Question orale n°662 : Suppression de 89 postes d'enseignants dans le Pas-de-Calais

16ème Législature

Question de : M. Bertrand Petit (Hauts-de-France - Socialistes et apparentés)

M. Bertrand Petit attire l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la suppression annoncée de 89 postes d'enseignants à partir de la rentrée 2024 dans le département du Pas-de-Calais. Cette suppression serait la plus importante jamais actée dans le département. Alors que la population de nombreuses communes a été fortement marquée par les évènements climatiques de novembre 2023 et de janvier 2024, la suppression de ces postes est encore plus inacceptable. Il lui demande si elle prend l'engagement d'un moratoire pour geler les suppressions de postes dans le département du Pas-de-Calais.

Réponse en séance, et publiée le 13 mars 2024

ENSEIGNEMENT DANS LE PAS-DE-CALAIS
Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Petit, pour exposer sa question, n°  662, relative à l'enseignement dans le Pas-de-Calais.

M. Bertrand Petit. Dans le Pas-de-Calais, la carte scolaire pour la prochaine rentrée inclut la suppression de quatre-vingt-neuf postes d'enseignant. La liste des communes concernées est longue, notamment dans ma circonscription.

Vous l'imaginez, cette annonce, si elle devait être confirmée, ne passera pas, ni pour les élus, ni pour la population. Elle ne passera pas dans notre département, où les fragilités sociales sont nombreuses et profondément ancrées ; elle passera encore moins dans ma circonscription où, comme vous le savez, de nombreuses communes viennent de subir des événements climatiques exceptionnels, qui ont frappé des milliers de familles. Au lieu de panser les plaies, le ministère de l'éducation nationale prépare donc la suppression de quatre-vingt-neuf postes, ce qui représente un coup de canif pour notre école.

Prendre une telle décision, au nom d'une règle purement comptable, inhumaine et brutale, représente une double peine. C'est une double peine d'abord pour la population, qui se remet à peine des inondations et qui a besoin, plus qu'ailleurs, d'un signal fort de l'État, lequel doit, par l'intermédiaire des services publics, assurer sa présence, son soutien et l'égalité des chances pour tous. Et c'est une double peine pour les élus locaux qui, depuis tant d'années, consacrent le peu de ressources dont ils disposent à rendre les bâtiments scolaires aussi accueillants que possible – bâtiments que les inondations ont parfois dévastés.

Je me suis entretenu avec le directeur académique des services de l'éducation nationale (Dasen) du Pas-de-Calais pour lui demander de surseoir, compte tenu des circonstances, aux suppressions de postes dans les communes les plus fragiles et les plus touchées, notamment Auchel, Arques, Saint-Martin-lez-Tatinghem, Saint-Omer, Cauchy-à-la-Tour, ou encore les quatre petites communes rurales concernées par le regroupement pédagogique intercommunal no 126 de la Lacquette. Je le répète, c'est dans ce moment que la République doit plus que jamais affirmer sa présence.

Le Pas-de-Calais a besoin de son école : c'est pourquoi, madame la ministre, je vous demande à votre tour de surseoir à ces suppressions de postes eu égard aux circonstances.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles. J'étais hier à Arras aux côtés du Premier ministre et de la ministre de l'éducation nationale, pour l'hommage aux victimes du terrorisme. À la suite de cette cérémonie, le Premier ministre s'est personnellement déplacé pour suivre les conséquences des inondations dans un territoire déjà éreinté, épuisé par la succession des intempéries.

L'année scolaire 2024-2025 sera marquée par une forte diminution du nombre d'élèves du premier degré au niveau national. Cette baisse des effectifs sera de l'ordre de 55 000 élèves et fera suite à celle de 77 000 élèves que nous avons enregistrée à la rentrée 2023. Il s'agit d'une tendance démographique appelée à se poursuivre au cours des prochaines années.

Dans le premier degré, eu égard à cette baisse très importante du nombre d'élèves prévue pour la rentrée 2024, la suppression de 650 emplois ne nous empêchera pas de poursuivre l'amélioration du taux d'encadrement et d'atteindre un niveau inédit de 6 professeurs pour 100 élèves – contre 5,46 à la rentrée 2017. Dit autrement, l'enseignement primaire accueillait en moyenne plus de vingt-trois élèves par classe en 2017, contre environ vingt et un en 2023, chiffre qui devrait donc encore diminuer l'an prochain, pour atteindre son niveau historique le plus bas.

Cette évolution permettra de répondre aux priorités de l'école primaire, à savoir l'achèvement, à la rentrée 2024, du dédoublement des grandes sections de maternelle concernées par la politique d'éducation prioritaire ; la progression de la scolarisation en très petite section des enfants de 2 ans dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ; et l'accompagnement de l'école inclusive, avec la création de nouvelles unités localisées pour l'inclusion scolaire (Ulis) et d'unités d'enseignement pour enfants autistes.

S'agissant plus particulièrement du Pas-de-Calais, cœur de votre question, l'importante baisse démographique a entraîné, entre la rentrée 2017 et la rentrée 2023, une diminution de 16 583 élèves inscrits dans les écoles publiques. Le taux d'encadrement s'est donc nettement amélioré, le nombre d'élèves par classe s'étant établi à environ vingt en 2023, ce qui est nettement inférieur à la moyenne nationale. Quant au nombre de postes pour 100 élèves, il est passé, toujours dans le Pas-de-Calais, de 5,57 à la rentrée 2017 à 6,34 à la rentrée 2023, ce qui est bien supérieur à la moyenne de 6 dans l'ensemble du pays.

Conjuguée aux dotations d'emploi positives des années précédentes, la baisse démographique a d'ores et déjà permis, à la rentrée 2023, de dédoubler les classes de CP et de CE1 ainsi que 89 % des classes de grande section dans les établissements relevant de l'éducation prioritaire, et d'alléger les effectifs dans les autres écoles.

Au-delà de ces éléments techniques sur l'évolution de la démographie dans votre département, je m'engage à transmettre à la ministre de l'éducation nationale votre demande de surseoir aux suppressions de postes dans votre circonscription et de tenir compte de manière bienveillante de la situation des élèves, des familles et des enseignants, eu égard aux circonstances particulières auxquelles ils font face.

Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Petit, à qui il ne reste que peu de temps.

M. Bertrand Petit. Au-delà des chiffres, et même si je ne suis pas certain qu'amélioration de l'encadrement rime avec suppressions de postes, je vous remercie pour le regard bienveillant que vous aurez pour les communes que j'ai citées.

Données clés

Auteur : M. Bertrand Petit (Hauts-de-France - Socialistes et apparentés)

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Éducation et jeunesse

Ministère répondant : Éducation et jeunesse

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 mars 2024

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