Conditions d'application de l'article 257 bis du CGI
Question de :
Mme Véronique Louwagie
Orne (2e circonscription) - Les Républicains
Mme Véronique Louwagie attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les conditions d'application de l'article 257 bis du code général des impôts (CGI). Ces dispositions soulèvent des difficultés d'application dans le secteur hôtelier à la suite d'une réponse ministérielle du 5 avril 2022 (question n° 35808). Dans ce contexte, elle lui demande de bien vouloir préciser, y compris pour les opérations passées et les opérations en cours, si la dispense s'applique lorsqu'un exploitant hôtelier cède à un crédit-bailleur les murs de l'hôtel, soit dans le cadre d'un lease-back soit dans le cadre de la mise en place d'un crédit-bail avec un autre crédit-preneur et si le fait qu'une partie des locaux soit affectée par l'exploitant hôtelier à une activité de restauration, de séminaires ou encore de bien-être (spa) est sans incidence sur l'application de la dispense. Enfin, dans l'hypothèse où la cession par l'exploitant hôtelier interviendrait juste après une levée d'option dans le cadre d'un premier contrat de crédit-bail, elle lui demande de bien vouloir confirmer le bénéfice du rescrit publié RES N°2018/02 (TCA) du 3 janvier 2018, tant à la levée de l'option qu'à la revente, dans la mesure où ce rescrit ne semble attacher aucune condition quant à l'activité du crédit-preneur.
Réponse publiée le 4 juillet 2023
L'article 257 bis du code général des impôts (CGI) prévoit qu'aucune livraison de biens ou prestation de services n'est réputée intervenir lors de la transmission à titre onéreux, à titre gratuit ou sous forme d'apport à une société d'une universalité totale ou partielle de biens effectuée entre redevables de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Cet article transpose la faculté offerte par les articles 19 et 29 de la directive 2006/112/CE du conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de la TVA. La notion de « transmission à titre onéreux ou à titre gratuit ou sous forme d'apport à une société, d'une universalité totale ou partielle de biens » a été éclairée par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), notamment dans ses arrêts rendus dans les affaires « Zita Modes » (aff. C-497/01), « Schriever » (aff. C-444/10) et « Virgil Mailat » (aff. C-17/18). Elle concerne le transfert d'un fonds de commerce ou d'une partie autonome d'une entreprise, comprenant des éléments corporels et, le cas échéant, incorporels qui, ensemble, constituent une entreprise ou une partie d'une entreprise susceptible de poursuivre une activité économique autonome. Cette notion ne couvre pas les transferts réalisés au profit d'une personne qui n'entend pas exploiter l'universalité ainsi transmise, mais simplement liquider immédiatement l'activité concernée. Il en est ainsi de la simple cession de biens, telle que la vente d'un stock de produits ou la vente isolée d'un bien immobilisé en dehors de toute opération de transmission d'entreprise ou de restructuration (Bulletin officiel des finances publiques-impôts, BOFiP-I, référencé BOI-TVA-CHAMP-10-10-50-10, § 10). Ainsi, la doctrine fiscale opposable considère que l'article 257 bis du CGI s'applique en cas de cession d'un immeuble inscrit à l'actif immobilisé d'une entreprise qui l'avait affecté à la réalisation d'une activité de location soumise à la TVA, avec reprise, avec ou sans négociation, du ou des baux en cours par le cessionnaire (BOFiP-I référencé BOI-TVA-DED-60-20-10, § 282). Par ailleurs, la CJUE a précisé que pour qu'une transmission d'une universalité totale ou partielle de biens soit constatée, il faut que l'ensemble des éléments transférés soit suffisant pour permettre la poursuite d'une activité économique. En revanche, il n'est pas exigé que le cessionnaire ait préalablement exercé la même activité que le cédant ou qu'il poursuive strictement la même activité que celle précédemment exercée par le cédant. Ainsi, la transmission d'un immeuble inscrit à l'actif immobilisé d'une entreprise qui l'avait affecté à l'exercice d'une activité locative telle que l'activité hôtelière doit être regardée comme intervenant dans le cadre de la transmission d'une universalité de biens, dès lors que le bénéficiaire de la transmission poursuivra une telle activité économique de location, y compris sous une autre forme (location taxée de plein droit ou sur option). Cette situation vise notamment la situation évoquée par l'auteure de la question, lorsqu'un exploitant hôtelier cède à un crédit bailleur les murs de l'hôtel dont il était propriétaire dans le cadre soit d'un « lease-back », soit de la mise en place d'un crédit bail avec un autre crédit preneur. La circonstance qu'une partie des locaux de l'hôtel soit utilisée par le cédant pour la restauration, le bien-être (spa) ou l'accueil de séminaires est sans incidence sur l'application du dispositif. La doctrine fiscale opposable précise enfin que l'article 257 bis du CGI s'applique lorsqu'un immeuble loué en TVA par un crédit bailleur est transféré pour les besoins d'un changement de crédit bailleur par l'intermédiaire de la levée d'option exercée par le crédit preneur (RES N°2018/02 (TCA) du 3 janvier 2018, BOI-TVA-DED-60-20-10, § 286). Ainsi, dans cette situation, tant la cession de l'immeuble par le crédit bailleur au crédit preneur que la revente de l'immeuble par ce dernier au nouveau crédit bailleur bénéficient du dispositif, sans que la nature de l'activité économique à laquelle est affecté l'immeuble par le crédit preneur ait une incidence. Aussi, il est confirmé que le dispositif de l'article 257 bis du CGI s'applique notamment lorsqu'un exploitant hôtelier crédit preneur des locaux dans lesquels il exerce son activité exerce l'option d'achat attachée à son contrat de crédit bail pour les céder à un crédit bailleur dans le cadre d'une opération dite de « lease-back » ou dans le cadre de la mise en place d'un crédit-bail avec un crédit preneur autre que le cédant. Tant la vente opérée par le crédit bailleur initial que la revente opérée par l'exploitant hôtelier bénéficient alors du dispositif.
Auteur : Mme Véronique Louwagie
Type de question : Question écrite
Rubrique : Impôts et taxes
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Dates :
Question publiée le 21 février 2023
Réponse publiée le 4 juillet 2023