Santé dans la Nièvre
Question de :
Mme Perrine Goulet
Nièvre (1re circonscription) - Démocrate (MoDem et Indépendants)
Mme Perrine Goulet interroge M. le ministre de la santé et de la prévention sur la difficulté de l'accès aux soins dans le département de la Nièvre. L'offre de soins pour les Nivernaises et les Nivernais demeure critique et la colère de ceux-ci monte. Le groupement hospitalier de territoire de la Nièvre est en grande en difficulté au niveau de ses ressources, entraînant un mal-être important pour les agents, comme on a pu le voir il y a quelques mois à la maternité de Nevers, qui a perdu 45 % de ces effectifs de sages-femmes depuis 3 ans. Aussi, au-delà de la situation hospitalière, les habitants rencontrent de nombreuses difficultés pour avoir des rendez-vous médicaux, notamment chez les dentistes. En outre, la Nièvre compte 23 % de médecins généralistes en moins depuis 2010, 45 % de gynécologues-obstétriciens en moins, 20 % de cardiologues en moins ; le département ne compte plus qu'un seul dermatologue. Ce phénomène touche l'ensemble des professionnels de santé, salariés et libéraux. De plus, les aides accompagnant l'installation des professionnels ne permettent pas, pour autant, de les maintenir dans le département, la concurrence à l'œuvre entre les territoires devenant exacerbée. En outre, même si des projets structurants ont été portés et se mettent en place, comme la construction de l'hôpital de Cosne-sur-Loire ou la rénovation du centre hospitalier spécialisé Pierre Loo, il demeure nécessaire de trouver une solution pour attirer les professionnels de santé dans les territoires. Dès lors, on peut s'interroger sur l'opportunité de mettre en œuvre une tarification différenciée entre les territoires ou la mise en œuvre d'un prime d'urgence aux sages-femmes en salle de naissance. Elle lui demande quels moyens le Gouvernement s'apprête à mettre en œuvre, à court terme, pour lutter contre cette situation sanitaire précaire, pour garantir une offre des soins à toutes les Nivernaises et tous les Nivernais, ainsi que de permettre l'effectivité des outils pour l'attractivité du territoire et inciter les professionnels de santé et leur famille à s'installer et rester dans les territoires ruraux.
Réponse en séance, et publiée le 11 janvier 2023
OFFRE DE SOINS DANS LA NIÈVRE
Mme la présidente. La parole est à Mme Perrine Goulet, pour exposer sa question, n° 70, relative à l'offre de soins dans la Nièvre.
Mme Perrine Goulet. À ce moment de l'année où l'on présente ses vœux, il est plus que jamais important de souhaiter une bonne santé aux Nivernaises et aux Nivernais, tant l'offre de soins dans notre territoire demeure critique : pas une réunion publique, pas un échange sans que je sois interpellée sur ce sujet. La colère des concitoyens de ma circonscription monte.
Le groupement hospitalier de territoire de la Nièvre est en grande difficulté s'agissant de ses ressources, entraînant un mal-être important des agents. En effet, la maternité de Nevers a perdu 45 % de ses effectifs de sages-femmes en trois ans et un tiers des infirmières expérimentées ont quitté les urgences où elles exerçaient. Récemment, l'hélicoptère de Nevers n'a pas pu décoller pour emmener un patient subissant une dissection aortique, faute de médecins. Durant plusieurs jours, une ligne de structure mobile d'urgence et de réanimation – Smur – n'a pas fonctionné et des patients n'ont pu être transférés dans des délais raisonnables, faute de transport médical ou paramédical.
Mais au-delà de la situation hospitalière, les habitants rencontrent également de nombreuses difficultés pour avoir des rendez-vous médicaux et paramédicaux dans notre département. Depuis 2010, la Nièvre compte 23 % de médecins généralistes, 45 % de gynécologues-obstétriciens et 20 % de cardiologues en moins. Le département ne compte plus qu'un seul dermatologue. Il manque quarante dentistes. Ce phénomène touche l'ensemble des professionnels de santé de la Nièvre, salariés hospitaliers et professionnels libéraux.
De plus, les aides accompagnant l'installation des professionnels dans le département ne permettent pas de les retenir. La concurrence à l'œuvre entre les territoires est exacerbée. Même si des projets structurants ont été soutenus par ce gouvernement et se concrétisent, telles la construction du nouvel hôpital de Cosne-Cours-sur-Loire ou la rénovation du centre hospitalier spécialisé Pierre-Lôo, il demeure nécessaire de trouver une solution pour attirer les professionnels de santé dans nos territoires et pour accompagner ceux qui y exercent.
Des annonces ont été faites et vont dans le bon sens mais elles constituent des réponses à moyen et long terme. Les Nivernais ont besoin de se faire soigner maintenant. Dès lors, on peut s'interroger sur l'opportunité d'instaurer une tarification différenciée de la consultation dans nos territoires. La mise en œuvre d'une prime d'urgence pour les sages-femmes qui exercent en salle de naissance rendrait le travail à l'hôpital plus intéressant financièrement que l'exercice libéral. Faciliter le cumul d'emplois à temps partiel à l'hôpital et en ville permettrait de varier les parcours des soignants. La prise en charge par l'agence régionale de santé – ARS – des vols que nous souhaitons planifier entre Dijon et Nevers permettrait à des spécialistes de venir exercer une journée par semaine dans le territoire. Nous souhaitons que le parcours de consolidation des compétences des médecins étrangers soit simplifié et plus rapide, afin d'exercer quand ils le souhaitent.
Vous le voyez, nous avons des idées. Nous avons besoin que le Gouvernement nous aide à lutter à court terme contre cette situation sanitaire précaire pour garantir une offre de soins à toutes les Nivernaises et à tous les Nivernais. Êtes-vous prête à nous accompagner pour mettre en œuvre ces propositions ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. L'ARS de Bourgogne-Franche-Comté réactualise régulièrement les zones d'intervention prioritaires en vue de répondre à toute nouvelle demande d'installation et de permettre ainsi aux professionnels de bénéficier de l'ensemble des aides proposées pour s'installer. Une instance ad hoc a également été mise en place avec le conseil départemental et les partenaires du territoire afin de mieux accompagner et suivre les installations de médecins.
Outre l'accompagnement financier d'importants projets immobiliers des établissements de la Nièvre – notamment la reconstruction du centre hospitalier de Cosne-Cours-sur-Loire – visant à renforcer l'attractivité du territoire, l'ARS accompagne et encourage toutes les initiatives favorisant l'installation de jeunes professionnels. Par exemple, des internats de territoire sont créés, des stages différenciés pouvant être effectués dans des établissements et chez des professionnels libéraux sont proposés, ou encore l'offre de formation paramédicale – kinésithérapeutes, ergothérapeutes, psychomotriciens – est développée.
L'ARS est également très largement mobilisée avec ses différents partenaires afin de trouver des solutions pour répondre aux besoins de la population nivernaise, telles que le développement de la télédermatologie ou le renforcement de l'exercice coordonné, avec notamment la création de maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) – le département en compte dix-neuf, dont cinq multisites.
C'est dans cet état d'esprit que se sont tenues les réunions du Conseil national de la refondation (CNR) « santé », afin de permettre l'émergence de propositions concertées et adaptées aux spécificités des territoires, telles les perspectives de rémunération différenciée. Dans ses vœux aux soignants, le Président de la République a, à ce titre, affirmé l'ambition de mieux rémunérer les médecins qui acceptent de nouveaux patients.
De même que j'ai promis de me rendre à Saint-Claude, j'ai également prévu, au début du mois de mars, un déplacement dans la Nièvre. Nous aurons ainsi l'occasion de discuter, au plus près du terrain, avec les acteurs du territoire, des solutions que vous proposez et, en concertation avec l'ARS, de considérer celles qui pourront être collectivement mises en œuvre. C'est ainsi que nous répondrons aux besoins de santé des Nivernaises et des Nivernais.
Mme la présidente. La parole est à Mme Perrine Goulet.
Mme Perrine Goulet. Je vous remercie et vous attends avec impatience au mois de mars. Nous avons effectivement tenu des réunions dans le cadre du CNR « santé », au cours desquelles ont été formulées les propositions que je viens de mentionner. Il faut effectivement soutenir l'installation des soignants, mais également accompagner ceux qui restent exercer dans nos territoires, qui sont souvent les oubliés des politiques publiques d'installation.
Auteur : Mme Perrine Goulet
Type de question : Question orale
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Santé et prévention
Ministère répondant : Santé et prévention
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 janvier 2023