Question écrite n° 6046 :
Application des dispositions pénales en matière de zoopornographie

16e Législature

Question de : Mme Corinne Vignon
Haute-Garonne (3e circonscription) - Renaissance

Mme Corinne Vignon appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'application des dispositions pénales en matière de zoopornographie, nouvellement créées par la loi n° 2021-1539 sur maltraitance animale. Contrairement à l'interdiction énoncée à l'article 521-1-2 du code pénal, des images mettant en scène des actes sexuels commis sur les animaux sont toujours largement disponibles sur internet. Contactée par une association, la Fédération française des télécommunications, qui regroupe trois des quatre principaux fournisseurs d'accès à internet (FAI), explique que ces derniers doivent respecter la «neutralité du net » qui voudrait que seule une décision de justice puisse leur permettre de retirer ce type de contenu. Par ailleurs, alors que l'article 227-24 du code pénal est censé protéger les mineurs de ces images, il ne leur faut que quelques secondes pour identifier ces sites. L'exposition des mineurs aux contenus pornographiques est une préoccupation importante aujourd'hui des associations de protection de l'enfance et des parlementaires. Enfin, les petites annonces pour commettre des actes sexuels sur les animaux continuent d'abonder sur internet, allant à l'encontre de l'article 521-1-3 du code pénal. Aussi, Mme la députée souhaite savoir quelles actions le Gouvernement compte prendre afin de mettre fin à la production et diffusion des images zoopornographiques. Elle lui demande également s'il ne serait pas possible de saisir la plate-forme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements (Pharos), visant à faciliter le signalement, par les internautes, de contenus illicites.

Réponse publiée le 16 mai 2023

Le Ministre de la Justice partage la légitime préoccupation de voir la loi respectée et les procédures judiciaires engagées à l'encontre des actes de cruauté exercés envers les animaux. La loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes, est ainsi venue renforcer les mesures visant à lutter contre la maltraitance des animaux domestiques et des animaux sauvages et améliorer leurs conditions de détention. Le texte a permis également de renforcer les sanctions déjà prévues par le code pénal en cas de sévices graves ou d'actes de cruauté envers un animal domestique. Les sévices graves envers les animaux (prévus par l'article 521-1 du code pénal) constituent désormais un délit réprimé d'une peine de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. La loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 est également venue renforcer la lutte contre la diffusion de contenus illicites en lien avec ce type d'atteintes commises sur des animaux. L'article 521-1-2 alinéa 2 du code pénal vient réprimer de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende, le fait de diffuser sur internet l'enregistrement de telles images. La répression est également étendue au fait de solliciter ou de proposer la mise à disposition d'un animal dans un but zoophile, sur un site de rencontres par exemple (article 521-1-3 du code pénal). Dans ce cadre et conformément aux dispositions prévues par la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN), les fournisseurs d'accès et les hébergements sont soumis à une triple obligation : de surveillance, de mise en place d'un dispositif de signalement, et de mise en place d'un dispositif de filtrage. Pour autant, la LCEN, conformément à la directive du 8 juin 2000 (art. 15, 1), précise qu'il n'existe pas pour les fournisseurs d'accès et d'hébergement, d'obligation générale de surveillance des informations qu'ils transmettent ou stockent, ni d'obligation générale de rechercher des faits ou des circonstances révélant des activités illicites. La jurisprudence de la Cour de cassation est d'ailleurs venue rappeler ce principe (Civ. 1re, 12 juill. 2012, nos 11-13.666, 11-15.165, 11-15.188, 11-13.669). Cette absence d'obligation générale de surveillance ne fait cependant pas obstacle aux décisions des autorités publiques compétentes. La loi du 21 juin 2004 prévoit ainsi que l'autorité judiciaire peut prescrire en référé ou sur requête au fournisseur d'hébergement ou, à défaut au fournisseur d'accès, toutes mesures propres à faire cesser le dommage occasionné par le contenu d'un service de communication au public en ligne, notamment un contenu zoo-pornographique, considéré comme attentatoire à la dignité humaine. En cas de non-respect de cette obligation, des poursuites judiciaires pourraient être engagées sur le fondement de la complicité de la diffusion sur internet de telles images aux termes de l'article 121-7 du code pénal. Afin d'endiguer ces phénomènes, la plateforme de signalement, PHAROS permet également de répertorier les contenus frauduleux mis en ligne relatifs à des actes de cruauté envers les animaux. Ainsi, en 2022, 413 signalements se rapportant à des faits de sévices sur animaux ont été reçus par la plate-forme. Après analyse, sous l'autorité du parquet compétent, ces contenus zoophiles ou zoo-pornographiques font l'objet d'une transmission aux fins d'enquête à l'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP), lequel dispose depuis 2022 d'une unité dédiée à la lutte contre les maltraitances faites aux animaux. Le Gouvernement demeure également particulièrement attentif à la protection des mineurs en ligne en matière d'accès à des contenus illicites. La loi du 30 novembre 2021est ainsi venue compléter l'article 227-24 du code pénal qui réprime de trois ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende le fait de fabriquer, de transporter, de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, un message à caractère violent ou pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine, soit de faire commerce d'un tel message, lorsque ce message est susceptible d'être vu ou perçu par un mineur. Afin de préserver les mineurs de certains contenus diffusés en ligne, l'article 6 de la LCEN met également à la charge des personnes dont l'activité est d'offrir un accès à des services de communication au public en ligne, l'obligation d'informer leurs abonnés de l'existence de moyens techniques permettant de restreindre l'accès à certains services. Les opérateurs ont ainsi l'obligation de mettre en place des dispositifs de contrôle parental pour permettre aux parents de protéger leurs enfants face aux risques d'exposition à des images ou informations violentes ou pornographiques. De surcroît, la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 fait notamment obligations aux grandes plateformes de partage et de sites de réseaux sociaux de mettre en place des dispositifs de notification des contenus illicites facilement accessibles pour leurs utilisateurs.

Données clés

Auteur : Mme Corinne Vignon

Type de question : Question écrite

Rubrique : Animaux

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 7 mars 2023
Réponse publiée le 16 mai 2023

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