16ème législature

Question N° 562
de M. Didier Le Gac (Renaissance - Finistère )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère attributaire > Transition écologique et cohésion des territoires

Rubrique > mer et littoral

Titre > Révision de l'homologation des chantiers de déconstruction navale en Europe

Question publiée au JO le : 06/02/2024
Réponse publiée au JO le : 14/02/2024 page : 1003

Texte de la question

M. Didier Le Gac appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur une demande de révision de la procédure d'homologation des chantiers de déconstruction navale en Europe. En effet, les quatre chantiers français de déconstruction navale, dont celui de Brest, le chantier Navaleo, qui tente de créer une filière de déconstruction navale à Brest, font face à une concurrence déloyale de 9 chantiers turcs dont les standards environnementaux (les bateaux y sont déconstruits après échouage et non en cale sèche) sont très éloignés des standards européens. Sans compter les normes sociales et le recyclage des matériaux tels que l'amiante. Ces chantiers turcs figurent pourtant sur la liste des 44 chantiers européens homologués et inscrits sur la liste du règlement 1257/2013 du Parlement européen et du Conseil relatif au recyclage des navires. Il lui demande donc, afin de soutenir la filière de déconstruction navale française, s'il va agir auprès des instances européennes pour exclure de cette liste d'accréditation les chantiers pays hors UE ou durcir ces conditions afin qu'ils respectent, a minima, les normes et contraintes environnementales européennes, par exemple, en excluant l'échouage au titre des méthodes de recyclage.

Texte de la réponse

DÉCONSTRUCTION NAVALE


Mme la présidente. La parole est à M. Didier Le Gac, pour exposer sa question, n°  562, relative à la déconstruction navale.

M. Didier Le Gac. Je souhaite interpeller le Gouvernement sur la situation des quatre chantiers français de déconstruction navale installés sur la façade atlantique et le pourtour de la Manche, lesquels font face à une concurrence déloyale de la part de neuf chantiers turcs.

En effet, ces derniers ne respectent pas les mêmes standards ni les mêmes normes environnementales que ceux situés sur notre territoire, sans parler, évidemment, des normes sociales ou encore de celles relatives au recyclage de l'amiante. Par surcroît, les chantiers turcs déconstruisent les navires et les démantèlent non en cale sèche et fermée, comme nous le faisons en France, mais directement sur les plages, où ils sont littéralement échoués. Une telle situation est d'autant moins compréhensible que ces chantiers turcs figurent sur la liste des quarante-quatre chantiers homologués au titre du règlement no 1257/2013 du Parlement européen et du Conseil.

Si rien n'est fait, les chantiers de déconstruction navale français vont disparaître. À Brest, près de chez moi, un chef d'entreprise souhaite créer une véritable filière de déconstruction navale, mais s'interroge sur la pérennité d'un tel secteur. Très récemment, Orange Marine, compagnie française très connue de câbliers marins, a en effet signé un marché de déconstruction avec un chantier turc, car le prix proposé défiait toute concurrence.

Voilà pourquoi je demande au Gouvernement d'agir auprès des instances européennes pour exclure de la liste des chantiers homologués ceux situés dans des pays extérieurs à l'Union européenne ou, à tout le moins, pour durcir les conditions d'autorisation, afin que ces chantiers respectent nos normes et contraintes environnementales, par exemple en interdisant l'échouage comme méthode de recyclage.

Nous parlons actuellement beaucoup des distorsions de concurrence qui peuvent avoir lieu au sein de l'Union européenne ou avec des États tiers en matière d'agriculture ou de pêche : nous en avons ici un autre exemple flagrant.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Le règlement européen sur le recyclage des navires vise à rendre cette activité plus sûre, plus écologique, et à mieux l'encadrer, que le démantèlement ait lieu en Europe ou en dehors : vous avez raison d'insister sur ce point. Pour ce faire, le règlement instaure une liste de chantiers conformes à un cahier des charges, lesquels sont soumis à une inspection préalable, puis à un contrôle tout au long de leur inscription sur cette liste. La présence d'installations situées hors de l'Union européenne sur cette liste est nécessaire afin de disposer de capacités de recyclage suffisantes.

Notons que le règlement européen ne prévoit que des obligations de résultat, ce qui permet aux installations de recourir à la technique de l'échouage, à la condition de gérer et de limiter les conséquences néfastes sur l'environnement. Cette situation ne nous paraît pas acceptable, et la prochaine révision du règlement sur le recyclage des navires sera l'occasion de s'interroger sur cette pratique et de faire évoluer les règles.

Par ailleurs, la France soutient avec force les contrôles effectués sur les chantiers, ceux-ci ayant déjà conduit au retrait de la liste de deux installations turques qui manquaient à leurs obligations. Il est toutefois nécessaire de maintenir un haut niveau de contrôle sur les pratiques ayant cours sur ces chantiers, raison pour laquelle le Gouvernement a demandé à la Commission européenne de procéder à des contrôles inopinés et fréquents, les premiers devant avoir lieu dès cette année.

Enfin, l'État partage votre souhait de voir émerger une filière de déconstruction navale à Brest. Dès 2023, il a montré son soutien à la filière en abondant de 50 millions d'euros le contrat de plan État-région, afin que les ports régionaux d'intérêt national soient en mesure de répondre aux enjeux de la transition énergétique.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Le Gac.

M. Didier Le Gac. Je vous remercie pour cette réponse précise. Je note que le Gouvernement français sera moteur pour engager une révision des procédures d'accréditation des chantiers, et je me félicite que les contrôles des chantiers turcs s'accentuent ; c'est absolument nécessaire.

Alors que des normes environnementales très strictes s'imposent à nous – les marins-pêcheurs sont actuellement retenus à quai pour ce motif –, on ne peut accepter de voir des bateaux déconstruits directement sur des plages eu égard aux conséquences de cette pratique pour l'environnement. Je demeurerai donc très vigilant sur la position du Gouvernement dans les semaines et les mois à venir.