16ème législature

Question N° 6798
de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback (Horizons et apparentés - Seine-Maritime )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur et outre-mer
Ministère attributaire > Intérieur et outre-mer

Rubrique > police

Titre > Qualification judiciaire des polices municipales

Question publiée au JO le : 28/03/2023 page : 2808
Réponse publiée au JO le : 31/10/2023 page : 9764

Texte de la question

Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur la qualification judiciaire des polices municipales Les polices municipales sont essentielles pour le bon fonctionnement des communes, œuvrant pour la sécurité de tous. Cependant, leur qualification judiciaire les freine dans leur action au quotidien. Par exemple, il leur est impossible de verbaliser via les caméras de surveillance de manière différée. De plus, ils doivent transmettre, à la police nationale, dans l'heure, le rapport dans le cadre d'une interpellation sinon la procédure devient caduque. Aussi, elle lui demande quelles mesures peuvent être prises afin de faciliter le travail des polices municipales.

Texte de la réponse

Les polices municipales sont essentielles pour le bon fonctionnement des communes, œuvrant en effet pour la sécurité de tous, et participent au continuum de sécurité. Leurs missions sont néanmoins contraintes par leur statut, dès lors qu'ils n'ont pas la qualité d'officiers ou d'agents de police judiciaire. Le régime de la vidéoprotection, défini par les articles L. 251-1 et suivants du Code de la sécurité intérieure, permet qu'ils aient accès aux images prises sur la voie publique pour la constatation des infractions aux règles de la circulation routières (4° de l'article L. 251-2 du Code de la sécurité routière) et pour la constatation des infractions relatives à l'abandon d'ordures, de déchets, de matériaux et autres objets (11° du même article), pour les seuls besoins de leurs missions (Conseil constitutionnel, DC n° 2021-817 du 20 mai 2021, considérant 80). En revanche, les policiers municipaux ne peuvent avoir accès aux images en différé pour constater des infractions que dans le cadre d'une procédure pénale. En effet, en application des articles 60-1 (enquête de flagrance), 77-1-1 (enquête préliminaire) et 99 du Code de procédure pénale (instruction), seuls les officiers ou agents de police judiciaire peuvent obtenir, par la voie de réquisition (ou sur commission rogatoire dans le cadre d'une instruction), les images issues de vidéoprotection. Toute extension des pouvoirs de police judiciaire des agents de police municipale est susceptible de se heurter à un obstacle constitutionnel. En effet, dans sa décision n° 211-625 DC du 10 mars 2011 relative à la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, le Conseil constitutionnel a considéré que la police judiciaire doit être placée sous la direction et le contrôle de l'autorité judiciaire et que l'exigence de direction et de contrôle de l'autorité judiciaire sur la police judiciaire ne serait pas respectée si des pouvoirs généraux d'enquête criminelle ou délictuelle étaient confiés à des agents qui, relevant des autorités communales, ne sont pas mis à la disposition des officiers de police judiciaire. Or, les agents de police municipale ne sont pas placés sous la direction du procureur de la République et le Conseil constitutionnel a récemment rappelé dans sa décision n° 2021-817 DC du 20 mai 2021 sur la loi pour une sécurité globale préservant les libertés que dans ces conditions, ils ne peuvent exercer d'attribution de police judiciaire que sous la responsabilité d'un officier de police judiciaire : « en confiant des pouvoirs aussi étendus aux agents de police municipale et gardes champêtres, sans les mettre à disposition d'officiers de police judiciaire ou de personnes présentant des garanties équivalentes, le législateur a méconnu l'article 66 de la Constitution ». S'agissant de l'obligation de transmission du rapport d'interpellation à la police ou la gendarmerie nationales, elle répond à ces exigences constitutionnelles. Il s'agit également d'une obligation prévue par le quatrième alinéa de l'article 21 du Code de procédure pénale. Il n'est donc pas possible d'étendre les compétences de police judiciaire des agents de police municipale sans les placer sous l'autorité du procureur de la République.