Question orale n° 659 :
S'attaquer aux contaminations ostréicoles

16e Législature

Question de : Mme Sandrine Le Feur
Finistère (4e circonscription) - Renaissance

Mme Sandrine Le Feur appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la problématique récurrente du norovirus des huîtres. Qu'on se replonge dans l'atmosphère des fêtes de fin d'année. Ce n'est pas si loin. Pour le plus grand nombre, cette période représente l'occasion de se retrouver en famille, dans la convivialité, et aussi de se faire plaisir autour des bons produits régionaux. En Bretagne, cela rime avec crustacés et fruits de mer et les huîtres trônent en majesté sur les tables de réveillon. Généralement, car dans une bien moindre mesure cette année ! C'est devenu une amère fatalité : chaque hiver, en pleine saison ostréicole, la filière doit faire face à des fermetures de zones de production pour cause de pollution des huîtres par des norovirus. Déjà, lors des fêtes de fin d'année 2019-2020, la crise, d'une particulière ampleur, avait occasionné la fermeture de 34 zones conchylicoles. Après une période plus épargnée grâce aux gestes barrières imposés par la crise sanitaire, un nouvel épisode de pollution, au cours de l'hiver dernier, avait conduit les préfets à ordonner la fermeture de 19 zones. Depuis la mi-décembre 2023, la filière est à nouveau durement victime de cette pollution à la période à laquelle les entreprises réalisent 60 % de leur chiffre d'affaires annuel. Ainsi, à quatre jours du réveillon du nouvel an, la préfecture de Gironde a temporairement interdit à la vente les huîtres du bassin d'Arcachon, décision motivée par plusieurs cas de toxi-infections alimentaires collectives. Par la suite, le bassin de Bretagne nord a été directement touché en Ille-et-Vilaine. C'est plus de 20 zones qui ont été fermées. Malgré un secteur restreint et la possibilité pour les entreprises touchées de pouvoir continuer de commercialiser les huîtres de Cancale et de la baie du Mont-Saint-Michel, le marché s'est tout de même arrêté net. Le Gouvernement a annoncé un soutien financier et fiscal pour les ostréiculteurs. Les précisions de M. le ministre seraient les bienvenues concernant ces aides qu'il souhaite activer. Mme la députée attire particulièrement l'attention de M. le ministre sur la nécessité d'accompagner les dispositifs de mise en sécurité des productions conchylicoles via des bassins à circuit fermé. Il s'agirait de pouvoir poursuivre le soutien à ces dispositifs engagé dans le cadre du plan de relance. Néanmoins, les répercussions resteront désastreuses pour la sécurité économique des entreprises, le plus souvent familiales et de taille modeste, car ces épisodes alimentent durablement une défiance du consommateur pour les coquillages et une érosion des ventes. Cette logique d'aide, d'indemnisation, n'est pas une solution. Il faut s'attaquer à la racine du problème. Car il est identifié. Les sources de contamination sont connues : le sous-dimensionnement des stations d'épuration, la vétusté des réseaux, la réalité des assainissement individuels. Les ostréiculteurs ont le malheur d'être le meilleur indicateur de la qualité des eaux. Cette situation sanitaire n'est pas digne d'un pays tel que la France. Le petit cycle de l'eau est bel et bien en voie de dégradation. Les obligations requises par le droit européen ne sont pas encore remplies. Il faut en faire, avec les collectivités locales, une priorité. Elle souhaite connaître sa position sur le sujet.

Réponse en séance, et publiée le 13 mars 2024

LUTTE CONTRE LES CONTAMINATIONS OSTRÉICOLES
Mme la présidente. La parole est à Mme Sandrine Le Feur, pour exposer sa question, n°  659, relative à la lutte contre les contaminations ostréicoles.

Mme Sandrine Le Feur. Replongeons-nous dans l'atmosphère des fêtes de fin d'année – ce n'est pas si loin. En Bretagne, elles riment avec fruits de mer, et les huîtres trônent généralement en majesté sur les tables de réveillon. Cette année, pourtant, ce fût moins le cas.

Comme chaque année, pendant cette période où les entreprises réalisent 60 % de leur chiffre d'affaires annuel, la filière a dû faire face à des fermetures de zones de production pour cause de pollution par des norovirus. Dans le bassin de Bretagne Nord, ce sont vingt zones qui ont été fermées ; le marché s'est arrêté net.

Le Gouvernement a annoncé un soutien financier et fiscal pour les ostréiculteurs, mais des précisions seraient bienvenues. En outre, il conviendrait de compléter ce dispositif par la mise en sécurité des productions conchylicoles grâce à des bassins à circuit fermé. Enfin, la poursuite du soutien pourrait passer par le plan de relance.

Mais cette logique d'aide et d'indemnisation n'est pas la solution et le problème est identifié : le sous-dimensionnement des stations d'épuration, la vétusté des réseaux, les systèmes d'assainissement individuel, la dégradation du petit cycle de l'eau, le non-respect des obligations prévues par le droit européen sont en cause. Cette situation sanitaire – quel meilleur indicateur d'une bonne qualité des eaux que les exploitations ostréicoles ? – n'est pas digne d'un pays tel que la France. Il faut s'y attaquer en priorité ! Quelle est la position du Gouvernement ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté.

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté. Je vous transmets la réponse de M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, et de M. Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité.

Face aux difficultés auxquelles est confrontée la filière conchylicole suite aux fermetures sanitaires, le Gouvernement est pleinement mobilisé – vous le savez.

La France défend au niveau européen le versement d'une aide exceptionnelle aux entreprises des zones conchylicoles fermées, visant à compenser les pertes recensées. Les mesures économiques nationales incluent le financement d’une campagne de communication pour relancer la consommation, l’exonération de redevances domaniales, ainsi que l'échelonnement des dettes fiscales et sociales, dans le but de soulager immédiatement les entreprises affectées.

Au niveau structurel, le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l'aquaculture (Feampa) finance les investissements nécessaires à la résilience et au développement de la filière. Des bassins de stockage peuvent ainsi être subventionnés, pour que les professionnels puissent sécuriser leur production. Afin de remettre plus rapidement les coquillages sur le marché, des projets innovants sont à l’étude, comme un dispositif de purification accélérée des coquillages. Ils ont montré de premiers résultats prometteurs et pourront être financés par le Feampa.

En parallèle, afin d'identifier les raisons des pollutions, les profils de vulnérabilité des eaux conchylicoles recensent, quantifient et hiérarchisent les différentes sources de pollution microbiologique susceptibles d’affecter les zones conchylicoles. Ils permettent de mieux gérer et de réduire le risque sanitaire. L’élaboration de ces profils peut également être financée par le Feampa.

Lorsque l'assainissement est en cause, la collectivité est compétente et c'est à elle de se conformer aux exigences de traitement et de collecte. MM. Béchu et Berville ont demandé aux préfets un état des lieux très précis des systèmes de traitement des eaux sur chaque façade afin d'évaluer ce qui a pu être mis en place et ce qu'il reste à faire. Les préfets ont également été invités à exercer pleinement leurs pouvoirs de police de l'eau.

Enfin, les collectivités territoriales concernées seront prochainement réunies au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires afin de travailler collectivement à l'amélioration des réseaux de gestion d'eau et, ainsi, assurer aux conchyliculteurs la qualité de l'eau dont ils ont besoin pour travailler et nous nourrir.

Données clés

Auteur : Mme Sandrine Le Feur

Type de question : Question orale

Rubrique : Aquaculture et pêche professionnelle

Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires

Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 mars 2024

partager