Question orale n°709 : Pollution subie par les habitants du XVIe arrondissement de Marseille

16ème Législature

Question de : M. Sébastien Delogu (Provence-Alpes-Côte d'Azur - La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale)

M. Sébastien Delogu appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la pollution de l'air, la pollution maritime et les nuisances sonores que subissent les habitants du XVIème arrondissement de Marseille. Selon Santé publique France, la pollution de l'air est responsable en France de près de 40 000 morts par an. Pour mesurer cette pollution, entres autres initiatives, l'association Cap au Nord a installé dans le XVIe arrondissement de Marseille une série de capteurs citoyens. Les relevés de ceux-ci indiquent, de manière catégorique, que les seuils maximaux concernant les particules fines et le dioxyde d'azote recommandés par l'Organisation mondiale de la santé sont régulièrement dépassés. À la source de ces pollutions, les panaches de fumée qui s'échappent des cheminées des navires stationnés à quai dans le Grand port maritime de Marseille et dans le chantier de réparation naval « Form 10 ». Ces derniers, à défaut de régulation de la part du Gouvernement, d'électrification complète des quais ou de compatibilité avec les rares infrastructures électriques présentes, laissent tourner leurs moteurs en permanence. Les panaches de fumée qui s'échappent de leurs cheminées exposent notamment les habitants et les travailleurs à des pathologies graves comme l'anxiété, l'asthme, des difficultés respiratoires ou des cancers. De plus, les navires stationnés à quai sont également responsables d'une forte pollution maritime due au rejet de leurs eaux de lavage dans le port et aux retombées de la pollution atmosphérique qu'ils produisent. Celle-ci met en danger tant l'écosystème marin que la possibilité pour les Marseillaises et les Marseillais de profiter de leur littoral. Enfin, comme l'indiquent les riverains de l'Estaque ou de Saint-Henri, dont les relevés dépassent régulièrement les seuils de décibels légaux en soirée et la nuit, les activités portuaires du Grand port maritime de Marseille et du chantier « Form 10 », ainsi que les avions qui décollent ou atterrissent de l'aéroport de Marseille Provence, engendrent également de fortes nuisances sonores. Pour ces raisons, il lui demande quand le Gouvernement prendra des mesures pour protéger la santé des habitants de Marseille, en écoutant leurs revendications légitimes, en les associant aux décisions qui les concernent et en régulant les activités industrielles portuaires qui dégradent considérablement leur cadre de vie.

Réponse en séance, et publiée le 3 avril 2024

POLLUTION À MARSEILLE
M. le président . La parole est à M. Sébastien Delogu, pour exposer sa question, no 709, relative à la pollution à Marseille.

M. Sébastien Delogu . Dans le 16e arrondissement de Marseille, voyant de la poussière noirâtre se déposer sur le rebord de leurs fenêtres, les habitants ont installé un réseau de plusieurs capteurs citoyens pour mesurer la pollution de l'air, avec l'aide des comités d'intérêt de quartier (CIQ), de collectifs et d'associations comme France nature environnement et Cap au Nord. Les résultats sont clairs : presque tous les jours, les seuils de particules fines et de dioxyde d'azote recommandés par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sont dépassés. Cette pollution expose les habitants de nos quartiers à des pathologies graves, qui vont de l'asthme à différents cancers, en passant par de l'anxiété et des difficultés respiratoires ; elle provoque également une augmentation du risque d'accident vasculaire cérébral (AVC).

À la vue des immenses panaches de fumée qui s'échappent des navires stationnés à quai dans le grand port maritime de Marseille et dans le chantier de réparation navale de la forme 10, la responsabilité de ces derniers ne fait aucun doute. Sans aucune régulation de la part du Gouvernement pour bannir des ports les bateaux les plus polluants et faute d'une électrification complète et rapide des quais, ces navires laissent tourner leurs moteurs en permanence, empoisonnant au passage la mer, l'air et les travailleurs du port, mais surtout les Marseillaises et les Marseillais.

Pourtant, pour le Gouvernement, tout va bien : si les seuils de pollution de l'OMS sont dépassés, dans les quartiers de l'Estaque, de Saint-Henri et de Saint-André, les indicateurs pris en considération par la loi française sont quant à eux bien au vert.

Ceux-ci sont en effet beaucoup moins protecteurs : ils n'empêchent pas les 40 000 morts causées chaque année en France par la pollution de l'air, un chiffre dix fois supérieur à celui de la mortalité routière. Aucune politique de planification écologique n'est prévue pour autant. Au nom de quoi ? Des intérêts économiques d’une poignée d’acteurs qui se gavent et n’hésitent pas à faire tourner leurs chantiers jour et nuit, au nom de la rentabilité.

Tant pis pour les ouvriers que le travail de nuit expose à un risque accru de cancer ; tant pis pour les habitants des quartiers nord de Marseille, qui sont exposés non seulement aux nuisances des avions qui passent au-dessus de leur tête avant d'atterrir à l'aéroport de Marignane, mais également, chaque nuit, aux bruits et aux lumières ; tant pis, enfin, pour l'environnement, pour la biodiversité et pour la qualité de l'air.

Notre législation, bien trop complaisante avec les pollueurs, met en danger les conditions de vie de toutes et tous, pour les seuls intérêts économiques de quelques-uns. Quand prendrez-vous enfin des mesures pour protéger la santé des habitants de Marseille, en écoutant leurs revendications légitimes, en les associant aux décisions qui les concernent et en régulant les activités industrielles portuaires et aéroportuaires qui dégradent considérablement leurs conditions de vie ? (M. Damien Maudet applaudit.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité . Vous parliez de planification écologique : il y a environ un an, je me suis rendu sur place avec des élus marseillais pour que l'ensemble de la filière s'engage dans la transition écologique, réduise son empreinte carbone et les pollutions – vous n'étiez pas présent, mais je sais la vie d'un député particulièrement chargée. Ce n'est pas le Gouvernement qui a décidé, il y a des dizaines d'années, de développer ce secteur d'activité économique qui crée de l'emploi et de la croissance pour la ville de Marseille.

En revanche, nous devons améliorer la santé des Marseillais et amener tous ceux qui concourent à cette activité économique à réduire les pollutions. L'année dernière, nous avons signé une charte avec la région Sud, la métropole, le département et des élus de Marseille, fixant en particulier des seuils de pollution à ne pas dépasser et des échéances. Nous avons également investi dans le raccordement électrique à quai des navires.

Pour répondre précisément à vos questions : quand ? La démarche a été engagée il y a un an. Comment ? Avec des financements de l'État et des collectivités. Pourquoi ? Pour protéger la santé des Marseillais, objectif essentiel de nos politiques publiques, comme vous l'avez dit.

Depuis 2017, le programme de connexion électrique des navires à quai (Cenaq) a permis d'équiper les terminaux qui accueillent des passagers, utilisés par les compagnies maritimes La Méridionale et Corsica Linea, de quatre prises à quai d'une capacité de 6 mégawatts. Trois postes à quai supplémentaires ont été mis en service début 2024 pour les ferries desservant le Maghreb, et deux autres devraient l'être d'ici à fin 2024. Deux navires de croisière pourront être connectés simultanément avant la fin 2025. Il est essentiel de permettre aux gens de naviguer, de rendre visite à leur famille et à leurs amis de l'autre côté de la Méditerranée et, en même temps, de réduire les pollutions. Ce programme représente un investissement de 51 millions d'euros. Il a bénéficié d'un soutien de l'État de plus de 10 millions d'euros dans le cadre du plan France relance. Dans les cinq ans à venir, le port de Marseille investira près de 100 millions d'euros supplémentaires pour l'électrification des quais, ce qui permettra de raccorder la totalité des navires de passagers en 2028. C'est inédit au sein de la région Méditerranée.

Ces actions sont en phase avec le plan climat-air-énergie de la métropole et avec le plan Escales zéro fumée de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, qui finance l'électrification des quais des ports de Marseille, Nice et Toulon. Nous répondons ainsi, au bénéfice de la ville de Marseille et de ses habitants, à deux impératifs : la réduction de la pollution et le maintien des activités qui permettent à nos concitoyens de voyager.

Données clés

Auteur : M. Sébastien Delogu (Provence-Alpes-Côte d'Azur - La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale)

Type de question : Question orale

Rubrique : Pollution

Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires

Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mars 2024

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