Question orale n° 711 :
Risques liés à la présence de PFAS et TFA à Salindres

16e Législature

Question de : M. Michel Sala
Gard (5e circonscription) - La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale

M. Michel Sala appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les PFAS (per et polyfluoroalkylées). En février 2024, M. le député a eu l'occasion d'alerter M. le ministre sur la teneur record de polluants éternels sur le site de Salindres. Cet endroit, comme 4 autres sites en France, est concerné par 3 fois plus de cas de glyoblasthome qu'ailleurs, une forme rare de cancer du cerveau dont l'espérance de vie est d'un an. L'ARS du Gard a été alertée de l'urgence de la situation et a analysé l'eau potable des robinets. Malheureusement, cette campagne de tests ne concerne pas la recherche en teneur de TFA, l'acide trifluoroacétique, qui est pourtant l'un des PFAS les plus toxiques pour la santé humaine. Lors d'une campagne de tests menée par l'ONG Générations futures au même endroit, il s'avère que le TFA et les acides trifliques représentent près de 99,99 % des polluants retrouvés. Dans certaines communes, les concentrations de TFA étaient jusqu'à 38 fois plus élevées que le seuil autorisé par les normes européennes applicables aux perfluorés. Malheureusement, l'état des connaissances sur les contaminations aux PFAS semble être à ses balbutiements et ceci renforce l'état d'inquiétude à ce sujet. M. le député formule ainsi 3 demandes. Tout d'abord : il souhaite que le Gouvernement mette à disposition toutes les informations dont il dispose sur la question des PFAS et la collecte de données sur le TFA dans les analyses scientifiques. Deuxièmement, il souhaite que le Gouvernement explique son choix de ne pas intégrer le TFA dans la fixation de seuils de PFAS. Le texte européen propose en effet deux options aux États membres : soit la limite de 0,5 microgramme par litre pour l'ensemble des 10 000 PFAS ; soit le respect du seuil de 0,1 microgramme par litre pour la somme de 20 PFAS, qui n'inclut pas le TFA. C'est l'option retenue par la France. Enfin, M. le député demande que le Gouvernement mandate les ARS concernées de mener une étude épidémiologique à Salindres, ainsi que des campagnes d'analyses sanguines de la population pour confirmer si les TFA ont une incidence sur la santé des personnes qui y ont été exposées. Plusieurs années de cela, on avait obtenu la mise en place d'une étude d'imprégnation sur les mines de la Croix de Palières, il est donc possible de mener une telle étude à cette échelle. Il souhaite connaître sa position sur le sujet.

Réponse en séance, et publiée le 3 avril 2024

POLLUTION À SALINDRES
M. le président . La parole est à M. Michel Sala, pour exposer sa question, no 711, relative la pollution à Salindres.

M. Michel Sala . En février, je vous alertais sur la présence record de polluants éternels dans les eaux de Salindres, autour du site de l'usine Solvay, dans le Gard. La commune compte trois fois plus de cas de glioblastome qu'ailleurs – une forme rare de cancer du cerveau donnant aux personnes atteintes une espérance de vie d'un an.

L'agence régionale de santé (ARS) a été alertée de l’urgence de la situation et a analysé l'eau potable provenant des robinets. La teneur en acide trifluoroacétique (TFA) n'était malheureusement pas concernée par la campagne d'analyses, alors que les tests réalisés par l'ONG Générations futures ont montré qu'il représente près de 99,99 % des polluants retrouvés. Dans certaines communes, les concentrations de TFA sont jusqu’à trente-huit fois plus élevées que le seuil autorisé par les normes européennes applicables aux composés perfluorés – les substances polyfluoroalkylées et perfluoroalkylées (Pfas).

L'état des connaissances sur les contaminations aux Pfas semble en être à ses balbutiements, ce qui renforce notre inquiétude. Nous avons trois demandes.

Premièrement, nous souhaitons que le Gouvernement mette à disposition toutes les données concernant le TFA collectées lors des analyses scientifiques.

Deuxièmement, nous voulons qu'il explique son choix de ne pas intégrer le TFA dans les seuils de Pfas fixés. La directive européenne relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, dite directive eau potable, propose en effet deux options aux États membres : ne pas dépasser un seuil de 0,5 microgramme par litre pour l’ensemble des 10 000 Pfas ; ou un seuil de 0,1 microgramme par litre pour la somme de 20 Pfas, qui n'inclut pas le TFA – c'est l'option retenue par la France.

Troisièmement, nous demandons au Gouvernement de mandater l'ARS du Gard pour qu'elle mène une étude épidémiologique à Salindres, ainsi qu'une campagne d'analyses d'imprégnation de la population, afin de déterminer l'incidence du TFA sur la santé des personnes exposées. Il y a quelques années, nous avions obtenu le lancement d'une telle campagne d'analyses pour mesurer l'exposition aux métaux lourds autour de l'ancien site minier de La-Croix-de-Pallières.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité. Je vous remercie pour cette question essentielle à la santé de nos concitoyens et, a fortiori, des citoyens du Gard, portant sur notre capacité à réduire ce type de pollution. Vos questions sont précises, je vais l'être à mon tour : l'entreprise Solvay produit à Salindres de l'acide trifluoroacétique. Un arrêté a prescrit à cet exploitant de réduire et traiter drastiquement ses rejets au moyen du procédé d'osmose inverse.

Jusqu'à présent, la toxicité du TFA était jugée moindre que l'acide perfluorooctanoïque (PFOA) ou que celle d'autres Pfas. Pour le TFA, l'autorité sanitaire allemande a fixé une norme de 60 microgrammes par litre. À ce stade, les valeurs mesurées en France ne dépassent pas cette valeur. Toutefois, nous avons saisi l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) pour qu'elle élabore ou actualise des valeurs toxicologiques de référence pour plusieurs Pfas d'ici à 2025.

En ce qui concerne la transposition de la directive européenne sur l'eau potable, il a été demandé aux États membres de choisir entre deux options, comme vous l'avez rappelé : nous avons choisi le seuil de 0,1 microgramme pour les 20 Pfas les plus usuellement retrouvés dans l'eau potable, car ce seuil nous paraît plus précautionneux et plus protecteur de la santé de nos concitoyens. Ce choix ne présage pas des efforts de l'État pour réduire l'exposition aux autres substances perfluorées, telles que le TFA.

Enfin, Santé publique France a mené entre 2006 et 2020 deux études épidémiologiques pour examiner un éventuel excès de cas de glioblastomes dans les communes de Salindres et de Rousson. Si la surincidence de cas y a été confirmée, Santé Publique France n'a pas identifié une cause d'exposition locale commune aux deux municipalités susceptible de l'expliquer. La nouvelle enquête nationale Albane sur l'alimentation, la biosurveillance, la santé, la nutrition et l'environnement, qui sera lancée d'ici à la fin 2024, inclura les Pfas parmi les substances surveillées, dans le but d'actualiser les valeurs de référence d'imprégnation de la population française et d'augmenter le nombre de substances recherchées par rapport aux précédentes enquêtes.

Nous communiquerons évidemment à la représentation nationale toutes les analyses qu'elle a à connaître.

M. le président . La parole est à M. Michel Sala.

M. Michel Sala . Si le TFA compte parmi les Pfas, il ne fait pas partie des prélèvements ni des analyses auxquels procède actuellement l'ARS à proximité de l'usine de Solvay. C'est tout le problème ! Les résultats ne seront ni utiles ni pertinents dans ce cas, puisque les polluants présents dans l'eau potable, comme l'a révélé Générations futures, sont au-dessus des seuils autorisés. Il faut le dire : la France est à la traîne. Alors que l'Allemagne connaît des rejets de TFA bien moindres, l'Agence fédérale pour l'environnement a immédiatement considéré ces niveaux comme très alarmants et mis en place des outils de surveillance. Quant à l'enquête Albane : concernera-t-elle le TFA ? Je vous interroge précisément sur ce point.

M. le président . Le secrétaire d'État ne dispose plus de temps pour répondre.

Données clés

Auteur : M. Michel Sala

Type de question : Question orale

Rubrique : Pollution

Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires

Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mars 2024

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