Plan polyhandicap
Question de :
Mme Jacqueline Maquet
Pas-de-Calais (2e circonscription) - Renaissance
Mme Jacqueline Maquet appelle l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées, sur le polyhandicap. Mme la députée tient à remercier Mme la ministre personnellement pour sa visite de l'IEM Pierre Cazin, en octobre 2022, dans sa circonscription. Sa présence, son écoute et ses propositions ont été très appréciées par les familles, qui ont le sentiment de devoir continuellement se battre pour que leurs enfants reçoivent les meilleurs soins et la meilleure prise en charge. Le polyhandicap est spécifique et ne saurait être associé à aucun autre. Le collectif polyhandicap explique à ce sujet que « les solutions venues du droit commun trouvent rapidement leurs limites » face à la multiplicité des déficiences (physique, intellectuelle, de coordination etc.) que le polyhandicap recouvre. Lors de leurs scolarités en IEM, le potentiel de ces enfants est bien souvent non exploité. Ils ne bénéficient pas d'accompagnement avec un enseignant adapté. Pourtant, des expérimentations montrent qu'il est possible de stimuler et développer leur potentiel, comme l'illustre l'initiative « L'école des possibles », portée par l'association le Carré des ronds, en Bretagne. Les soins, notamment en kinésithérapie et ergothérapie, sont par ailleurs très souvent insuffisants et loin derrière les standards européens. C'est la raison pour laquelle de nombreuses familles vont à l'étranger pour bénéficier d'une prise en charge adéquate. En outre, l'accompagnement des aidants demeure à ce jour encore trop lacunaire. La famille et les parents deviennent bien souvent des aidants à vie pour leurs enfants. Les ruptures et les aménagements de carrière bloquent leurs évolutions professionnelles et les conséquences se font sentir tout au long de leur vie, même à la retraite. La prise en charge d'un adulte polyhandicapé nécessite par ailleurs, bien souvent, son placement dans des maisons d'accueil spécialisées. Or le manque de place dans ces structures conduit à une longue attente pour les familles. Les familles s'interrogent aussi sur le fonctionnement et les moyens de ces structures. Elles estiment que les besoins de financements par enfant doivent être plus importants. Le collectif polyhandicap estime par exemple qu'il faudrait consacrer 145 000 euros annuels par enfant, pour respecter les conditions minimales de fonctionnement définies par le CASF (aujourd'hui, il est prévu de verser 75 000 euros annuels par enfant en maison d'accueil). On a vu, sous le précédent quinquennat, l'intérêt et l'efficacité de mettre en place un plan spécifique pour les personnes atteintes de trouble du spectre de l'autisme. Elle lui demande s'il ne pense pas qu'il serait pertinent d'envisager, sur le même modèle, la mise en œuvre d'un plan polyhandicap.
Réponse en séance, et publiée le 7 décembre 2022
PLAN POLYHANDICAP
Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Maquet, pour exposer sa question, n° 56, relative au plan polyhandicap.
Mme Jacqueline Maquet. Madame la ministre déléguée, je tenais à vous remercier pour votre visite le mois dernier à l'institut d'éducation motrice (IEM) Pierre Cazin, situé dans la deuxième circonscription du Pas-de-Calais. Votre présence, votre écoute et vos propositions ont été très appréciées par les familles, qui ont le sentiment de devoir continuellement se battre pour que leurs enfants polyhandicapés reçoivent la meilleure prise en charge. Le polyhandicap est spécifique et ne saurait être associé à aucun autre handicap. Les solutions venues du droit commun trouvent d'ailleurs rapidement leurs limites face à la multiplicité des déficiences, qu’elles soient physiques, intellectuelles ou de coordination.
Bien souvent, le potentiel de ces enfants n'est pas exploité lors de leur scolarité en IEM car ils ne bénéficient pas d'enseignements adaptés. Pourtant, des expérimentations montrent qu'il est possible de le stimuler et de le développer, comme l'illustre l'initiative de L'École des possibles, portée en Bretagne par l'association Des carrés dans les ronds. Les soins, notamment en kinésithérapie et ergothérapie, sont par ailleurs trop souvent insuffisants et loin des standards européens. C'est la raison pour laquelle de nombreuses familles vont à l'étranger pour bénéficier d'une prise en charge adéquate.
En outre, l'accompagnement des aidants demeure à ce jour encore trop lacunaire. Face au polyhandicap, la famille et les parents deviennent des aidants à vie. Les ruptures et les aménagements de carrière bloquent leurs évolutions professionnelles et les conséquences se font sentir tout au long de leur vie, jusqu'à la retraite. La prise en charge d'un enfant polyhandicapé nécessite par ailleurs, bien souvent, son placement dans des maisons d'accueil spécialisées. Or le manque de place dans ces structures est synonyme de longue attente pour les familles.
Plusieurs associations considèrent que les moyens financiers manquent. Le collectif Polyhandicap estime par exemple qu'il faudrait consacrer chaque année 145 000 euros par enfant pour garantir les conditions minimales de fonctionnement et d'accueil. Nous avons vu, sous le précédent quinquennat, l'intérêt et l'efficacité de mettre en place un plan spécifique pour les personnes atteintes de troubles du spectre de l'autisme. Ne pensez-vous pas, madame la ministre déléguée, qu'il serait pertinent d'envisager, sur le même modèle, la mise en œuvre d'un plan polyhandicap ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes handicapées.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées. Madame la députée, j'ai eu grand plaisir à découvrir l'IEM Pierre Cazin à Anzin-Saint-Aubin et à échanger directement avec les familles et les mamans.
Vous avez raison de rappeler que le polyhandicap présente des spécificités. Nous en avons parfaitement conscience, et celles-ci sont prises en considération dans les politiques publiques que nous construisons. L'accès au droit commun pour nos concitoyens en situation de handicap est encore complexe et il l'est certainement encore davantage pour le polyhandicap. Notre préoccupation première est de répondre à la volonté des familles et des personnes en situation de handicap afin de développer une palette de solutions adaptées. Il faut construire le droit commun dans le respect du choix de chacun, mais avec des solutions pour tous.
Vous évoquez la question des plus jeunes et de leur scolarisation. Nous travaillons, avec le ministre de l’éducation nationale Pap Ndiaye, pour que l'école s'adapte à tous les élèves en situation de handicap et non l'inverse. Cette ambition s'est traduite concrètement, par exemple, par la création, main dans la main avec l'éducation nationale, d'une unité de scolarisation dédiée aux élèves polyhandicapés dans chaque académie. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour l'année 2023 prévoit la création d'unités supplémentaires. J'ai également souhaité inscrire dans ce PLFSS la création en ville d'un parcours coordonné de rééducation et de réadaptation pour les enfants avec paralysie cérébrale ou polyhandicapés. Il permettra la prise en charge des interventions de l'ensemble des professionnels, y compris ceux qui ne sont pas conventionnés par l'assurance maladie, sans reste à charge pour les familles.
Les techniques de rééducation intensive font actuellement l'objet d'expérimentations dans plusieurs centres, notamment à Brest et à Angers. Leur évaluation est en cours, et nous attendons son résultat pour envisager le déploiement de ces techniques sur le territoire.
Le handicap doit être pensé globalement, au-delà des spécificités de chaque handicap, mais je demeure très attentive à ce que les personnes polyhandicapées soient prises en compte dans toute leur singularité, en particulier dans la perspective des transformations de l'offre médico-sociale que nous poursuivons et dont nous allons discuter lors de la conférence nationale du handicap.
Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Maquet.
Mme Jacqueline Maquet. Merci, madame la ministre déléguée. J'accompagne depuis plusieurs années les familles de ma circonscription qui me font part de leur sentiment de solitude et de désarroi face à leur situation. Il me tient particulièrement à cœur de les défendre. Leur détresse nous somme d'agir ! Je suis convaincue de la nécessité d'œuvrer en faveur d'une meilleure inclusion des personnes souffrant de polyhandicap dans notre société.
Auteur : Mme Jacqueline Maquet
Type de question : Question orale
Rubrique : Personnes handicapées
Ministère interrogé : Personnes handicapées
Ministère répondant : Personnes handicapées
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 novembre 2022