Question écrite n° 6261 :
Politique de la société Engie et opportunité de la renationaliser

16e Législature

Question de : Mme Clémence Guetté
Val-de-Marne (2e circonscription) - La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale

Mme Clémence Guetté appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la politique de la société Engie dont l'État est actionnaire et sur l'opportunité de la renationaliser. Cette société est en effet issue de la privatisation de Gaz de France en 2006. L'État français est aujourd'hui le premier actionnaire du groupe Engie, avec une participation de 23,6 %. Cela n'a pourtant pas empêché la vente de son ancienne filiale Equans au groupe Bouygues. Cette filiale était spécialisée, entre autres, dans la climatisation, la gestion du froid ou la rénovation des bâtiments. Ainsi, avec la vente d'Equans, Engie et donc l'État, a perdu le contrôle sur des activités économiques qui sont stratégiques pour la transition énergétique. La privatisation d'entreprises publiques réduit ainsi les marges de manœuvre de l'État. Bouygues s'est engagé à ne mettre en œuvre aucun plan de départs contraints en France pendant une durée de 5 ans. Cependant, l'État se retrouve en incapacité d'agir pour protéger ces postes de travail. Par ailleurs, dans le contexte actuel de crise des prix de l'énergie, le résultat net d'Engie a atteint 5,2 milliards d'euros en 2022, contre 2,9 milliards en 2021. 65 % de cette somme se retrouve directement versée aux actionnaires, conformément à la politique de distribution de la société au cours de la dernière décennie. Ainsi, le caractère privé de l'entreprise l'amène à privilégier cette utilisation de ces bénéfices records aux investissements nécessaires pour la transition énergétique, par exemple. La privatisation et l'ouverture à la concurrence de l'ancien secteur public de l'énergie empêchent ainsi une allocation optimale des ressources en vue de mettre en œuvre les objectifs politiques de la Nation. De ce fait, la France n'atteindra pas les objectifs qu'elle s'était fixée pour le déploiement des énergies renouvelables sur la période 2019-2023, d'après le baromètre annuel Observ'ER paru en janvier 2023. En l'absence d'un pôle public de l'énergie, la place centrale du privé dans ce secteur rend ainsi difficile la mise en œuvre d'une stratégie nationale cohérente au service des besoins de la population. Elle souhaiterait donc savoir si le Gouvernement envisage la renationalisation de la société Engie afin de favoriser la construction d'un pôle public de l'énergie qui permette de mener une vraie politique de transition énergétique.

Réponse publiée le 23 mai 2023

L'État possède 23,6 % d'Engie et est à ce titre le premier actionnaire du groupe. Engie est un leader européen et mondial dans les domaines de la production d'énergie renouvelable, des infrastructures énergétiques centralisées et décentralisées, des services associés, de la production d'électricité bas carbone et de la fourniture de gaz et d'électricité. L'entreprise Engie est déjà pleinement engagée dans la transition énergétique et a pour objectif d'atteindre la neutralité carbone en 2045. L'État soutient Engie dans la mise en œuvre de ce plan stratégique ambitieux. Le groupe investit massivement dans la transition énergétique : en 2022, Engie a réalisé 5,5 Md€ d'investissements de croissance, principalement dans les énergies renouvelables, les infrastructures et les solutions énergétiques. En 2022, Engie a notamment mis en service 3,9 GW de capacités renouvelables additionnelles, sur un total de 38 GW. Le groupe poursuit également sa sortie du charbon, sortie qui sera achevée en 2025 en Europe et en 2027 dans le reste du monde. Dans les prochaines années, Engie entend poursuivre sa forte croissance dans énergies renouvelables, avec 4 GW de capacités additionnelles par an en moyenne entre 2023 et 2025 puis 6 GW par an entre 2026 et 2028. Les bons résultats 2022 d'Engie sont une bonne nouvelle pour l'entreprise et pour l'État premier actionnaire du groupe. L'État a perçu en 2023 plus de 800 M€ de dividendes qui ont été reversés au budget général de l'État. Le groupe a par ailleurs payé en Europe 2 Mds€ de taxes exceptionnelles sur les bénéfices et au titre de la contribution sur les rentes inframarginales. Les résultats 2022 d'Engie permettent lui également de soutenir le programme précité d'investissements massifs dans la transition énergétique. Quant à la cession d'Equans, elle a été une étape majeure dans la mise en œuvre du plan stratégique du groupe, présenté en 2021. Cette cession a contribué à la simplification du groupe et à lui permettre de se concentrer sur l'accélération de ses investissements cœur, notamment dans les énergies renouvelables. L'offre de Bouygues était la plus pertinente au regard de l'ensemble des critères retenus par Engie et elle répondait également aux objectifs poursuivis par l'État. Bouygues a en effet renforcé ses engagements sociaux, avec la garantie de ne mettre en œuvre aucun plan de départ contraint en France et en Europe pendant une durée de 5 ans à compter de la réalisation de l'opération. Bouygues s'est également engagé à créer 10 000 emplois nets sur 5 ans. Le projet industriel était également cohérent : avec l'acquisition d'Equans, Bouygues entend créer un leader mondial dans les services multi-techniques, ancré en France. Bouygues s'est en outre engagé à ne pas procéder à des cessions qui représenteraient plus de 10 % du chiffre d'affaires pendant 3 ans à l'issue de la conclusion de la transaction. Avec 23,6 % du capital, l'État est représenté au conseil d'administration d'Engie. Il possède également une action spécifique qui lui permet de s'opposer à la cession d'actifs stratégiques, en particulier certaines infrastructures indispensables à la sécurité d'approvisionnement énergétique du pays. Engie est par ailleurs positionnée sur des marchés concurrentiels compétitifs et réalise une part importante de son chiffre d'affaires à l'international. Enfin, une nationalisation totale du groupe Engie serait particulièrement coûteuse pour les finances publiques (au moins 27 Md€ au cours de bourse du 11 mai).

Données clés

Auteur : Mme Clémence Guetté

Type de question : Question écrite

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Dates :
Question publiée le 14 mars 2023
Réponse publiée le 23 mai 2023

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