EPCI - fonds de concours obligatoires
Question de :
Mme Christelle D'Intorni
Alpes-Maritimes (5e circonscription) - Les Républicains
Mme Christelle D'Intorni appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la législation relative aux fonds de concours entre un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) et ses communes membres, prévus à l'article L. 5124-16 du code général des collectivités territoriales. Plus particulièrement, Mme la députée s'interroge sur la légalité des fonds de concours versés par les communes membres à leur EPCI à fiscalité propre. Elle rappelle qu'en application des principes de spécialité (territoriale et fonctionnelle) et d'exclusivité (une compétence ne peut être détenue que par une seule personne) qui régissent l'intercommunalité, le transfert d'une compétence à un EPCI entraîne le dessaisissement des communes membres dans le champ des compétences transférées. Ces principes impliquent par conséquent que le budget des communes membres ne puisse prendre à sa charge des dépenses afférentes au champ de compétences exercées par l'EPCI. Plusieurs dérogations à ces principes ont été introduites successivement par la loi (loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de l'État ; loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale ; loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité ; loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ; loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales) permettant aux EPCI à fiscalité propre d'aider l'une de leurs communes membres à assumer une charge, souvent des charges de centralité, qui n'ont pas été mutualisées au niveau communautaire ou qui, sans être communautaire, intéresse plusieurs communes membres, justifiant une intervention de l'EPCI. Cette solidarité, cette aide apportée par les EPCI à fiscalité propre à leurs communes membres, se réalise par le truchement de mécanismes appelés fonds de concours. Les EPCI, à l'aide de fonds de concours, peuvent ainsi aider les communes membres. Mme la députée constate que le mécanisme des fonds de concours est dévoyé par certains EPCI à fiscalité propre, qui en renversent l'application. En effet, certains EPCI à fiscalité propre, à l'instar de la Métropole Nice Côte d'Azur dans les Alpes-Maritimes, imposent désormais des fonds de concours à leurs communes membres afin de les obliger à cofinancer des travaux qui sont pourtant de compétence exclusivement métropolitaine. L'EPCI impose donc des délibérations concordantes de la commune et de l'EPCI actant la participation financière des communes au titre des fonds de concours à hauteur de 50 % du projet global. Faute pour les communes d'accepter ces fonds de concours, l'EPCI à fiscalité propre se désengage purement et simplement, bien qu'il s'agisse de ses compétences propres et exclusives. Mme le député s'interroge sur la légalité de telles pratiques, qui sont devenues la norme pour certains EPCI à fiscalité propre. C'est ainsi le cas pour la Métropole NCA depuis le débat d'orientation budgétaire 2023, tous les travaux de compétence métropolitaine induiront une participation financière de la commune à hauteur de 50 % du prix total. Or Mme la députée rappelle que le législateur n'a pas prévu qu'une commune puisse verser une participation à un EPCI à fiscalité propre dont elle est membre pour une compétence qu'elle lui a transférée. Mme la députée précise que dès lors qu'un transfert de compétences préalable a été réalisé, il est juridiquement impossible d'admettre la participation concomitante d'un EPCI et d'une de ses communes membres à un même projet compte tenu du fait que l'EPCI a reçu à la fois la compétence mais aussi les financements liés à la réalisation de ce projet. Or cette pratique malheureusement répandue est de nature à bouleverser l'aménagement des territoires par la création de « zones blanches d'aménagement du territoire ». En effet, accepter que les communes puissent participer financièrement au financement de compétences propres à l'EPCI revient inéluctablement à priver ces petites communes, au budget annuel de fonctionnement limité, de la possibilité de réaliser effectivement ces travaux, faute d'avoir les moyens de financer ces fonds de concours impératif. Mme la députée a été confrontée à cette difficulté alors qu'elle administrait la commune de Rimplas, petit village rural au budget annuel de fonctionnement de 220 000 euros. La Métropole NCA, EPCI à fiscalité propre, a souhaité lui imposer un fonds de concours de 30 % sur des travaux de rénovation des rues et des réseaux d'assainissement, compétence exclusive de la MNCA, évalués à 340 000 euros. Soit une participation de 100 000 euros imposée à la commune de Rimplas. Or cette somme représentait 45 % de son budget de fonctionnement. La commune n'a pas pu assumer cette charge au demeurant non subventionnable par les autres collectivités (région, département) car ayant trait à des compétences exclusives de l'EPCI. Les travaux n'ont donc jamais été réalisés. Bon nombre de communes rurales dépourvues de budget sont contraintes de renoncer à aménager leur territoire car elles ne peuvent pas assumer la charge des fonds de concours imposés par les EPCI à fiscalité propre. De telles pratiques créent une rupture d'égalité entre les petites communes rurales et les grandes villes. En conséquence, elle lui demande d'une part de confirmer que les fonds de concours entre les communes et l'EPCI à fiscalité propres pour tout ce qui a trait aux compétences préalablement transférées à l'EPCI est illégal, et d'autre part s'il entend limiter de manière restrictive les fonds de concours à une aide financière apportée par les EPCI à fiscalité propre à l'une de leurs communes membres.
Auteur : Mme Christelle D'Intorni
Type de question : Question écrite
Rubrique : Intercommunalité
Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère répondant : Collectivités territoriales et ruralité
Date :
Question publiée le 21 mars 2023
Date de cloture :
11 juin 2024
Fin de mandat