Question de : M. Raphaël Gérard
Charente-Maritime (4e circonscription) - Renaissance

M. Raphaël Gérard appelle l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement sur les inquiétudes nourries par les associations de défense du patrimoine concernant l'incidence de la massification de la rénovation énergétique sur l'état sanitaire et la qualité architecturale du bâti ancien. La France s'est fixée des objectifs ambitieux en matière de réhabilitation du bâti existant et pour cause : le secteur du bâtiment équivaut dans son ensemble à 44 % de la consommation d'énergie finale et à un quart des émissions de dioxyde de carbone dans le pays. Pour les atteindre, la rénovation du bâti patrimonial est indispensable sachant qu'environ 30 % des logements sont concernés, directement ou indirectement, par des mesures de protection patrimoniale. Néanmoins, les études scientifiques menées par le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) à l'instar de l'étude BATAN tendent à montrer que les outils conventionnels ne sont pas adaptés pour mesurer la performance énergétique du bâti ancien, ce qui pénalise les propriétaires de logements édifiés avant 1948 et encourage la mise en œuvre de techniques standardisées susceptibles de dégrader la qualité architecturale, l'état sanitaire et la durabilité de ce patrimoine. Pourtant des outils appropriés existent et sont clairement identifiés par les services de l'État. Tel est le cas de la simulation thermique dynamique (STD) qui, contrairement au diagnostic de performance énergétique traditionnel, permet de mesurer avec précision le comportement et besoins du bâti ancien, son confort d'été et d'en projeter le comportement selon des hypothèses caniculaires possibles. Des initiatives vertueuses se déploient à l'échelle des territoires pour promouvoir une approche responsable de la rénovation du bâti patrimonial. L'association Sites et Cités a lancé en partenariat avec la Banque des Territoires « 20 projets pour 2020 » qui s'adresse aux villes dotées d'un site patrimonial remarquable ayant été retenues dans le cadre du dispositif Action cœur de ville. Plusieurs villes telles qu'Angoulême ou Figeac ont adhéré à ce projet dont l'objectif est de renforcer les connaissances de la ville sur son patrimoine et ses besoins énergétiques et de confort d'été. Effinergie propose un label expérimental « Effinergie et patrimoine » visant à encourager et valoriser les opérations travaillant à la fois sur la réhabilitation énergétique et sur la préservation des bâtiments à caractère patrimonial. Force est de constater que ces outils plus adaptés à la rénovation thermique ou énergétique du bâti ancien présentent souvent un surcoût par rapport aux approches standardisées. Dans ce contexte, il l'interroge sur l'opportunité d'adapter les aides publiques pour subventionner ce surcoût et soutenir les initiatives développées par les collectivités territoriales dans ce domaine de sorte à concilier les enjeux de protection du patrimoine et les objectifs énergétiques de la France.

Réponse publiée le 16 janvier 2024

La rénovation énergétique des bâtiments constitue une priorité du Gouvernement, compte tenu de l'impact de la consommation énergétique des bâtiments sur la consommation énergétique globale au niveau national (de l'ordre de 45 % de la consommation énergétique totale de la France) et sur les émissions de gaz à effet de serre (environ un quart des émissions du pays), mais aussi de la précarité énergétique qui concerne les occupants des logements dont les performances énergétiques sont insuffisantes, qu'ils en soient propriétaires ou locataires. Cette ambition de massification de la rénovation énergétique concerne également le bâti ancien et notamment celui présentant des caractéristiques patrimoniales et architecturales. L'enjeu pour les logements concernés vise précisément à améliorer la performance énergétique de ces biens dans le respect de ces contraintes architecturales et patrimoniales. Pour cela, l'Etat a mis en place un certain nombre de dispositifs permettant de mobiliser des aides adaptées : dispositif Malraux, dispositif Denormandie, financements Action Cœur de Ville et Petites Villes de Demain, financements MaPrimeRenov, … Ainsi, la création du réseau France Rénov', le service public de la rénovation de l'habitat, permet d'informer, de conseiller et de guider les propriétaires dans la réalisation des travaux de rénovation de leur logement, au plus près des besoins, dans les territoires, avec la collaboration des collectivités locales impliquées. Le déploiement de Mon Accompagnateur Rénov', l'accompagnement systématique des projets de rénovation par un professionnel agréé par l'ANAH, a vocation à accompagner les propriétaires bailleurs à organiser et à programmer des travaux de rénovation adaptés et à solliciter les aides financières nécessaires. Les propriétaires peuvent également faire réaliser des audits énergétiques de leurs logements, avec l'appui des structures soutenues par les collectivités locales assurant l'information et le conseil sur la rénovation énergétique dans le cadre du programme SARE, ou dans le cadre des aides financières à la rénovation. Pour le bâti ancien, il est ainsi recommandé de confier la réalisation de cet audit énergétique à des architectes, ou à des bureaux d'études ayant une expérience dans le domaine du bâti ancien. Par ailleurs, le diagnostic de performance énergétique (DPE) a connu une refonte en 2021 et a ainsi été totalement repensé. C'est aujourd'hui un outil fiable, bien plus performant et mieux adapté aux attentes des professionnels comme des particuliers que l'ancienne version dite « sur factures ». Pour rappel, le DPE est un outil qui est neutre et vise à évaluer les performances des logements uniquement sur le volet thermique et carbone, en fonction de leurs caractéristiques physiques effectives (notamment les matériaux de construction utilisés). Le DPE tient compte des spécificités de certains bâtiments anciens, notamment de la forte inertie de certains matériaux présents dans le bâti ancien. La méthode de calcul du DPE est donc adapté au bâti ancien. S'agissant de la mise en œuvre de la réglementation du DPE et des compétences des diagnostiqueurs, l'arrêté révisant les compétences exigées des diagnostiqueurs, publié à l'été 2023, renforce les exigences de formation des professionnels pour l'obtention - et la conservation - de la certification de compétence nécessaire pour les diagnostiqueurs immobiliers. A ce sujet, un travail est en cours sur la rédaction d'une base des questions qui seront destinées à évaluer la compétence des diagnostiqueurs immobiliers à la réalisation des DPE (et qui pourront intégrer des questions spécifiques sur le bâti ancien). Des études de cas impliquant des bâtiments anciens devront être examinées dans les formations initiale et continue des diagnostiqueurs immobiliers. Enfin, les guides de recommandation de la réalisation des DPE seront complétés. Les recommandations de travaux - à valeur indicative - présentées dans le DPE seront aussi travaillées à cette occasion pour être davantage adaptées au bâti ancien. Ainsi, il convient de rappeler qu'il est possible de rénover des bâtiments patrimoniaux, et même d'atteindre des niveaux de performance énergétique très satisfaisants dans un grand nombre de cas tout en respectant la valeur architecturale et patrimoniale, comme l'a démontré l'expérimentation BBC Effinergie que vous mentionnez et que le Gouvernement soutient. La capitalisation des résultats de cette expérimentation permettra d'améliorer la qualité des recommandations de travaux formulées pour la rénovation des bâtiments patrimoniaux. A cet effet, le ministère chargé du Logement et le ministère de la Culture ont engagé un travail commun visant à faire davantage connaître les solutions de rénovation adaptées aux bâtiments présentant des caractéristiques architecturales et patrimoniales, qui devrait se matérialiser par un portail internet capitalisant les expériences de rénovation réussies menées au niveau local. Cela permettra notamment d'adapter les recommandations de travaux aux caractéristiques du bâti ancien.

Données clés

Auteur : M. Raphaël Gérard

Type de question : Question écrite

Rubrique : Patrimoine culturel

Ministère interrogé : Ville et logement

Ministère répondant : Logement

Dates :
Question publiée le 28 février 2023
Réponse publiée le 16 janvier 2024

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