Question orale n°661 : Suspension maternité d'Autun : une nouvelle organisation qui ne fonctionne pas

16ème Législature

Question de : M. Rémy Rebeyrotte (Bourgogne-Franche-Comté - Renaissance)

M. Rémy Rebeyrotte alerte M. le ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention, sur les dysfonctionnements des moyens mis en œuvre pour pallier la suspension de la maternité d'Autun et sur les échéances pour corriger cela. Cela révèle le dysfonctionnement du groupement hospitalier du territoire (GHT) Nord Saône-et-Loire et de l'Agence régionale de santé (ARS) Bourgogne-Franche-Comté. À Autun, la maternité n'a pas été suspendue faute de médecins. Pour être clair et objectif : la suspension de la maternité d'Autun a fait partir les médecins, car c'est bien la suspension, organisée par le GHT et l'ARS, qui a provoqué le départ des deux gynécologues en place et permis de ne pas remplacer un pédiatre. Concernant l'organisation des soins : quel est le bilan au bout d'un an ? Du côté de l'administration : du bricolage à tous les étages. Concernant le SMUR obstétrical : les agences régionales de santé (ARS) sont une nouvelle fois en cause. Il a fallu la loi « Matras », dont M. le député a été un des responsables politiques pour la majorité, pour faire en sorte de remettre les ambulanciers privés face à leurs obligations, surtout les week-end. Depuis des années, ils trouvaient commode que les pompiers travaillent à leur place pour transporter des personnes vers le soin, hors situation d'urgence, notamment des personnes âgées. C'était la question des carences. Les ARS avaient été incapables de mettre de l'ordre... comme d'habitude. À Autun, la loi « Matras » a permis de baisser de 20 % les interventions en 2023 et de les concentrer sur l'urgence. Elle permettra d'absorber les risques qui progressent liés aux changements climatiques : inondation, feux de forêts, etc. Il faut rappeler que la mission fondamentale des sapeurs-pompiers, c'est le traitement de l'urgence et qu'on leur doit beaucoup. Le problème est que l'ARS n'a rien trouvé de mieux que d'essayer de refiler le bébé et ses insuffisances... aux pompiers. À eux de se substituer aux personnels qualifiés non recrutés par l'hôpital pour conduire le SMUR obstétrical ou de pallier les heures non couvertes par celui-ci, quitte à découvrir tout un secteur du Morvan pour des interventions d'urgence des sapeurs-pompiers ! Il s'agit d'un nouveau scandale, contraire aux objectifs de la loi « Matras », qui ne prévoit pas de remplacer les carences des ambulanciers privés par celles de l'hôpital public, mais surtout créant de nouveaux risques pour la population. On ne doit pas laisser faire. Car, de fil en aiguille, de déports en déports, ce serait accepter la dégradation des urgences sur l'ensemble de notre bassin de vie. Concernant la question du nombre en hausse d'accouchements à domicile : on sent la gêne, à l'hôpital, à l'ARS et au ministère, quand on se demande si ce type d'organisation d'une extrême complexité, même s'il fonctionnait, n'encouragerait pas le retour des accouchements à domicile, comme avant-guerre, avec les risques encourus. Là, on vous répond qu'on se pose aussi la question et on se la pose au point de lancer une étude nationale sur le sujet. Un retour 80 ans en arrière est-il un vrai progrès ? Le coût : enfin, si l'on passe aux coûts de fonctionnement annuels liés à la suspension de la maternité d'Autun. Lorsqu'elle fonctionnait (remarquablement et au service de toutes les familles), le budget de la maternité était d'un peu plus de 2 millions d'euros. Or le coût de la nouvelle organisation, en année normale serait de 1,8 millions d'euros, en comptant les astreintes (non prévues au départ) des sapeurs-pompiers. Et M. le député ne parle pas de l'année de transition de 2023 qui aura coûté presque 3 millions d'euros. Là, on cauchemarde. Si l'on résume l'opération : des services désorganisés, des risques et des complexités à tous les niveaux, des personnels et des sapeurs-pompiers d'astreinte et mobilisés, le tout sans assurer un service 24/7,  pour le même coût qu'avant et des mamans qui se demandent si ça n'est pas finalement plus simple de rester chez soi pour accoucher. Il souhaite connaître sa position sur le sujet.

Réponse en séance, et publiée le 13 mars 2024

MATERNITÉ D'AUTUN
Mme la présidente. La parole est à M. Rémy Rebeyrotte, pour exposer sa question, n°  661, relative à la maternité d'Autun.

M. Rémy Rebeyrotte. Samedi, Midi Libre titrait : « Dans les territoires ruraux, la santé ne va pas bien ». Quand le Gouvernement reprendra-t-il la main sur l'organisation territoriale de l'offre de soins, alors que des territoires menacés de béance sanitaire sont au bord du précipice ?

Alors que la parturiente de Châtillon-sur-Chalaronne, dans les Dombes, peut accéder en trente minutes de voiture ou en sept minutes par hélicoptère sanitaire à trois maternités publiques, à Mâcon, à Bourg-en-Bresse et à Villefranche-sur-Saône, celle de Château-Chinon est à une heure et quarante-cinq minutes en voiture de la première maternité, du fait de la suspension de celle d'Autun.

Cette suspension n’est pas due au manque de médecins ou de praticiens, mais à l’application de la doctrine du directeur de l'agence régionale de santé – ARS –, dont je demande instamment le départ dès que possible.

Oui, vous devez reprendre la main pour reterritorialiser la politique de santé, revoir l'organisation des territoires de santé, évaluer les groupements hospitaliers de territoire – GHT –, recréer des directions intégrées sous la responsabilité des préfets. Quand tout cela verra-t-il le jour ? Nous sommes très inquiets car les fossés se creusent.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles. Je sais à quel point vous vous êtes battu pour la maternité d'Autun ; à l'époque, j'étais assise à vos côtés sur ces bancs. Cette discussion a été complexe et douloureuse pour Autun.

Le ministre de la santé m’a chargé de vous répondre que l'activité de la maternité d’Autun a été suspendue le 3 avril 2023. Cette suspension était nécessaire pour garantir la sécurité des patientes et de leurs bébés, malgré les nombreux efforts déployés par l'établissement pour trouver des professionnels de santé supplémentaires – bien que vous ayez indiqué que là n’était pas la question.

Face à cette situation, les équipes des centres hospitaliers de Chalon-sur-Saône, d'Autun, du Creusot, de Château-Chinon et de Nevers se sont donc mobilisées avec l'appui des professionnels de santé publics et libéraux, dont il convient de saluer l’engagement, et avec le soutien de l'ARS – mais je transmettrai votre demande à cet égard, compte tenu de la situation et de votre relation avec le directeur de l'ARS.

La maternité territoriale d’Autun s’est donc déployée, avec la création de deux centres périnataux de proximité au centre hospitalier d'Autun et à celui de Château-Chinon, le renforcement des maternités existantes sur le territoire ou encore la création de postes de sage-femme coordinatrice territoriale.

Cet engagement collectif s'est enfin concrétisé avec la création d'une fédération médicale interhospitalière regroupant les principaux établissements que j'ai cités. L'offre de soins s'étend bien au-delà, aux activités telles que la consultation avancée de spécialités pédiatriques, les consultations d'urgence gynéco-obstétricale, mais également le déploiement d'une structure mobile d’urgence et de réanimation – Smur – obstétrical, afin de sécuriser les situations obstétricales urgentes. Les professionnels de santé indépendants à qui le ministère de la santé a confié une mission d'expertise nationale visant à évaluer cette maternité territoriale ont salué la nouvelle organisation mise en place et rappelé qu'elle était indispensable pour les mamans et les bébés.

Enfin, la territorialisation des politiques de santé est l'une des priorités du ministre chargé de la santé et de la prévention, afin de faire des élus, des usagers et des professionnels les acteurs au quotidien de politiques de santé adaptées à leur bassin de vie – bien que tel ne fut pas vraiment le cas à Autun – pour élaborer, par la concertation et la coconstruction, des politiques de santé garantissant l'intérêt général sur le territoire. Il va de soi que je transmettrai votre message au ministre.

Mme la présidente. La parole est à M. Rémy Rebeyrotte.

M. Rémy Rebeyrotte. Je vous remercie de cette réponse qui ne résout pas le problème dans l'immédiat. D'abord, le Smur obstétrical, qui devait remplacer la maternité, ne fonctionne pas de manière autonome ; nous rencontrons de nombreuses difficultés.

Je vous informe également que l'hôpital d'Autun dispose enfin, après deux ans et demi d'attente, d'un directeur. J'aurais préféré un directeur présent pour construire la coopération plutôt qu'un directeur absent pour prononcer la suspension de l'activité de la maternité.

En clair, il faut reprendre la situation en main et, peut-être, rouvrir un service, sachant qu'une offre privée existe à proximité. En tout état de cause, les choses ne peuvent en rester là ; il faut changer de cadre en adoptant une autre approche.

Données clés

Auteur : M. Rémy Rebeyrotte (Bourgogne-Franche-Comté - Renaissance)

Type de question : Question orale

Rubrique : Établissements de santé

Ministère interrogé : Santé et prévention

Ministère répondant : Santé et prévention

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 mars 2024

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