Question orale n° 64 :
Salinité des sols en Camargue gardoise

16e Législature

Question de : M. Nicolas Meizonnet
Gard (2e circonscription) - Rassemblement National

M. Nicolas Meizonnet appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la question de la salinité des sols dans le département du Gard, notamment en petite Camargue. Les agriculteurs lancent depuis plusieurs années un cri d'alerte face à une situation devenue dramatique : la hausse des taux de sel provoque la perte d'une grande partie des récoltes et rend la culture de plus en plus compliquée dans ce territoire si particulier. Les producteurs des vins Sable de Camargue, une indication géographique protégée (IGP), sont les premiers touchés. Ils constatent que la salinité excessive des sols a provoqué la perte d'une grande partie de leur récolte. En 2021, près de 600 hectares sur 3 000 ont été atteints. En 2022, c'est près de 40 % des vignes qui pourraient être perdues. Le delta du Rhône est un territoire unique où les activités humaines cohabitent avec la nature depuis des siècles. L'écosystème camarguais est aussi fragile que précieux. Si l'activité viticole venait à disparaître, ce serait une catastrophe à la fois économique et écologique pour le département du Gard dont M. le député est l'un des représentants. La hausse des taux de salinité des sols est notamment une conséquence du réchauffement climatique qui provoque des sécheresses de plus en plus intenses, à l'image de celles que l'on a connues l'été 2022. Dans les solutions à court terme, le Syndicat mixte de la Camargue gardoise (SMCG) associé avec Voies navigables de France (VMF) prévoit d'utiliser les systèmes d'écluses pour augmenter les quantités d'eau douce. En parallèle, les viticulteurs doivent toucher des aides pour parvenir à surmonter ces difficultés. Il lui demande quels sont les investissements prévus sur le long terme en Camargue pour lutter contre la salinité excessive des sols et sauver l'agriculture locale.

Réponse en séance, et publiée le 7 décembre 2022

SALINITÉ DES SOLS EN CAMARGUE GARDOISE
Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Meizonnet, pour exposer sa question, n°  64, relative à la salinité des sols en Camargue gardoise.

M. Nicolas Meizonnet. Ma question s'adresse à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires mais elle concerne aussi M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Dans le sud de la France, la rencontre entre le Rhône et la Méditerranée a donné naissance à un espace unique. Autrefois inhospitalier et sauvage, ce territoire a été adopté et façonné par des hommes qui l'ont mis en valeur et l'ont fait rayonner. Ce territoire si particulier où je suis élu, où cohabitent si bien élevage, biodiversité exceptionnelle, agriculture et désormais tourisme, c'est la Camargue. Or je souhaite évoquer la salinisation de ses sols, ou plutôt, puisqu'il y a toujours eu du sel en Camargue, l'augmentation du taux de salinité, qui n'est pas sans conséquences pour la biodiversité mais aussi pour les cultivateurs – plus particulièrement pour les viticulteurs.

Les producteurs des vins bénéficiant de l'indication géographique protégée (IGP) « Sable de Camargue » sont les premiers touchés et lancent depuis plusieurs années un cri d'alerte face à une situation devenue dramatique. Pour m'être moi-même rendu sur place à plusieurs reprises, je puis vous dire que le constat est sans appel : la trop forte concentration de sel détruit à la fois une grande partie de leur récolte mais aussi la vigne elle-même. L'année dernière, ce sont près de 600 hectares sur 3 000 qui ont été atteints. En 2022, la catastrophe s'est accentuée : 40 % des vignes anéanties, asséchées par un sol devenu inhospitalier et aride.

Comme je le disais, le delta du Rhône est un territoire unique, où les activités humaines cohabitent avec la nature depuis des siècles. L'écosystème camarguais est aussi fragile que précieux. Si l'activité viticole venait à disparaître, ce serait une catastrophe à la fois économique et écologique.

Parmi les solutions à court terme, le syndicat mixte de la Camargue gardoise (SMCG), associé à Voies navigables de France (VNF), prévoit d'utiliser les systèmes d'écluses pour augmenter les quantités d'eau douce. En parallèle, les viticulteurs doivent toucher des aides pour parvenir à surmonter ces difficultés. Ces mesures d'urgence sont les bienvenues. Cependant, la Camargue a besoin d'une politique durable. D'autres réflexions sont en cours sur l'augmentation des surfaces rizicoles à proximité, qui aurait le mérite de relancer la filière du riz de Camargue et de permettre cet équilibre entre eau douce et eau salée.

À long terme, c'est la modernisation du réseau hydrologique du périmètre qu'il faut envisager, avec le refus de considérer l'eau pompée dans le Rhône comme eau d'irrigation payante mais comme eau d'assainissement gratuite pour les agriculteurs – j'insiste sur ce point.

Aussi, madame la secrétaire d'État, bien conscient que nous aurons à reparler de ce dossier, je vous demande, à ce stade, ce que prévoit de faire l'État pour lutter contre ce phénomène et sauver l'agriculture camarguaise.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l’écologie.

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l’écologie. La situation des vignobles de Camargue est suivie de très près par l'État. Vous l'avez dit, la situation est alarmante, les conséquences du changement climatique sont là. Près de 600 hectares de vin des Sables sont déjà brûlés par le sel. Dès 2021, la préfète et le directeur des territoires et de la mer ont rassemblé les acteurs du monde agricole et des acteurs du secteur de l'eau afin de comprendre le phénomène et trouver les moyens d'action pour lutter contre la hausse de la salinisation des sols, l'atténuer, s'y adapter.

Plusieurs réponses d'urgence ont été apportées et donnent leurs premiers résultats : la mise en œuvre, par VNF, d'éclusages à vide dès le mois de mars, afin d'injecter de l'eau douce du Rhône dans le canal, a fait l'objet d'un suivi de mesures de salinité qui ont permis de constater que le taux de salinité du canal baissait lors de ces entrées d'eau douce; les secteurs pouvant être raccordés à un réseau d'irrigation, soit hors saison soit en été, ont été identifiés ; un tarif « canal », significativement inférieur au taux d'irrigation, a été instauré par le biais de l'agence de l'eau, de manière à permettre aux associations syndicales autorisées (ASA) de prélever de l'eau pour ressuyer les sols ; un état des lieux du réseau hydraulique agricole a été réalisé par la chambre d'agriculture du Gard ; enfin, la Mutualité sociale agricole a procédé à un accompagnement ciblé.

Ces actions témoignent de l'engagement de l'État et des acteurs locaux pour intervenir dans l’urgence. Au-delà, des solutions à moyen et long termes sont en cours d'examen. Tous les acteurs locaux sont mobilisés en ce sens et approfondissent certaines pistes comme l'extension du réseau hydraulique, la réalisation d'études et de travaux d'investissement ou encore l'octroi d'un soutien financier. Par ailleurs, parce que nous sommes attentifs à l'avenir de ce territoire attachant mais très sensible au changement climatique, une mission confiée en mai dernier à l'Inspection générale de l’environnement et du développement durable (Igedd) et au Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) doit permettre d'identifier les perspectives et de proposer des solutions d'adaptation. Les inspections me remettront leur travail dans quelques mois.

Monsieur le député, les agriculteurs et élus gardois peuvent compter sur la mobilisation des services de l'État dans le département, sous la houlette de la préfète, pour créer les conditions d'un accompagnement d'urgence et de résilience face au changement climatique.

Données clés

Auteur : M. Nicolas Meizonnet

Type de question : Question orale

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires

Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 novembre 2022

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