Taux d'usure - Paralysie actuelle du marché de l'acquisition de logement
Question de :
Mme Liliana Tanguy
Finistère (7e circonscription) - Renaissance
Mme Liliana Tanguy appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la paralysie actuelle du marché de l'acquisition de logement par les ménages, du fait des modalités de calcul du taux d'usure. Encourager les ménages à acquérir leur logement relève de l'intérêt public. À l'heure où la situation des régimes des retraites ne peut laisser espérer d'améliorations substantielles, il est sage d'encourager les ménages à se libérer du poids d'un loyer, à l'issue de leur vie active. Le taux d'usure tel qu'il est actuellement établi n'est pas actualisé en temps réel, ce qui aboutit à empêcher la distribution de crédit à des demandeurs pourtant solvables, à écarter les primo-accédants comme les ménages plus âgés. De plus l'inclusion des frais d'assurance des emprunteurs dans le calcul du taux d'usure n'a plus de justification du fait des réformes de ce régime d'assurance, en libre concurrence, où les assurés peuvent changer d'assurance à tout moment. C'est pourquoi elle demande si le Gouvernement envisage d'exiger la réforme des modalités de calcul du taux d'usure pour mettre un terme à la situation actuelle et favoriser l'accession à la propriété de sa résidence principale.
Réponse en séance, et publiée le 7 décembre 2022
TAUX D'USURE ET ACQUISITION DE LOGEMENT
Mme la présidente. La parole est à Mme Liliana Tanguy, pour exposer sa question n° 60, relative au taux d'usure pour l'acquisition d'un logement.
Mme Liliana Tanguy. Madame la secrétaire d'État, je souhaite vous interroger sur la difficulté d'accès au logement et plus précisément sur la paralysie actuelle du marché de l'acquisition de logements par les ménages, en raison des modalités de calcul du taux d'usure.
Nous faisons face à une crise du logement sans précédent et les tensions permanentes sur le marché du logement dans de nombreux territoires, notamment littoraux – c'est le cas en Bretagne dans ma circonscription du Finistère –, constituent un problème récurrent qui pèse sur la vitalité et l'activité dans nos communes, ainsi qu'une préoccupation majeure pour les élus locaux.
Face à l'explosion des prix de l'immobilier, certains citoyens se retrouvent parfois contraints de renoncer à un emploi, voire de quitter leur région. Les jeunes ménages sont particulièrement confrontés aux difficultés d'accès à la propriété, et certains retraités se voient contraints de supporter le poids d'un loyer.
L'un des freins à l'acquisition d'une résidence principale réside dans la difficulté d'accéder au crédit immobilier, en raison d'innombrables refus de prêts bancaires opposés à des ménages pourtant solvables.
Or encourager les ménages à acquérir leur logement relève de l'intérêt public. En effet, compte tenu de l'incertitude pesant sur le pouvoir d'achat, il serait souhaitable de faciliter l'obtention d'un crédit immobilier. Cependant, tel qu'il est actuellement établi, le taux d'usure n'est pas actualisé en temps réel, ce qui aboutit à empêcher la distribution de crédits, notamment aux primo-accédants et aux ménages plus âgés.
De plus, l'inclusion des frais d'assurance des emprunteurs dans le calcul du taux d'usure n'a plus de justification du fait des réformes de ce régime d'assurance, désormais en libre concurrence – les assurés peuvent changer d'assurance à tout moment.
Ainsi, le Gouvernement envisage-t-il d'engager une réforme des modalités de calcul du taux d'usure, afin de mettre un terme à la situation actuelle et de favoriser l'acquisition d'une résidence principale ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'écologie.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Vous avez interrogé le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, M. Christophe Béchu : ne pouvant être présent, il m'a chargé de vous répondre.
Le Gouvernement est soucieux de maintenir un accès facile au crédit immobilier, en particulier pour les primo-accédants, lesquels sont souvent de jeunes ménages. Cela étant, la rapidité de l'actuelle hausse des taux d'intérêt crée des tensions dans la distribution de crédits immobiliers, qui peuvent être dues au taux d'usure, mais aussi à la prudence des acteurs financiers.
Dans ce contexte, le Gouvernement et la Banque de France échangent régulièrement avec les professionnels du secteur afin de suivre la situation et d'identifier les éventuelles difficultés. Au cours de ces discussions, est évoquée une révision des modalités de calcul du taux d'usure.
Cependant, compte tenu du rôle de ce taux, la modification de ses modalités de calcul ne doit être envisagée qu'avec grande précaution. Comme l'indiquent les recommandations émises en 2019 et en 2021 par le Haut Conseil de stabilité financière, le taux d'usure est en effet un outil essentiel pour protéger les ménages, en ce qu'il permet de préserver les consommateurs de taux trop élevés et de limiter le risque de surendettement, en particulier pour les publics les plus fragiles.
La modification de la réglementation relative à l'usure pourrait donc favoriser l'endettement des ménages, lequel a déjà beaucoup crû ces dernières années : il représentait 66 % du PIB début 2022, contre 34 % en 2002, c'est-à-dire vingt ans plus tôt.
Notons également que, dans le cadre réglementaire actuel, le taux d'usure a été déjà fortement augmenté en 2022, passant de 2,41 % au quatrième trimestre 2021 à 3,05 % au quatrième trimestre 2022 pour des prêts à taux fixe de plus de vingt ans.
Mme la présidente. La parole est à Mme Liliana Tanguy.
Mme Liliana Tanguy. Je vous remercie pour votre réponse. Le logement est un enjeu crucial pour nos concitoyens et je sais que vous avez pris la mesure de l'urgence. J'espère que des dispositions seront bientôt prises afin de faciliter l'accès au crédit et l'accès au logement dans les zones tendues.
Auteur : Mme Liliana Tanguy
Type de question : Question orale
Rubrique : Banques et établissements financiers
Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 novembre 2022