16ème législature

Question N° 696
de M. Yoann Gillet (Rassemblement National - Gard )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Industrie et énergie
Ministère attributaire > Industrie et énergie

Rubrique > environnement

Titre > Projet de ligne THT de Jonquière-St-Vincent à Fos en passant par Beaucaire

Question publiée au JO le : 19/03/2024
Réponse publiée au JO le : 27/03/2024 page : 2331

Texte de la question

M. Yoann Gillet interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie, au sujet du projet de nouvelle ligne aérienne à très haute tension (400 000 volts) devant relier Jonquières-Saint-Vincent et Fos-sur-Mer et visant à alimenter la zone industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer. À ce sujet, une prétendue concertation publique a été engagée depuis le 12 février 2024 par RTE sur le choix du tracé de ladite ligne (8 tracés seraient envisagés). M. le député signale à M. le ministre que l'aire d'étude qui s'étend du plateau des Costières à la plaine de la Crau en passant par la Vallée du Rhône et la Camargue comprend, entre autres, des sites patrimoniaux remarquables (SPR), des monuments historiques, des parcs régionaux ainsi que des zones naturelles d'intérêt écologique faunistique et floristique. Ainsi, l'installation des pylônes et les travaux en découlant auraient de lourdes conséquences et pour effet de défigurer les paysages magnifiques qu'ils traverseraient. Un tel projet aurait un impact important et irrémédiable sur les activités, notamment agricoles et viticoles, impactant en partie les terres de l'AOC Costières de Nîmes. La concrétisation de ce projet reviendrait à sacrifier l'agriculture, la viticulture, le tourisme ainsi que le patrimoine présent. M. le député souhaite attirer l'attention de M. le ministre sur le fait qu'il a, avec le maire de Beaucaire, commune de sa circonscription, sensibilisé à de multiples reprises le Gouvernement sur cette question. À titre d'exemple, sur proposition du maire de Beaucaire, le conseil municipal a voté le 22 décembre 2023 à l'unanimité un vœu pour s'opposer au projet. Par suite, la communauté de communes a elle aussi délibéré en ce sens. De même une pétition lancée par la mairie de Beaucaire a déjà reçu plus de 1 500 signatures en quelques jours, démontrant, s'il le fallait, le rejet total de ce projet par les habitants. Malgré cela, le Gouvernement semble rester sourd à la nécessaire préservation du patrimoine, des paysages, de l'agriculture et du tourisme. Ainsi, M. le député interroge M. le ministre pour savoir s'il compte continuer de soutenir ce projet qui menace des territoires d'exception et pour savoir si le respect du patrimoine architectural français et de l'agriculture sont secondaires pour le Gouvernement. De même, il lui demande de se déplacer pour rencontrer et échanger avec les élus et la population et rappelle qu'à ce jour, malgré les engagements de son cabinet, aucune date ne lui a été proposée pas plus qu'au maire de Beaucaire pour le rendez-vous sollicité depuis plusieurs semaines.

Texte de la réponse

LIGNE À TRÈS HAUTE TENSION DE JONQUIÈRES-SAINT-VINCENT À FOS-SUR-MER


Mme la présidente . La parole est à M. Yoann Gillet, pour exposer sa question, no 696, relative à la ligne à très haute tension de Jonquières-Saint-Vincent à Fos-sur-Mer.

M. Yoann Gillet . Madame la ministre, le Gard ne sera pas la poubelle de Fos-sur-Mer !

Je suis ici pour faire entendre la voix des Gardois, qui vous demandent clairement d'abandonner le projet de ligne aérienne à très haute tension devant relier Jonquières-Saint-Vincent à Fos-sur-Mer et visant à alimenter la zone industrialo-portuaire de Fos.

Plusieurs tracés de cette ligne sont envisagés. Dans un certain nombre d'entre eux, le territoire gardois est menacé d'être défiguré par des pylônes, nombreux, larges et de plus de cinquante mètres de hauteur.

L'installation de tels pylônes aurait des effets irrémédiables sur plusieurs activités, notamment agricoles et viticoles ; les terres de l'AOC – appellation d’origine contrôlée – Costières de Nîmes seraient ainsi en partie atteintes, de même que des zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique. Les pylônes dénatureraient en outre des paysages magnifiques, ainsi que les abords d'un site patrimonial remarquable et de monuments historiques.

Votre projet revient à sacrifier les acteurs économiques existants au profit d'activités économiques hypothétiques, tout cela parce que vous voulez fonctionner à l'économie.

J'y insiste, madame la ministre : la concrétisation de ce projet reviendrait à sacrifier le tourisme, l'agriculture ainsi que le patrimoine de cette partie du Gard ; à détruire, pour de nombreux agriculteurs et viticulteurs, le travail d'une vie ; à réduire à néant la valeur de leurs biens, de leurs terres ; à combattre la nature et à détériorer la qualité de la vie dans ce secteur.

Le 22 décembre 2023, la ville de Beaucaire, commune de ma circonscription, a adopté à l'unanimité un vœu pour s'opposer fermement à ce projet. Depuis, de nombreuses autres collectivités territoriales ont délibéré en ce sens. La pétition lancée par la mairie de Beaucaire a reçu plusieurs milliers de signatures en quelques jours seulement, ce qui démontre le rejet total du projet par les habitants.

Les Gardois ne veulent pas de cette énorme cicatrice qui défigurerait nos magnifiques paysages, et ils ne veulent pas davantage sacrifier le tourisme, l'agriculture et la viticulture pour un projet qui ne les concerne pas.

Face à cette demande, le Gouvernement semble une fois de plus rester sourd et méprisant. Le rendez-vous qui m'avait été promis, il y a plusieurs semaines, par votre cabinet ? Aucune nouvelle ! Les Français sont une fois de plus laissés à l'abandon, sans qu'aucune réponse satisfaisante ne soit apportée par le Gouvernement.

Dans ces conditions, que devons-nous faire ? Aller au tribunal ? C'est prévu. Manifester bruyamment ? Cela aussi est prévu.

La situation est urgente. Vous devez apporter des réponses claires et concrètes aux revendications légitimes de nos compatriotes.

Mes questions sont simples. Quand allez-vous enfin prendre vos responsabilités et vous déplacer dans le Gard pour échanger avec les élus et la population ? Quand allez-vous abandonner ce projet nocif pour les Gardois, leur environnement et leur qualité de vie ?

Mme la présidente . La parole est à Mme la ministre déléguée à l'agriculture et à la souveraineté alimentaire.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée à l'agriculture et à la souveraineté alimentaire . Le réseau de grand transport est composé des principales lignes électriques du réseau de très haute tension. Il a comme fonction principale d'acheminer l'électricité entre les sources de production centralisées et les grands centres de consommation. Il s'agit d'une infrastructure essentielle du pays, qui garantit notre souveraineté énergétique ainsi qu'industrielle et qui conforte des emplois.

Si la structure du réseau a peu évolué depuis le début des années 1990, elle doit désormais s'adapter aux nouveaux enjeux de décentralisation de la production et de réindustrialisation verte de notre pays. Pour décarboner et réindustrialiser, nous aurons besoin de produire en quantité et d'acheminer de l'électricité bas-carbone.

La zone industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer est l'une des plus importantes d'Europe, et ce record vaut aussi pour ses émissions de CO2. Pour la décarboner, le besoin supplémentaire en électricité est équivalent à la puissance appelée par l'ensemble de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca). Or l'énergie électrique consommée dans la région est essentiellement produite à l'extérieur de celle-ci. Le développement du réseau très haute tension est donc un impératif – à moins de renoncer à des emplois industriels de qualité, qui font vivre les habitants de ce territoire, et de plonger la région dans des difficultés économiques.

La seule solution sur le plan technique consiste à créer un nouvel axe 400 000 volts double circuit d'environ 65 kilomètres en technologie aérienne entre Jonquières-Saint-Vincent, dans le Gard, et Feuillane, à Fos-sur-Mer. Pour en déterminer le tracé le plus acceptable pour les territoires traversés, une concertation a été engagée, contrairement à ce que vous avez dit, sous l'égide des préfets des Bouches-du-Rhône et du Gard. Cette concertation a pour objectifs d'expliquer les raisons d'être du projet et de définir très en amont, avec les élus, avec les organisations professionnelles et avec les associations représentatives, ses caractéristiques ainsi que les mesures d'insertion environnementale et d'accompagnement.

Je vous le confirme : il s'agira d'éviter autant que possible les zones présentant des enjeux patrimoniaux, environnementaux ou sociétaux importants, tout en maîtrisant les coûts et la faisabilité technique du tracé retenu. À l'issue de la concertation et au vu des enjeux identifiés ainsi que des contributions apportées, un fuseau de moindre impact sera validé par l'État.

En conclusion, cette ligne est indispensable pour sécuriser notre souveraineté énergétique électrique ainsi que la réindustrialisation de la région sud, et pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans la zone de Fos-sur-Mer, qui figure parmi les cinq plateformes les plus émissives en CO2 du pays. Soit nous agissons, soit nous laissons tomber la région Paca.