16ème législature

Question N° 633
de M. Philippe Schreck (Rassemblement National - Var )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Industrie et énergie
Ministère attributaire > Industrie et énergie

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Avenir de l'hydroélectricité

Question publiée au JO le : 27/02/2024
Réponse publiée au JO le : 06/03/2024 page : 1470

Texte de la question

M. Philippe Schreck interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie sur l'avenir de l'hydroélectricité. Depuis plusieurs années, la souveraineté énergétique du pays prend l'eau de toutes parts. Si l'actualité reste focalisée sur les approvisionnements extérieurs, le nucléaire et le prix de l'électricité, le Gouvernement demeure silencieux sur la question des barrages hydroélectriques. Pourtant, en 2015 et 2019, la Commission européenne a mis en demeure la France de mettre en concurrence toutes les concessions de ses ouvrages hydroélectriques. Depuis, face à l'insécurité juridique, les concessionnaires ont dû geler leurs investissements, ce qui impacte fortement les opérations de maintenance et la modernisation de ces ouvrages. Constatant la procrastination et le manque total de transparence de l'exécutif, il lui demande de l'informer sur l'action et les projets du Gouvernement pour résoudre la crise de l'hydroélectricité en France.

Texte de la réponse

AVENIR DE L'HYDROÉLECTRICITÉ


Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Schreck, pour exposer sa question, n°  633, relative à l'avenir de l'hydroélectricité.

M. Philippe Schreck. Au sortir de l'hiver, le coût de l'énergie grève toujours plus le budget des Français. Une nouvelle fois, pouvoir d'achat et souveraineté énergétique sont étroitement liés.

Je ne reviendrai pas sur la filière nucléaire française, durablement mise à mal par des compromissions politiciennes. En revanche, je parlerai d'hydroélectricité, un sujet d'avenir à part entière. Issue de l'exploitation des barrages, elle constitue une énergie renouvelable indispensable, notamment lors des pics de consommation. Cependant, l'état des barrages français, dont l'âge moyen est supérieur à 70 ans, nécessite d'importants travaux de maintenance et de modernisation. Les investissements projetés permettraient d'augmenter leur rendement de 15 % à 20 % d'ici à 2035.

Pourtant, ces investissements sont suspendus ou, à tout le moins, différés, car, depuis plus de dix ans, la Commission européenne exige la mise en concurrence des barrages, actuellement exploités en concession. Pour la filière hydroélectrique française, une telle mise en concurrence serait synonyme de démantèlement et de cession à la découpe à des structures pouvant être étrangères. Cette exigence bruxelloise empêche EDF, opérateur historique, d'avoir une quelconque visibilité lui permettant d'envisager la réalisation de projets à court ou à moyen terme.

Il n'est pas inutile de rappeler que les barrages, en plus de produire de l'électricité, permettent de soutenir le débit des rivières, de développer le tourisme et l'agriculture ainsi que de prévenir et gérer les conflits d'usage de l'eau, de plus en plus nombreux en cette période de raréfaction de la ressource.

Le sujet doit donc être traité sans délai, à moins que la mise en concurrence et la vente de nos barrages soient déjà actées. La souveraineté énergétique de notre nation et l'approvisionnement électrique des Français à un prix contenu dépendent en grande partie de la gestion de ce dossier.

Ma question est donc la suivante : quelles actions concrètes le Gouvernement entend-il engager à court terme, voire immédiatement, afin d'éviter la mise en concurrence de nos barrages et le démantèlement de la filière hydroélectrique, indispensable à notre souveraineté et à l'aménagement du territoire ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du numérique.

Mme Marina Ferrari, secrétaire d'État chargée du numérique. Le Gouvernement porte une grande attention à l'énergie hydroélectrique et à son développement. Cette énergie, renouvelable et pilotable, est essentielle pour atteindre nos objectifs climatiques, pour sécuriser l'approvisionnement des Français et pour bien gérer la ressource en eau.

Il n'y a aucune procrastination de notre part, bien au contraire. Le Gouvernement est profondément engagé pour résoudre les précontentieux européens sur les concessions hydroélectriques et libérer les investissements dans le secteur, notamment dans les stations de transfert d'énergie par pompage, un sujet déjà évoqué dans l'hémicycle. Il n'y a donc aujourd'hui aucune option de vente de nos barrages. Rien n'est acté, je puis vous l'assurer.

Tenir une telle résolution nécessite la prise en compte et le traitement d'enjeux multiples, tels que la maîtrise technique et la sécurité des ouvrages, la gestion partagée de la ressource en eau à l'échelle des vallées ou encore le cadre juridique relatif au droit de la concurrence et à la liberté d'établissement. Les échanges avec la Commission européenne se poursuivent.

Sachez, monsieur le député, qu'étant originaire de Savoie, le premier département hydroélectrique de France, je demeure – avec mon collègue Roland Lescure, excusé aujourd'hui – très attentive à ce sujet.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Schreck.

M. Philippe Schreck. Cette question est sur le devant de la scène depuis plus de dix ans. Avoir un dossier sur son bureau est une bonne chose, le traiter en est une meilleure.

Vous l'avez dit : rien n'est acté. C'est bien le problème : on ne sait toujours pas si la seule mesure permettant de contourner l'obstacle que constitue la gestion par concession, à savoir une mesure d'autorisation, serait considérée positivement par Bruxelles. Je le répète : l'âge moyen de nos barrages est de 70 ans et l'opérateur historique ne dispose pas de la visibilité requise pour lancer les investissements nécessaires pour les décennies à venir, qu'il s'agisse de maintenance ou de développement des technologies que vous avez évoquées.

Vous affirmez qu'il n'y a pas de procrastination. Je pense le contraire, parce que le dossier est toujours sur le bureau mais n'avance pas. Il est toujours à la même place dans la même pile. En matière énergétique, les dernières années ont prouvé que la procrastination était une pratique dévastatrice et redoutable pour la continuité de l'approvisionnement et pour le pouvoir d'achat de nos concitoyens.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Marina Ferrari, secrétaire d'État. Monsieur le député, en matière d'énergie, il faut se garder du « y'a qu’à, faut qu’on ». Le dossier est très complexe – vous le savez, puisque vous le maîtrisez parfaitement. Vous savez aussi que l'État français est très engagé sur cette question.

En outre, je tiens à souligner que la défense des intérêts français auprès de la Commission européenne a connu des avancées significatives, comme la reconnaissance du rôle du nucléaire pour atteindre nos objectifs climatiques.