séance, et publiée le 14 février 2024

GROUPE GMD
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Couturier, pour exposer sa question, n°  546, relative au Groupe GMD.

Mme Catherine Couturier. Je tiens à alerter sur la situation des salariés de LS Industrie, une entité du groupe GMD, spécialisé dans les équipements automobiles, installée dans la ville creusoise de La Souterraine. Le groupe étant en passe d’être vendu à la découpe, les salariés risquent, encore une fois, de se retrouver sur le carreau. Je suppose, madame la ministre déléguée, que vous connaissez l’histoire de cette entreprise. Après le rachat de GM&S en 2017, moins de la moitié des 277 salariés avaient conservé leur poste. Ils ne sont plus aujourd'hui que 89, avec une moyenne d’âge de 57 ans, dont une dizaine en passe de partir à la retraite en 2024.

Voilà le bilan social du dérèglement effréné du marché du travail et de la sous-traitance à tout-va ! L’entreprise est dans une situation de dépendance économique envers ses donneurs d’ordres, à savoir PSA et Renault. En dépit d'engagements pris devant l’État, ces entreprises n’ont toujours pas honoré leurs promesses de commandes, tant et si bien que l’entreprise ne fonctionne plus qu'à 30 % de son potentiel, alors que le groupe Renault a réalisé en 2023 une marge historique de plus de 7,5 %, avec un bénéfice net de plus de 2 milliards d’euros.

Puisque la Creuse fait partie du programme Territoires d'industrie et que le Parlement a adopté votre très mal nommée loi relative à l'industrie verte, démontrez-nous, madame la ministre déléguée, que vous voulez préserver le tissu industriel français !

Le cas d’école de LS Industrie et du groupe GMD prouve l'ambivalence de la politique industrielle française : vous incitez à l’industrialisation tout en permettant des sous-traitances en cascade pour que les donneurs d’ordres ne prennent aucune responsabilité dans leurs chaînes de production.

J’ai déposé, avec mon collègue Pierre Dharréville, une proposition de loi sur la responsabilité des donneurs d’ordres, préparée avec les salariés de LS Industrie. Pour une fois, madame la ministre déléguée, c'est moi qui vais poser des questions. Êtes-vous disposée à trouver un repreneur français qui mettrait en valeur les outils industriels et le savoir-faire humain de LS Industrie ? Cette reprise se fera-t-elle sans découpe, pour que l'activité industrielle s’inscrive dans la planification écologique ? Vous engagez-vous à préserver le nombre d’emplois industriels du site ? Enfin, êtes-vous disposée à mettre à l’ordre du jour du Parlement la proposition de loi sur les donneurs d’ordres pour toutes les autres entreprises ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation. Madame la députée, vous attirez notre attention sur la situation difficile de l’entreprise LS Industrie et de ses salariés. Elle est bien connue des services de Bercy, qui sont mobilisés depuis plusieurs années, comme vous le savez, pour soutenir ce site industriel de La Souterraine. En 2018, après plusieurs redressements judiciaires, l’État, Renault et PSA ont accompagné la reprise de la société et de 113 salariés par le groupe GMD, décidée par un tribunal, par des mesures financières et par l’octroi de volumes de production. Cet accompagnement a été complété en 2022 par un prêt de l’État de 4 millions d'euros.

La mobilisation du Gouvernement et des services de l’État, notamment la délégation interministérielle aux restructurations d’entreprises (Dire), se poursuit en 2024, en lien très étroit avec la direction de l'entreprise, les constructeurs automobiles et les acteurs territoriaux, pour préserver le site creusois. Tous les acteurs travaillent à identifier et à déployer les meilleures solutions – maintien ou attribution de nouveaux marchés par les constructeurs automobiles, diversification, recherche de repreneur, etc. – et à fournir le meilleur accompagnement possible aux salariés.

Par ailleurs, depuis novembre 2023, toute la Creuse forme un seul et même Territoire d'industrie, ce qui témoigne de l'ambition légitime de développement industriel du département. Les élus et les industriels ont ainsi identifié une vingtaine d'actions en matière de formation, d'attractivité ou de développement de filières locales. Un chef de projet est en cours de recrutement. Ce développement industriel a vocation à être accompagné par le plan Particulier pour la Creuse, dont la nouvelle version est en élaboration.

Plus généralement, je vous assure de la pleine mobilisation du Gouvernement, notamment de Bercy que j'ai l'honneur de représenter, pour soutenir notre industrie, en particulier la filière de la sous-traitance automobile.

Celle-ci a des défis d’ampleur à relever, en particulier le passage au véhicule tout électrique. L’État est et sera mobilisé à ses côtés pour accompagner, dans ce contexte, les entreprises et leurs salariés.

Madame la députée, les portes de mon bureau et de celui de Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie et de l'énergie, vous sont ouvertes. M. Dharréville et vous avez déposé une proposition de loi relative à la sous-traitance. Je suggère que nous nous voyions, si vous le souhaitez, pour évoquer ce texte en amont de son examen. En tout cas, je suis à votre disposition, et c'est bien normal.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Couturier.

Mme Catherine Couturier. Merci, madame la ministre déléguée. Je prends note de votre invitation s'agissant de la proposition de loi. L'urgence, toutefois, c'est la situation des salariés, qui ont atteint un certain âge et se posent de nombreuses questions sur leur devenir et sur celui du territoire.

Mme la présidente. Merci, chère collègue.

Mme Catherine Couturier. De mon côté, je vous invite donc à venir dans la Creuse, pour discuter du sujet avec les acteurs du territoire.

Données clés

Auteur : Mme Catherine Couturier (Nouvelle-Aquitaine - La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale)

Type de question : Question orale

Rubrique : Entreprises

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 février 2024

partager