16ème législature

Question N° 66
de M. Hervé Saulignac (Socialistes et apparentés (membre de l’intergroupe NUPES) - Ardèche )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transports
Ministère attributaire > Transports

Rubrique > transports ferroviaires

Titre > Soutien de l'État à SNCF Réseau et maintien des petites lignes ferroviaires

Question publiée au JO le : 29/11/2022
Réponse publiée au JO le : 07/12/2022 page : 6541

Texte de la question

M. Hervé Saulignac appelle l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, sur le soutien financier apporté par l'État à SNCF Réseau et son incidence sur le maintien des petites lignes ferroviaires. Le 6 avril 2022, en pleine campagne présidentielle, l'État a signé en catimini le contrat de performance qui le lie à SNCF Réseau pour la période 2021-2030 et ce malgré les importantes réserves formulées à la fois par le Sénat, par l'Autorité de régulation des transports ou encore par l'association régions de France. Celui-ci prévoit un apport financier de l'État de 2,84 milliards d'euros par an, ce qui ne devrait même pas suffire à entretenir correctement le réseau existant. En 2018, le Gouvernement, par la voix de son Premier ministre d'alors, Édouard Philippe, s'était pourtant engagé à ne pas décider « de la fermeture de 9 000 kms de lignes depuis Paris sur des critères administratifs et comptables ». Il semblerait que le Gouvernement ait opéré un choix stratégique inverse : les laisser mourir à petit feu. L'Ardèche est le seul département de France métropolitaine à ne plus disposer de gare ferroviaire. Depuis des années, les élus locaux y sont donc mobilisés pour obtenir la réouverture de lignes ferroviaires. Aussi, les Ardéchois portent un intérêt particulier à l'avenir des petites lignes, d'autant plus dans un contexte de changement climatique qui devrait logiquement pousser au développement de ces infrastructures. Mais, au-delà du seul enjeu écologique, c'est une question d'équité territoriale et de justice sociale que pose le développement du rail : celle du désenclavement des territoires ruraux, de l'attractivité économique de ces territoires et de l'accès de tous aux mobilités. Dans son avis du 8 février 2022, l'Autorité de régulation évaluait à 4 milliards d'euros le manque d'investissements pour la période 2021-2030 au regard de la trajectoire de renouvellement du réseau préconisée par le dernier audit en date, publié en mars 2018. Aussi, il souhaite savoir comment l'État entend compenser cette différence, sans en faire supporter le coût aux usagers et tout en maintenant la qualité du service. En outre, il demande au Gouvernement de garantir qu'en l'absence de financements suffisants, le renouvellement et la modernisation du réseau ne se feront pas au détriment des plus petites lignes.

Texte de la réponse

MAINTIEN DES PETITES LIGNES FERROVIAIRES


Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Saulignac, pour exposer sa question, n°  66, relative au maintien des petites lignes ferroviaires.

M. Hervé Saulignac. Madame la secrétaire d'État, le 6 avril dernier, en pleine campagne présidentielle, l'État a validé en catimini le contrat de performance avec SNCF Réseau pour la période 2021-2030. Ce contrat, signé en dépit d'importantes réserves émises par le Sénat, par l'Autorité de régulation des transports (ART) et par Régions de France, prévoit un concours financier de l'État à hauteur de 2,84 milliards par an, ce qui objectivement ne suffira pas entretenir correctement le réseau existant. Je me souviens pourtant de l'engagement pris ici même en 2018 par Édouard Philippe, qui avait affirmé : « On ne décide pas de la fermeture de 9 000 kilomètres de lignes depuis Paris sur des critères administratifs et comptables. » Il semblerait que l'État ait fait un choix quelque peu perfide en décidant finalement de les laisser mourir à petit feu. À cet égard, je rappelle que le Gouvernement s'était opposé à un amendement que je soutenais avec les collègues de mon groupe, qui visait à remonter le soutien de l'État à hauteur de 3 milliards d'euros pour l'année 2023.

Il se trouve que je suis l'élu d'un département présentant une caractéristique singulière, et même unique, puisque l'Ardèche est le seul département de France métropolitaine à ne pas disposer de transport ferré de voyageurs et dont toutes les gares sont fermées. C'est pour cette raison que de nombreux élus locaux se mobilisent depuis des années pour tenter d'obtenir la réouverture d'un sillon sur la rive droite du Rhône.

Comprenez, madame la secrétaire d'État, que l'on s'interroge dans le contexte budgétaire actuel. Dans un avis du 8 février dernier, l'autorité de régulation évaluait même à 4 milliards d'euros le manque d'investissements pour la période 2021-2030. Comment envisagez-vous de compenser cette différence, évidemment sans en faire supporter le coût aux usagers et en maintenant la qualité du service ? Comment pouvez-vous nous garantir que la modernisation du réseau ne se fera pas au détriment des plus petites lignes ? Et, pour être plus direct, peut-on encore ouvrir une ligne ferroviaire dans notre pays ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l’écologie.

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l’écologie. Monsieur le député, le contrat de performance 2021-2030 entre l'État et SNCF Réseau prévoit un niveau d'investissement historiquement haut sur le réseau ferroviaire, avec notamment un niveau de régénération proche de 2,9 milliards d'euros chaque année. Cependant, les investissements de renouvellement du réseau ferroviaire ne se font pas au détriment des plus petites lignes ferroviaires, qui sont un facteur de désenclavement de nombreux territoires. J'en veux pour preuve le fait que le Gouvernement a engagé en février 2020 avec les régions un plan de remise à niveau des petites lignes ferroviaires, visant à pérenniser les services publics de transport qu'elles assurent, notamment dans les zones rurales et périurbaines.

Un besoin d'investissement de plus de 7 milliards d'euros sur dix ans a été identifié sur les plus de 9 000 kilomètres concernés. Depuis 2020, huit protocoles d'accords régionaux ont d'ores et déjà été signés pour la prochaine décennie. Ces huit protocoles portent sur 6 300 kilomètres de lignes et plus de 5,7 milliards d'euros.

Les crédits affectés par l'État ces dernières années au travers des contrats de plan État-région (CPER) témoignent de l'attention particulière portée à ces lignes. Ainsi, l'État engagera plus de 200 millions d'euros sur les petites lignes en 2022 ; au total, il aura apporté plus de 550 millions d'euros sur la période 2020-2022, dont 300 millions d'euros issus du plan de relance. Cet effort représente un triplement des financements de l'État par rapport à la période précédente. S'agissant plus précisément de l'Ardèche, les négociations qui interviendront prochainement sur le volet mobilité 2023-2027 du CPER seront l'occasion d'examiner éventuellement l'inscription d'opérations avec la région Auvergne-Rhône-Alpes – qui, pour sa part, ne s'est cependant pas engagée dans un protocole.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Saulignac.

M. Hervé Saulignac. Un engagement financier historiquement haut, madame la secrétaire d'État, peut néanmoins être insuffisant, notamment lorsqu'il y a d'importants retards à rattraper du fait de la détérioration du réseau.

J'ai bien entendu votre réponse concernant l'éventuelle réouverture de la rive droite du Rhône au transport ferré de voyageurs et j'y vois peu de perspectives positives. Je rappellerai dans cette enceinte, avec beaucoup de force, que l'exigence des élus ardéchois et des habitants du département ne s'apparente pas à un caprice né d'une envie de confort superflu mais s'ancre dans le principe de l'égalité républicaine. L'Ardèche est privée depuis trop longtemps de lignes de transport ferré de voyageurs et l'impression qu'ont ses habitants d'être punis, à l'heure où la mobilité est un enjeu écologique, économique et social majeur, est assez insupportable. J'espère que l'État aura à cœur de peser de tout son poids, notamment dans les discussions avec la région, pour que cette ouverture se fasse dans les meilleurs délais.