16ème législature

Question N° 6276
de M. Carlos Martens Bilongo (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Val-d'Oise )
Question écrite
Ministère interrogé > Enseignement supérieur et recherche
Ministère attributaire > Enseignement supérieur et recherche

Rubrique > enseignement supérieur

Titre > Candidatures payantes en IEP

Question publiée au JO le : 14/03/2023 page : 2319
Réponse publiée au JO le : 05/09/2023 page : 7943

Texte de la question

M. Carlos Martens Bilongo interroge Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les frais de dossier imposés aux étudiants souhaitant postuler pour l'entrée dans un IEP (Instituts d'études politiques), aussi appelées Science Po, lors de l'entrée en master. En effet, l'entrée dans ces établissements est conditionnée au versement d'une somme de plus d'une centaine d'euros pour les personnes non-boursières et ce au titre des frais de dossiers. Cette situation interroge, d'autant plus que même les étudiants boursiers peuvent se voir demander le versement de frais de dossier, parfois de plusieurs dizaines d'euros. Dès lors un étudiant boursier ou non, désireux de poursuivre sa formation académique dans le domaine politique se voit astreint au paiement de sommes élevées qui dans beaucoup de cas, empêche l'étudiant de déposer sa candidature, faute des moyens nécessaires. Il est clair que cette situation pose une rupture d'égalité majeure entre les étudiants ayant un capital financier suffisant et ceux issus d'un milieu modeste, si ce n'est pauvre. Tout cela est d'autant plus inacceptable que le statut de boursier confère une exonération de frais de scolarité lors d'un dépôt de candidature en master au sein d'une université française. Par ailleurs, ces établissements se trouvent bien souvent mieux dotés financièrement que les universités, ce qui rajoute à l'incompréhension des tarifs pratiqués lors des dépôts de candidatures au sein de ces IEP. De la même manière, il existe une grande disparité de tarifs entre ces établissements. Ainsi, si Science Po Paris exonère totalement les boursiers de frais de dossier, tout en demandant de régler 150 euros à ceux qui ne le sont pas, d'autres IEP peuvent demander plusieurs dizaines d'euros de frais. L'IEP d'Aix-en-Provence, aussi nommé Science Po Aix, demande par exemple 120 euros aux étudiants non-boursiers et 60 euros de frais aux étudiants boursiers. Il existe 11 IEP en France et si un étudiant, comme beaucoup pensent légitimement le faire, désire postuler à chacun d'entre eux, il devra prévoir plus de 1 000 euros s'il n'est pas boursier et une centaine d'euros s'il l'est. Par conséquent, le coût dont doivent s'acquitter les étudiants pose un problème fondamental : la rupture de l'égalité républicaine face à l'accès au savoir. En effet, conformément au droit à la poursuite d'étude, consacré à l'article L. 612-6-1 du code de l'éducation, les étudiants doivent pouvoir poursuivre leur étude après l'obtention d'un niveau licence, en ce que cet article dispose que : « L'accès en deuxième année d'une formation du deuxième cycle conduisant au diplôme national de master est de droit pour les étudiants qui ont validé la première année de cette formation ». Dès lors, des étudiants souhaitant continuer leur cursus au sein d'instituts d'études politiques se voit confrontés à une barrière financière, potentiellement insurmontable, qui les entrave. De surcroît, cette rupture d'égalité face à l'accès aux études se couple à une rupture d'égalité territoriale, si chaque IEP établit ses propres règles quant aux coûts de candidatures permettant d'y entrer, nombre d'étudiants se voient contraints à une mobilité territoriale non-désirée ou au contraire, de ne pas pouvoir se rendre sur le lieu d'enseignement souhaité. Ainsi, si peuvent exister des critères de candidatures objectifs, tel que la nature du diplôme suivi antérieurement ou bien les compétences dont justifie le candidat, il est incompréhensible que des frais de dossiers soient exigés sans justification, alors même que cela a pour effet d'établir une présélection entre étudiants disposant des ressources pour payer et de ceux ne les ayant pas. Il est de la responsabilité du Gouvernement d'agir pour mettre fin aux problèmes que M. le député soulève, alors même qu'un égal accès aux savoirs entre citoyens est une des pierres angulaires de la promesse républicaine. Par la même occasion, il faut noter que ces IEP sont des établissements formant des individus qui pour la plupart, seront amenés à des postes de gouvernances. Or ces frais de dossiers ont pour conséquence d'empêcher une partie de la population issue des catégories modestes, d'entrer dans ces établissements. Tout cela a une conséquence notable, que beaucoup de recherches ont mis en lumière, à savoir la reproduction sociale. Les classes supérieures étant surreprésentées dans ces institutions au détriment des classes ouvrières. L'émancipation des classes sociales défavorisées est largement entravée, alors même que la République est censée permettre à chacun de s'élever socialement, peu importe son origine. Dès lors, sur quels éléments se basent les IEP pour justifier de tels frais de dossiers ? De plus, comment justifier que des établissements demandent des frais de dossier aussi élevés pour que des étudiants puissent simplement postuler, sans garantie de remboursement en cas de non-acceptation dans l'établissement ? Plus encore, pourquoi les boursiers se voient contraints de payer des frais de dossier, toujours sans garantie de remboursement le cas échéant, alors même que leur situation sociale les exonère de frais dans les universités publiques ? Il lui demande si le Gouvernement compte agir en vue de l'interdiction de ces frais.

Texte de la réponse

Les instituts d'études politiques (IEP) délivrent un diplôme d'établissement conférant le grade de master. Ces diplômes se distinguent du diplôme national de master. C'est donc sur la base de cette distinction que les IEP peuvent fixer des droits d'inscription qui leurs sont propres et peuvent être amenés à mettre en place des droits de candidature dans le cadre de leur procédure de recrutement. En l'état du droit, le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche n'est pas fondé à agir sur la définition des frais d'inscription et frais inhérents aux campagnes de recrutement à des formations qui conduisent à ces diplômes, qui sont des diplômes d'établissement. Toutefois, si l'IEP de Paris exonère les boursiers de ces droits de candidature, l'IEP de Grenoble demande des frais de 25 € aux étudiants boursiers et les sept IEP membres du « Réseau ScPo » (Aix-en-Provence, Lille, Lyon, Rennes, Saint-Germain en Laye, Strasbourg, Toulouse), qui organisent un concours commun, ainsi que l'IEP de Lille pour son propre concours, instaurent pour les boursiers des droits de 50 €. Seul l'IEP de Bordeaux demande des frais indifférenciés de 120 € aux étudiants qu'ils soient boursiers ou non. En revanche tous les IEP, sans exception, ont mis en place des politiques sociales volontaristes via des programmes spécifiques de préparation. Ils ont par ailleurs développé des politiques spécifiques de droits de scolarité modulés et calculés en fonction du revenu fiscal de référence.