16ème législature

Question N° 595
de M. Stéphane Mazars (Renaissance - Aveyron )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère attributaire > Transition écologique et cohésion des territoires

Rubrique > transports ferroviaires

Titre > Situation alarmante de la liaison ferroviaire reliant Rodez à Paris

Question publiée au JO le : 20/02/2024
Réponse publiée au JO le : 28/02/2024 page : 1181

Texte de la question

M. Stéphane Mazars alerte M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la situation préoccupante de la liaison ferroviaire reliant Rodez à Paris. Avec 66 trains supprimés, hors mobilisations sociales, entre le 1er juillet 2023 et le 15 janvier 2024 (soit 17 % des trains), la qualité de service pour les passagers du train de nuit Rodez-Paris et Paris-Rodez se dégrade fortement. M. le député en veut pour preuve les nombreux témoignages d'expériences malheureuses et d'exaspération des usagers qui lui parviennent quotidiennement, tant cette liaison ferroviaire est d'une importance capitale pour le territoire aveyronnais, lequel figure parmi les plus enclavés de France. Faut-il rappeler que dans le pays, Rodez est la ville préfecture la plus éloignée de Paris en train ? Si ce gouvernement a fait de l'ouverture des lignes de trains de nuit une priorité, avec notamment la réouverture de la ligne de nuit TER Paris-Aurillac, force est de constater que la situation ne cesse de se détériorer en ce qui concerne la liaison Paris-Rodez. Au-delà des nombreuses annulations et des retards récurrents, le train arrive plus tard à Paris (8 h 31 au lieu de 7 h 00) et il part plus tôt (19 h 24 au lieu de 21 h 40), des horaires décalés en déconnexion avec la réalité du monde professionnel et de ses obligations. Le trajet a également été rallongé depuis la réouverture de la ligne Paris-Aurillac et dure désormais en moyenne 11 heures. Les suppressions de trains, généralement annoncées moins de 12 heures avant le départ, ne sont que trop rarement accompagnées d'alternatives et les usagers sont souvent contraints de se rendre en gare (dont les horaires d'ouverture ne cessent de se réduire) car les échanges de billets ne peuvent pas se faire en ligne. Cette question augmente l'inquiétude des usagers et professionnels locaux alors que de nouvelles annulations sont prévues à compter du 29 janvier 2024 du fait de travaux et que le confort ne cesse de décroitre : le train ne dispose plus que de 3 voitures contre 4 auparavant ; celle supprimée, la voiture de service, offrait un emplacement vélo, un local d'accueil, un espace cafétéria et 36 couchettes supplémentaires. À l'heure où le Gouvernement encourage les déplacements décarbonés et priorise le développement du rail, notamment des trains de nuit, comment admettre qu'en 1956, le train de nuit quittait Paris à 21 h 30 pour arriver en gare de Capdenac dans l'Aveyron, après 8 h 29 de trajet ; contre 9 h 34 aujourd'hui, avec les mêmes arrêts ? Comment justifier à date des retards conséquents quasi systématiques ? Comment accepter que près d'1 train sur 6 soit annulé depuis juillet 2023 ? En conséquence, il lui demande s'il va intervenir dans les meilleurs délais pour rétablir les usagers, réguliers ou occasionnels, des lignes Rodez - Paris et Paris- Rodez dans leurs droits d'accès à un service public ferroviaire de qualité, fiable, répondant ainsi à leurs besoins comme aux besoins du territoire.

Texte de la réponse

LIAISON FERROVIAIRE PARIS-RODEZ


M. le président . La parole est à M. Stéphane Mazars, pour exposer sa question, n°  595, relative à la liaison ferroviaire Paris-Rodez.

M. Stéphane Mazars . Monsieur le ministre, cela fait trop longtemps que les élus et les forces vives de l'Aveyron tirent la sonnette d'alarme afin de réclamer une liaison ferroviaire entre Rodez et Paris qui soit digne de ce nom. En 2019, notamment lors de l'examen de la loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités (LOM), et en 2020, mes collègues parlementaires et moi-même alertions d'une même voix vos prédécesseurs concernant l'état de cette desserte, déconnectée des attentes des usagers comme des besoins du département en matière d’aménagement et d’attractivité économique. Nous proposions des solutions concrètes et un contrat de progrès auquel serait associée la région Occitanie.

Cinq ans plus tard, rien n'a changé. Pis, pour les passagers des trains Rodez-Paris et Paris-Rodez, de nuit ou de jour, la qualité du service n'a cessé de se dégrader. Des témoignages d’exaspération me parviennent quotidiennement de la part d’étudiants, de jeunes actifs, de familles et de chefs d’entreprise. L'intégralité de la population aveyronnaise est affectée, avec le sentiment croissant d'une prise d'otages ou d'un abandon. En 2024, Rodez reste le chef-lieu français le plus éloigné de Paris pour ceux qui font le choix économique ou écologique – souvent les deux – du moyen de transport collectif décarboné le moins coûteux.

Ce gouvernement a érigé en priorité l'ouverture de lignes de train de nuit, ce dont on ne peut que se féliciter ; mais la réouverture de la ligne de nuit Paris-Aurillac ne peut s'opérer au détriment du territoire aveyronnais et, comme nombre de nos concitoyens, je me demande si l’opérateur SNCF entend réellement maintenir le train de nuit entre Rodez et Paris. Le quotidien des usagers, ce sont des annulations, parfois dix minutes seulement avant le départ, sans solution alternative, des retards récurrents, des horaires inadaptés au monde professionnel, des trajets rallongés – onze heures en moyenne – et des conditions de voyage considérablement dégradées, avec un wagon de moins – quand les trois qui restent ne se changent pas en bus, comme ce fut le cas presque tous les jours durant ce mois de février.

À l'heure où la décarbonation des transports et le développement du rail ne sont plus des options, mais des impératifs, comment admettre qu'en 1956 le train de nuit, quittant Paris plus tard qu'aujourd'hui, à vingt et une heures trente, et respectant les mêmes arrêts, arrivait plus tôt ? Comment accepter que depuis juillet 2023, près d'un train sur six ait été annulé ?

Monsieur le ministre, ces dysfonctionnements chroniques, unanimement constatés, n'ont que trop duré : il faut agir, et vite ! Quelle réponse pouvez-vous apporter au témoignage édifiant d’une entreprise aveyronnaise, au savoir-faire reconnu, qui envisage désormais de mettre un terme à son engagement dans la reconstruction de la cathédrale Notre-Dame de Paris, désabusée par l'expérience calamiteuse du train de nuit Rodez-Paris, dont les innombrables annulations empêchent l'acheminement régulier et prévisible de son personnel ? Comment entendez-vous garantir aux citoyens-usagers leur droit d'accès à un service public ferroviaire de qualité, fiable, capable de répondre comme il se doit aux besoins de désenclavement du département de l'Aveyron ?

M. le président . La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.

M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports . Les trains de nuit qui circulent entre Rodez et Paris subissent, il est vrai, de nombreuses gênes. Les annulations survenues à la fin de l'année 2023 sont essentiellement dues à des difficultés de maintenance des locomotives diesel qui tractent les voitures entre Brive-la-Gaillarde et Rodez. En effet, ces derniers mois, les enrayements dus à la chute de feuilles, ainsi que les nombreux incidents sur les voies, ont généré une surcharge dans les centres de maintenance habituels. De plus, le parc de matériels roulants thermiques, adaptés aux trains de voyageurs, est limité en quantité, ce qui laisse de faibles marges de manœuvre pour l'exploitation des lignes.

L'État, en tant qu'autorité organisatrice des trains de nuit, a financé la location d'une locomotive supplémentaire à Brive-la-Gaillarde, qui renforcera le parc de locomotives utilisées pour les dessertes de Rodez, Albi et Aurillac. Les recherches de locomotives supplémentaires se poursuivent parallèlement.

Des travaux de nuit, indispensables pour régénérer et moderniser la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, sont en cours et se poursuivront tout au long de l'année 2024, notamment aux alentours de Limoges. Ces travaux entraînent parfois des adaptations d'horaires, voire des annulations. L'État et la SNCF mettent tout en œuvre pour en minimiser les impacts : ainsi, la desserte de Rodez devrait retrouver une fréquence quotidienne pour les vacances de Pâques, au minimum.

Au-delà de ces réponses circonstanciées, permettez-moi d'ajouter que je suis particulièrement sensible à votre question, puisque, en tant qu'élu de Dunkerque, j'ai vu le temps de parcours entre Paris et cette ville augmenter de 50 % au cours des vingt dernières années, passant en moyenne d'une heure trente-deux à deux heures vingt-deux. La liaison entre Paris et les villes moyennes – et pas uniquement les métropoles – est en effet un sujet important. Nous subissons, à l'heure actuelle, les conséquences du surinvestissement au bénéfice des lignes à grande vitesse entre métropoles, au détriment de la régénération du réseau de desserte des villes moyennes. Je vous propose donc que nous nous rencontrions prochainement afin d'envisager des solutions et des perspectives à court terme, sachant qu'il s'agit ici d'enjeux de long terme, voire de très long terme.

M. le président . La parole est à M. Stéphane Mazars.

M. Stéphane Mazars . Je vous remercie de votre invitation à réfléchir ensemble à ce sujet important. Le Gouvernement a pris l'engagement de changer la vie des gens : si nous nous emparons de celui-ci, nos concitoyens auront le sentiment que les choses changent.