16ème législature

Question N° 6375
de M. André Chassaigne (Gauche démocrate et républicaine - NUPES - Puy-de-Dôme )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités, autonomie et personnes handicapées
Ministère attributaire > Solidarités, autonomie et personnes handicapées

Rubrique > professions judiciaires et juridiques

Titre > Rémunération des mandataires judiciaires à la protection des majeurs individuels

Question publiée au JO le : 14/03/2023 page : 2356
Réponse publiée au JO le : 09/05/2023 page : 4253

Texte de la question

M. André Chassaigne interroge M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées sur la rémunération des mandataires judiciaires à la protection des majeurs individuels. La protection juridique des majeurs, sous tutelle ou curatelle, est assurée soit par la famille, sans formation obligatoire et sans rémunération, soit par un préposé d'établissement hospitalier ou un service de mandataire judiciaire à la protection des majeurs (MJPM), personne morale au sein d'association tutélaires, ou encore par un MJPM indépendant (MJPMi), personne physique. Les émoluments des mandataires judiciaires sont fixés par le décret n° 2011-936 du 1er août 2011 et l'arrêté du 6 janvier 2012. Les personnes sous protection participent au financement de la mesure d'après le décret n° 2011-710 du 21 juin 2011 et le solde est versé aux MJPM par l'État. Sur ce point, les MJPMi estiment que ces personnes pourraient participer davantage quand les ressources ou le patrimoine sont importants, réduisant d'autant la participation de l'État. Un arrêté de 2012 a modifié le barème mais uniquement pour les MJPMi, personnes physiques, créant une inégalité de traitement avec les services de mandataires, personne morale, qui bénéficient d'une dotation de l'État. Une étude de l'IFGAS a démontré qu'une mesure assurée par un MJPMi coûte trois fois moins cher que celle exercée par un service. D'ailleurs, on constate que la participation de la personne protégée augmente quand la mesure n'est plus assurée par un MJPMi. Il faut également noter que des financements ont été attribués en 2022 pour la création de postes supplémentaires dans les services MJPM. Parallèlement, les MJPMi subissent depuis 2014 un gel de leur rémunération, autrefois indexée sur le montant de I'AAH et du Smic horaire, en créant un indice de référence fixe jamais revalorisé. Sans ces décisions, le tarif mensuel de base pour une mesure de protection serait aujourd'hui de 160,67 euros contre 142,95 euros en 2014, soit un manque à gagner de 11 %. Or les MJPMi sont confrontés aussi à une augmentation forte du coût de l'énergie, du matériel informatique et de communication, des frais postaux, des salaires des collaborateurs. Dans un environnement social et juridique plus complexe et conflictuel, le métier de MJPM est devenu plus exigeant, imposant une adaptation, une réactivité, des outils nouveaux et une mise à jour des connaissances qu'il faut également financer. Enfin, les MJPMi ne reçoivent la participation de l'État que tous les trimestres, parfois avec retard, soit entre 2 et 5 mois après l'engagement des dépenses. Sachant que le nombre de mesures de protection juridique assurées par les professionnels pourrait doubler d'ici 2040 en atteignant près d'un million, il importerait aujourd'hui de mieux reconnaître et rémunérer les MJPMi, surtout s'ils doivent compenser les services MJPM en difficulté de recrutement ou de financement. Il lui demande s'il va rétablir une égalité de traitement entre tous les mandataires judiciaires à la protection des majeurs et d'assurer une revalorisation rapide et régulière de la rémunération des indépendants.

Texte de la réponse

La protection juridique des majeurs est une politique publique transversale, à la croisée des problématiques d'autonomie, de santé, de protection des droits fondamentaux, d'inclusion sociale des personnes âgées et handicapées et de lutte contre les maltraitances. Ce dispositif de solidarité contribue efficacement à la lutte contre l'isolement social et à l'accompagnement des vulnérabilités. L'État consacrera en 2023, 801 M€ (somme inscrite en loi de finances pour 2023) à la protection juridique des majeurs, soit une hausse de + 9,3 % par rapport à 2022. Sur cette somme, plus de 108 M€ sont consacrés aux 2 301 mandataires individuels agréés sur le territoire national. Conformément au principe de subsidiarité du financement public, ce montant vient compléter la participation financière des personnes à leur mesure de protection. Les principes guidant la rémunération des mandataires judiciaires à la protection des majeurs (MJPM) sont fixés aux articles 419 et 420 du code civil. Le code de l'action sociale et des familles en précise les modalités, avec des différences entre les services mandataires et les mandataires individuels. Lorsque la mesure judiciaire de protection est exercée par un mandataire judiciaire à la protection des majeurs, son financement est à la charge totale ou partielle de la personne protégée, en fonction de ses ressources, avec de manière subsidiaire un financement de l'Etat. Si les services mandataires sont financés sous la forme de dotation globale de financement, les mandataires individuels sont, quant à eux, tarifés à la mesure, la participation des personnes protégées intervenant pour eux en complément de rémunération. Ainsi, la part de la participation dans la rémunération des mandataires individuels atteint 40 %, contre 15 % dans le budget des services. Ces différences se justifient par des modalités d'organisation et de fonctionnement différentes qui entraînent des charges (personnel, fonctionnement et structure) importantes pour les services. Par ailleurs, pour tenir compte des différences en termes de charge de travail, les tarifs perçus par les mandataires individuels varient en fonction de la nature de la mesure, du lieu de vie et du niveau de ressources de la personne protégée. Des travaux sont en cours concernant le financement du secteur de la protection juridique des majeurs. Les fédérations représentant les MJPM individuels et les services MJPM y sont étroitement associées, afin que soient pleinement prises en compte les problématiques qu'elles exposent.