FIBROMYALGIE
M. le président . La parole est à M. Laurent Croizier, pour exposer sa question, no 701, relative à la fibromyalgie.
M. Laurent Croizier . Lydia et Céline habitent ma circonscription, dans le Doubs. Elles font partie des 2 à 3 millions de personnes atteintes de fibromyalgie en France, une pathologie fortement invalidante qui se caractérise par des douleurs musculaires ou articulaires chroniques, diffuses ou persistantes.
« J'ai des pertes de force au niveau des membres et trop de douleurs. Parfois, c'est mon mari qui en arrive à couper ma viande. » ; « C'est comme si je brûlais de l'intérieur et qu'on m'enfilait des poignards. » Voilà les mots que Lydia et Céline m'ont confiés.
Ces symptômes réduisent la vie sociale et professionnelle et mènent à l'isolement. Alors que Lydia se déplace avec énormément de difficulté, quand Céline est en fauteuil roulant, le quotidien de ces deux femmes s'est fortement dégradé. Elles ne peuvent quasiment plus se déplacer seules, ne peuvent plus travailler, ne sortent presque plus de chez elles et sont totalement dépendantes de leur conjoint, dont je salue le dévouement.
L'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) souligne à cet égard que les personnes atteintes de fibromyalgie sont plus fragiles face au risque suicidaire. En 2016, une commission d'enquête parlementaire indiquait que cette maladie pousserait 38 % des personnes qui en sont atteintes à tenter de se suicider.
Le principal combat de Lydia, de Céline et des associations est de faire reconnaître la fibromyalgie, pathologie reconnue par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) depuis 1992, comme une affection de longue durée (ALD).
Faute de cette reconnaissance par la sécurité sociale, les frais engendrés par la maladie ne sont pas pris en charge intégralement. Alors que certains patients ont des prescriptions hallucinantes, pouvant dépasser les quinze traitements médicamenteux par jour, leurs soins peuvent représenter chaque mois une dépense non remboursée de plusieurs centaines d'euros.
Eu égard à la situation de ces femmes et à leur souffrance, il me paraît urgent d'intégrer cette maladie à la liste des ALD ; les patients concernés pourront ainsi bénéficier d'une véritable prise en charge.
M. le président . La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
M. Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la santé et de la prévention . Vous l'avez indiqué, la fibromyalgie est un syndrome douloureux chronique, qui touche entre 1,5 % et 2 % de la population. Il se traduit par de nombreux symptômes non spécifiques et d'intensité variable, comme des douleurs chroniques diffuses et fluctuantes, sans que ceux-ci permettent la qualification de maladie. La prise en charge des soins liés à la fibromyalgie est donc celle du droit commun.
Pour répondre très directement à votre question, l'absence de causes connues, le manque d'examens diagnostiques identifiés et la variabilité des prises en charge empêchent de reconnaître la fibromylagie comme affection de longue durée.
Cependant, pour les patients atteints de formes sévères et invalidantes, une prise en charge au titre des ALD hors liste est possible. Cette admission est appréciée selon des critères de gravité et d'évolution, ou selon le caractère invalidant de la maladie. De plus, la durée du traitement doit être supérieure à six mois et nécessiter une thérapeutique particulièrement coûteuse. Par ailleurs, l'assuré peut percevoir une pension d'invalidité si l'incapacité permanente constatée est importante.
En parallèle, afin d'améliorer le parcours de santé et la qualité de vie des patients atteints de fibromyalgie, le ministère de la santé et de la prévention a engagé plusieurs actions. Concrètement, nous diffusons des informations à destination des professionnels de santé sur les dispositifs dérogatoires d'affection de longue durée, justement pour accompagner au mieux les patients. Nous relayons les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) pour améliorer les pratiques et organiser le parcours du patient douloureux chronique. Nous poursuivons les travaux visant à structurer la filière de prise en charge de la douleur chronique, afin que celle-ci soit plus lisible. Enfin, nous finançons des études pour renforcer la recherche sur la douleur chronique et la fibromyalgie.
M. le président . La parole est à M. Laurent Croizier.
M. Laurent Croizier . Il est très difficile d'obtenir une pension d'invalidité lorsqu'on est atteint de fibromyalgie, ou de faire reconnaître cette pathologie comme une affection de longue durée hors liste. C'est la raison pour laquelle j'estime qu'il est très important d'envoyer un message aux personnes qui en sont atteintes et de leur dire que la sécurité sociale reconnaît leur maladie.
Dans l'attente que ce soit un jour le cas – ce que j'espère –, les malades se font prescrire des arrêts maladie quand ils le peuvent, ou aménagent leur temps de travail lorsque leur employeur le leur permet. Je rappelle que, selon le ministère de la santé et de la prévention, 2 % de la population française serait atteinte de fibromyalgie, dont 80 % de femmes – un chiffre auquel s'ajoutent toutes les personnes non diagnostiquées. Monsieur le ministre, je crois qu'il faut agir.
M. le président . La parole est à M. le ministre délégué.
M. Frédéric Valletoux, ministre délégué . J'insiste sur le fait que le Gouvernement et le ministère de la santé et de la prévention ne restent pas les bras ballants sur cette question, qui est majeure et dont vous avez rappelé l'importance. Nous agissons grâce à la mobilisation des professionnels de santé et du réseau des soignants, au travers de la diffusion des recommandations de la HAS, ou encore grâce au travail d'information effectué par l'assurance maladie. Notre objectif est d'offrir la prise en charge la plus adaptée possible, dans le cadre scientifique, médical et réglementaire. Je le répète, nous ne méconnaissons pas l'importance de la fibromyalgie.