16ème législature

Question N° 717
de M. Stéphane Viry (Les Républicains - Vosges )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Travail, santé et solidarités
Ministère attributaire > Travail, santé et solidarités

Rubrique > professions de santé

Titre > Situation des infirmiers libéraux et Asalée

Question publiée au JO le : 26/03/2024
Réponse publiée au JO le : 03/04/2024 page : 2559

Texte de la question

M. Stéphane Viry alerte Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités sur la situation des infirmières en France. Alors que plusieurs cris d'alerte se sont fait entendre ces derniers mois, le Gouvernement reste sourd face aux demandes des infirmières libérales. Pourtant, leur détresse est bien réelle. Leur demande est simple : une revalorisation des tarifs des actes médicaux, bloqués depuis 2009, et une indemnité de déplacement décente. Une augmentation de 25 centimes sur leur forfait de frais kilométriques ne suffit pas. Cette augmentation est déconnectée des réalités du terrain et loin d'être à la hauteur du rythme de l'évolution de l'inflation. M. le député ajoute que l'assurance maladie a initié des contrôles suspicieux concernant les actes des infirmières libérales remettant en cause des soins passés de plus d'un an et demi. Ces contrôles sont perçus, à raison, comme une défiance qui s'ajoute à leurs conditions de travail pénible. M. le député demande à Mme la ministre comment elle compte agir pour que les infirmières libérales cessent de survivre et puissent enfin vivre de leur beau métier. Quelle réponse apporte-t-elle sur les contrôles de l'assurance maladie ? Enfin, la situation des infirmières Asalée est également inquiétante. Dans les Vosges, comme dans plusieurs autres départements, les infirmières Asalée supportent d'importants retards de paiement de la part de l'assurance maladie. Sur ce point, il lui demande ce qu'elle prévoit pour le dispositif Asalée, dispositif essentiel pour de nombreux patients.

Texte de la réponse

INFIRMIERS LIBÉRAUX


M. le président . La parole est à M. Stéphane Viry, pour exposer sa question, no 717, relative aux infirmiers libéraux.

M. Stéphane Viry . À mon tour d'évoquer, après la question de notre collègue Portier, la belle profession d'infirmier et d'infirmière. Je souhaite obtenir des informations et des précisions sur l'action et les intentions du Gouvernement pour défendre cette profession, que son exercice soit salarié ou libéral.

Depuis plusieurs années, en France, le manque de reconnaissance et le défaut de considération des infirmiers dans le parcours de soins sont manifestes. Nous pouvons nous interroger quant au rôle dévolu au métier d'infirmier par les autorités sanitaires. Les cris d'alerte se sont multipliés ; les infirmiers et les infirmières souffrent dans l'exercice d'une profession qu'ils ont choisie, et qu'ils exercent encore avec passion et enthousiasme, mais dont le quotidien est hélas devenu beaucoup trop compliqué. Cette profession suscite désormais des renoncements et des retraits, alors que la France aura besoin de davantage de soins à domicile dans les années à venir, compte tenu de l'évolution démographique.

La situation et son évolution sont donc préoccupantes, et nous avons le sentiment qu'elle n'est appréhendée qu'avec inertie, ou myopie. Vous avez évoqué, monsieur le ministre, la question de la revalorisation des actes médicaux, c'est-à-dire de la tarification des soins accomplis par les infirmiers. Or nous ne pouvons pas dire que ce dossier avance, ni qu'il soit traité avec la visibilité et la sérénité suffisantes. Objectivement, l'augmentation de l'indemnité forfaitaire de déplacement, à hauteur de 25 centimes le kilomètre, est indigente, compte tenu de l'inflation. Nous vivons une situation de crise, qui ne reçoit pas une réponse à la hauteur des conséquences prévisibles. Un problème d'attractivité du métier va se poser ; les jeunes ne voudront plus embrasser la carrière d'infirmier, et c'est finalement la population française qui en sera victime.

Outre le manque de considération et de reconnaissance, se pose un problème de confiance. Depuis plusieurs mois, les contrôles de l'assurance maladie ont été multipliés de façon effrénée, selon une méthodologie souvent discutable et douteuse, nourrie d'une suspicion et d'une présomption de fraude à l'encontre de ces professionnels de santé. On en vient à requalifier ou à remettre en question des actes tarifés plusieurs années auparavant. Cela peut provoquer des drames, compte tenu de la situation économique de certains infirmiers. Pourquoi le Gouvernement laisse-t-il faire ? Pourquoi autant de zèle, sans aucune proportionnalité ?

Je suis très attaché aux droits de la défense, au principe du contradictoire ; or nous avons le sentiment d'une machine venant écraser, parce qu'elle ne leur fait pas confiance, les professionnels de santé – et les infirmiers en particulier. Cela pose problème et je souhaiterais que le Gouvernement modère les contrôles. Qu'on traque les fraudeurs, oui ; qu'on fasse peser une suspicion générale sur ce métier, non !

Enfin, s'agissant du dispositif Asalée – Action de santé libérale en équipe –, qui se révèle une solution très intéressante et efficace, au bénéfice des patients, un problème se pose : la convention avec la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) n'est pas signée, et nous constatons des retards de paiement. Monsieur le ministre, qu'en est-il de la situation des infirmiers concernés par ce dispositif ?

Cela va sans dire, cette question aurait pu concerner les aides-soignants.

M. Alexandre Portier . Très bien !

M. le président . La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.

M. Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la santé et de la prévention . Je n'aborderai que la question des infirmiers, même si bien d'autres professions du soin pourraient être évoquées.

La situation des 120 000 infirmiers exerçant en libéral – sur les 630 000 infirmiers que compte notre pays – est connue et suivie. Je m'y suis penché dès ma prise de fonction, en recevant dès les premiers jours les trois organisations syndicales représentatives des infirmiers libéraux, afin de faire le point sur les chantiers en cours, sur leurs demandes, et tenter d'avancer avec eux.

Le bilan de soins infirmiers a été créé en 2020. Il permet de mieux reconnaître le rôle des infirmiers. Cela représente un investissement, de la part de l'assurance maladie, de 714 millions d'euros. En octobre 2023, nous avons achevé la généralisation de ce mode de tarification à l'ensemble des patients dépendants. Les infirmiers reconnaissent une réelle avancée.

S'agissant de l'indemnité forfaitaire de déplacement, l'augmentation de quelques centimes représente tout de même une augmentation de 10 %, soit l'équivalent, en moyenne, de 2 000 euros supplémentaires par an et par infirmier libéral, dès cette année.

Concernant les difficultés rencontrées par les infirmiers libéraux, j'ai accédé au souhait des organisations syndicales de travailler sur la pénibilité. J'ai chargé l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) d'une mission en ce sens, pour déterminer comment mesurer la pénibilité de ces métiers. Cette demande ancienne sera donc satisfaite, puisque nous pourrons engager des discussions sur la base de ce rapport, qui rendra compte de la situation présente et formulera des propositions.

Quant aux contrôles, ils sont malheureusement nécessaires. Il faut rappeler que dans l'ensemble des dépenses de santé mal orientées, les soins infirmiers représentent une part importante. Néanmoins, j'ai proposé aux syndicats infirmiers de travailler avec l'assurance maladie pour améliorer la méthodologie des contrôles.

Enfin, concernant le dispositif Asalée, je me suis déjà exprimé sur le sujet : l'affaire est réglée.

M. Stéphane Viry . Non, elle n'est pas réglée du tout !