Revalorisation des personnels exerçant dans les SSIAD
Question de :
Mme Mathilde Hignet
Ille-et-Vilaine (4e circonscription) - La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale
Mme Mathilde Hignet attire l'attention de M. le ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention sur la revalorisation des personnels exerçant dans les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD). En décembre 2023, Mme la députée a eu l'occasion de remettre à Mme la ministre Firmin Le Bodo les cartes de vœux des aides-soignantes du SSIAD de Guichen, sur sa circonscription. Leur principal souhait : bénéficier de la prime Grand âge, de la prime Ségur et une revalorisation immédiate du point d'indice. Les interventions des SSIAD sont prises en charge par l'assurance maladie et se font sur prescription médicale. Elles permettent de prévenir la perte d'autonomie et, de manière générale, le maintien à domicile des personnes aidées. Les personnels exerçant en SSIAD sont principalement des femmes, aides-soignantes. Bien que diplômés d'État, les aides-soignantes à domicile ne perçoivent pas la prime Ségur. Et l'évolution des rémunérations ne compense pas le niveau d'inflation. Les salaires sont tellement bas que de nombreuses aides-soignantes sont à temps partiel et travaillent à l'usine pour compenser le manque de salaires. Les professionnels se sentent complètement délaissés et les directions dans l'impossibilité de gérer correctement leurs services. Le glissement des tâches entre l'aide et le soin épuise chaque jour un peu plus les professionnels et réduit leur reconnaissance. Le manque d'attractivité de la profession met les établissements en très grande difficulté. Concernant spécifiquement le SSIAD de Guichen, il a normalement la possibilité de prendre en charge 65 personnes, avec un effectif de 21 équivalents temps plein (ETP). Depuis plusieurs mois, sans candidat et à la suite de plusieurs départs, le SSIAD ne dispose que d'une quinzaine d'ETP et ne prend en charge que 42 personnes. Faute de personnel, les projets sont à l'arrêt, les assistantes de soin en gérontologie (ASG) ne peuvent plus accompagner les patients atteints d'Alzheimer et la liste d'attente s'allonge. Autre SSIAD sur la circonscription de Mme la députée : celui de Plélan Maure de Bretagne. Ici, 43 personnes sur la liste d'attente faute de moyens pour les prendre en charge. Des moyens considérables sont nécessaires pour permettre aux SSIAD de fonctionner correctement. On promet depuis des années un virage domiciliaire. Mais aujourd'hui, on va droit dans le mur. On doit prendre une autre voie. Celle de la revalorisation salariale immédiate des professionnels. Celle de l'augmentation du nombre de places accordées par les ARS aux SSIAD. Cette voie, c'est celle de la réponse aux besoins du terrain. Les constats sont connus de tous, il faut désormais agir. Elle lui demande donc s'il compte prendre urgemment les mesures pour revaloriser le travail des soignants au sein des SSIAD.
Réponse en séance, et publiée le 13 mars 2024
SOINS INFIRMIERS À DOMICILE
Mme la présidente. La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour exposer sa question, n° 644, relative aux soins infirmiers à domicile.
Mme Mathilde Hignet. En décembre, j’ai eu l’occasion de remettre, à l'ancienne ministre de la santé, Mme Firmin-Le Bodo, les vœux formulés pour l'année 2024 par les aides-soignantes du service de soins infirmiers à domicile (Ssiad) de Guichen, dans ma circonscription, à savoir l'extension à leur profession du bénéfice de la prime « grand âge » et de la prime « Ségur », et une revalorisation du point d’indice.
Les Ssiad permettent de prévenir la perte d'autonomie et, de manière générale, de maintenir à domicile les personnes aidées. Leur rôle est indispensable pour épauler les aidants. Hélas, en raison du manque d'attractivité de la profession, ces établissements sont en très grande difficulté. Leurs personnels sont principalement des femmes, aides-soignantes. Or, bien que diplômées d'État au même titre que leurs collègues exerçant dans la fonction publique hospitalière, elles ne perçoivent pas la prime « Ségur ».
Comme c'est le cas dans de nombreux métiers, l'évolution des rémunérations ne compense pas l'inflation. Les salaires sont si bas que de nombreuses aides-soignantes sont à temps partiel et travaillent en intérim pour compenser. Les professionnels se sentent complètement délaissés et les directions sont dans l'impossibilité de gérer correctement leurs services.
Ainsi, le Ssiad de Guichen a normalement la possibilité de prendre en charge 65 personnes, avec un effectif de 21 équivalents temps plein (ETP). Or, depuis plusieurs mois, faute de candidats à la suite de plusieurs départs, il ne dispose que d'une quinzaine d'ETP, de sorte qu'il ne prend en charge que 42 personnes.
Le manque de moyens dont pâtit le soin à domicile est en totale contradiction avec le souhait émis par la majorité des Français de vieillir à domicile. Mme Khattabi elle-même a défendu le maintien à domicile des personnes âgées lors de son déplacement à Dijon, il y a quelques semaines.
D’ici à 2050, en France, 4,5 millions de personnes auront besoin d’un accompagnement. Les métiers du lien et du soin sont donc indispensables. Des moyens considérables sont nécessaires pour aider les structures à travailler dans les meilleures conditions. Quelles mesures concrètes allez-vous prendre dans l’urgence pour assurer la revalorisation salariale des soignants qui travaillent au sein des Ssiad et pour améliorer l’attractivité de ces métiers ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles.
Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles. Les services de soins infirmiers à domicile sont un des maillons essentiels du maintien à domicile – domaine dans lequel les besoins sont de plus en plus importants, compte tenu de l'évolution de la société. Ces services jouent en effet un rôle de coordination auprès des différents professionnels de santé qui participent à l'accompagnement des personnes en perte d'autonomie. Le Gouvernement a pris des engagements forts pour valoriser et reconnaître leur engagement.
Les Ssiad peuvent avoir différents statuts : publics ou privés à but non lucratif. La seconde catégorie relève de la branche de l'aide à domicile. C'est le cas des Ssiad que vous avez évoqués, qui ont bénéficié, à ce titre, de l'agrément par l'État de l'avenant 43 de la convention collective nationale du secteur, avenant qui a permis une revalorisation de 15 % de la rémunération de leurs professionnels, équivalente en moyenne à la prime « Ségur ». L'impact cumulé des avenants 51, 52 et 54 de la convention collective, agréés par l'État, représente par ailleurs, en 2023, une augmentation de 4,9 % en valeur du point et en année pleine par rapport à 2021.
Quant au Ssiad de Guichen, des moyens lui ont été attribués dès 2021 par l'agence régionale de santé (ARS) pour mettre en œuvre ces revalorisations de manière pérenne. Par ailleurs, la réforme du financement des Ssiad doit permettre de faire évoluer la tarification pour tenir compte des soins réalisés et du niveau de la perte d'autonomie, qui est de plus en plus courante en raison du vieillissement de la population.
Davantage de moyens seront attribués au niveau national : 229 millions d'euros supplémentaires sont prévus pour les années 2023 à 2027, dont 45 millions en 2023, soit 2,1 millions pour la région Bretagne.
Enfin, comme vous l'avez rappelé, l'enjeu de l'attractivité des métiers du soin – en particulier à domicile – ne se résume pas aux seules revalorisations financières. Il s'agit aussi de reconnaissance et de recrutement. C'est l'objectif de la réforme des services d'aide et de soins à domicile engagée depuis l'adoption du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.
Mme la présidente. La parole est à Mme Mathilde Hignet.
Mme Mathilde Hignet. Ayant reçu plusieurs cartes, je me permets d'en lire une autre, que je remettrai au ministre chargé de la santé : « Madame la ministre, monsieur le ministre, nous venons de fêter la Saint-Valentin, fête de l'amour. Amour égale passion, passion égale bienveillance. Nous pratiquons la bienveillance chaque jour, dans nos pratiques professionnelles et dans la passion de notre métier. Mais qui se passionne pour nous, notre cause, nos difficultés ? Longue liste de doléances anciennes et récurrentes qui se densifie, à mesure du temps passé à ignorer la situation des soignants et de leurs patients. Quelle bienveillance êtes-vous prêts à nous accorder ? »
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée. La lecture de votre carte est émouvante. J'ai apporté une réponse technique, mais il faut d'abord rappeler combien la présence des aides-soignantes sur notre territoire est essentielle, tout comme l'ensemble des métiers du lien, qui connaissent aujourd'hui une crise dramatique. Nous avons évoqué tout à l'heure l'aide sociale à l'enfance, mais c'est aussi le cas dans le monde de l'animation et chez les auxiliaires de vie auprès des personnes âgées. Un sursaut est nécessaire.
Auteur : Mme Mathilde Hignet
Type de question : Question orale
Rubrique : Professions de santé
Ministère interrogé : Santé et prévention
Ministère répondant : Santé et prévention
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 mars 2024