16ème législature

Question N° 720
de Mme Sandra Marsaud (Renaissance - Charente )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère attributaire > Transition écologique et cohésion des territoires

Rubrique > alcools et boissons alcoolisées

Titre > Règlementation ICPE pour la construction des chais de stockage des eaux-de-vie

Question publiée au JO le : 26/03/2024
Réponse publiée au JO le : 03/04/2024 page : 2568

Texte de la question

Mme Sandra Marsaud attire l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur l'application de l'arrêté ministériel du 4 octobre 2010 modifié en février 2022 fixant les prescriptions applicables aux installations classées soumises à autorisation. Suite à l'incendie de l'usine Lubrizol à Rouen, les dispositions de cet arrêté ont été modifiées en février 2022. Notamment, ses articles 24 à 27 qui impactent l'ensemble des projets de construction ou d'agrandissement de chais de stockage des eaux-de-vie de cognac, lesquels sont pourtant soumis à des normes strictes, respectées et négociées avec les services de l'État. La modification de l'arrêté pose aujourd'hui deux types de difficultés. D'abord, contrairement au cahier des charges des chais, négocié avec tous les acteurs, établi avec les préfectures de Charente et Charente-Maritime, l'arrêté a pour conséquence d'interdire les « rétentions internes » pour les chais de moins de 300 m2. Pourtant, ce procédé fonctionne parfaitement. Par ailleurs, le confinement intégral des eaux d'extinction dans des bassins de confinement (eaux + alcool) prévu à l'article 26 bis amène à des situations rendant des projets irréalisables. En effet, des dizaines de dossiers de construction ou d'agrandissement de chais sont à ce jour bloqués. Ainsi, soit les opérateurs renoncent à leur projet, soit les banques refusent de financer, soit l'emprise au sol est considérablement augmentée pour un même projet, ce qui risque de rendre les documents d'urbanisme inopérants avant même leur validation. Dès lors, elle lui demande si le Gouvernement entend trouver des solutions permettant de respecter le cahier des charges de la construction des chais de cognac, issu d'une négociation approfondie et permettant une différenciation de la règle locale qui s'applique pour le stockage des spiritueux.

Texte de la réponse

STOCKAGE DU COGNAC


M. le président . La parole est à Mme Sandra Marsaud, pour exposer sa question, no 720, relative au stockage du cognac.

Mme Sandra Marsaud . À la suite de l'incendie de l'usine Lubrizol à Rouen en septembre 2019, les dispositions de l'arrêté ministériel du 4 octobre 2010 fixant les prescriptions applicables aux installations classées soumises à autorisation ont été modifiées en février 2022.

Depuis, les articles 24 à 27 posent problème en raison de leur impact sur tous les nouveaux projets de construction ou d'agrandissement de chais de stockage des eaux-de-vie de cognac, pourtant soumis à des normes strictes négociées localement avec les services de l'État. La modification de l'arrêté a en effet créé deux types de difficultés.

Premièrement, en contradiction avec le cahier des charges local des chais, négocié avec tous les acteurs et établi avec les préfectures de Charente et de Charente-Maritime, l'arrêté a pour conséquence d'interdire les rétentions internes pour les chais de moins de 300 m2. Ce procédé fonctionne pourtant parfaitement.

Deuxièmement, le confinement intégral des eaux d'extinction dans ces bassins de confinement – eaux et alcool –, prévu à l'article 26 bis, rend certains projets irréalisables : des dizaines de dossiers de construction de chais sont bloqués.

Par conséquent, soit les opérateurs renoncent à leur projet ; soit les banques refusent de les financer en raison de l'augmentation des coûts ; soit l'emprise au sol est considérablement accrue, ce qui risque de rendre les documents d'urbanisme inopérants avant même leur validation.

Le blocage – voire l'arrêt – de ces projets est très préjudiciable pour la filière du cognac. Les chais de stockage jouent un rôle essentiel dans la chaîne de valeur ; ce maillon est d'autant plus stratégique qu'il est également indispensable pour absorber les accélérations et les éventuels ralentissements conjoncturels – comme actuellement – que peut connaître la filière au cours de son développement, compte tenu des incertitudes provoquées par l'économie mondiale.

Entendez-vous trouver rapidement des solutions permettant de respecter ce cahier des charges local relatif à la construction des chais de cognac, issu d'une négociation approfondie et permettant une différenciation de la règle locale s'appliquant pour le stockage des spiritueux ?

M. le président . La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité . Permettez-moi tout d'abord de vous remercier pour votre implication dans cette belle filière du cognac. Les alcools de bouche, du fait de leur teneur en alcool et de leur propriété inflammable, sont des produits qui présentent des risques spécifiques devant être pris en considération et maîtrisés. Le suivi de ces risques est particulièrement important dans le cadre des processus de fabrication ou lorsque ces alcools sont stockés dans des quantités supérieures à 500 mètres cubes.

À la suite de l'accident sur le site de Lubrizol, en septembre 2019, le ministère de la transition écologique a mené un important travail de mise à jour, qui a conduit, en février 2022, à l'actualisation de l'arrêté du 4 octobre 2010. Ce dernier prévoit que le bassin de confinement soit dimensionné pour retenir la totalité des eaux d'incendie pendant deux heures, et, pour la sécurité d'intervention des services de secours, qu'il se trouve à l'extérieur des bâtiments lorsque des matières dangereuses sont présentes.

Comme vous l'avez indiqué, il est nécessaire de tenir compte des contextes propres aux différentes filières. Une mauvaise compréhension des conditions d'application de l'arrêté a provoqué une confusion dans la filière cognac. Cette confusion a depuis été éclaircie par les services de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal), qui a notamment précisé que l'article 26 bis ne s'appliquait qu'aux installations nouvelles ; il n'est pas applicable aux modifications d'installations existantes, cela même si elles conduisent au dépôt d'une nouvelle autorisation. Par ailleurs, nous avons invité les services concernés à faire preuve de souplesse dans l'interprétation de la notion d'installations existantes.

Il est important que des dispositions permettent de tenir compte de la dangerosité des matières contenant de l'alcool, tout en tirant les leçons de la catastrophe de Lubrizol. Pour ce faire, les spécificités de filières comme celle du cognac doivent être prises en considération et les décisions appliquées avec une certaine souplesse. En tout état de cause, nous proposons des solutions adaptées aux territoires.

M. le président . La parole est à Mme Sandra Marsaud.

Mme Sandra Marsaud . Le cabinet du ministre de la transition écologique m'avait déjà communiqué une réponse identique. Je vous remercie cependant de préciser à nouveau que le décret ne s'applique ni aux constructions existantes ni à leur extension. Toutefois, ces dispositions prennent une grande place dans les documents relatifs à l'urbanisme.

De plus, le cahier des charges local doit nécessairement être pris en considération. J'aimerais que nous puissions nous réunir pour en discuter, étant donné l'impact considérable de ce point sur les futurs projets de la filière.

Enfin, le stockage d'alcools de bouche n'est pas comparable à celui des produits chimiques ; je souhaite que nous en parlions dans un autre contexte, le temps des questions orales sans débat étant compté.

M. le président . La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État . Dans les faits, le stockage des alcools de bouche n'est pas comparable, bien que ces derniers soient inflammables. Vous avez raison : organisons une réunion au ministère de la transition écologique avec les représentants de la filière, afin de prendre en considération les différents sujets que vous avez évoqués et trouver des solutions.