Hôpital transfrontalier de Cerdagne
Question de :
Mme Sandrine Dogor-Such
Pyrénées-Orientales (3e circonscription) - Rassemblement National
Mme Sandrine Dogor-Such appelle l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'hôpital transfrontalier de Cerdagne. Cet hôpital, en fonctionnement depuis 2014, est cogéré par la Generalitat de Catalogne et le ministère français de la santé. Il a été institué sous la forme d'un GECT (groupement européen de coopération territoriale) par la convention du 26 avril 2010, signée par la France, l'Espagne et la Generalitat de Catalogne. Il a été financé à 66 % par des fonds européens. Il est situé sur le territoire espagnol, sur la commune de Puigcerda. Il est également binational par sa gouvernance, avec un conseil d'administration et un bureau exécutif composé de représentants des institutions sanitaires catalanes et françaises ; l'équipe de direction est également mixte. Le personnel y est français et espagnol. Les patients viennent des deux pays. Mais les prises en charge et les systèmes de santé y sont différents. Sa vocation première est de fournir des soins médicaux aux habitants de la vallée de Cerdagne, de part et d'autre de la frontière espagnole. Cela représente environ 30 000 personnes qui n'avaient pas jusque-là d'accès facile aux soins. En raison de sa situation dans les Pyrénées, à proximité de stations de ski espagnoles et françaises, ainsi que de centres de haute performance, l'hôpital de Cerdagne est devenu une référence en matière de médecine sportive et de montagne. Il s'agit d'un établissement de médecine-chirurgie-obstétrique (MCO) de proximité, doté d'un service d'urgence, d'un centre d'hémodialyse et d'un plateau technique complet. Il convient de mesurer la réalité d'un hôpital bi-national, en l'absence, à l'échelle européenne, d'un cadre juridique intégré portant sur l'organisation et le fonctionnement de la santé transfrontalière. Le défi actuel est de progresser dans la coordination des deux systèmes de santé et d'améliorer la relation avec l'ensemble du réseau de soins. La réglementation sanitaire reste du domaine des droits nationaux, la santé est une compétence des États et relève davantage de coopération entre les États à l'exception de certaines institutions européennes sanitaires ; ainsi l'hôpital de Cerdagne, situé en territoire espagnol, obéit non seulement aux règles et dispositions juridiques du droit sanitaire espagnol, mais aussi à la réglementation économique et sociale en vigueur en Espagne. Cette situation explique pourquoi l'appropriation de l'hôpital par la partie française s'avère plus compliquée. De nombreux obstacles liés à l'existence de la frontière administrative et sanitaire ont dû être aussi résolus depuis la mise en œuvre de ce projet. On peut citer notamment la simplification des formalités liées au transport de corps entre l'Espagne et la France (décret n° 2017-1122 du 30 juin 2017) ; se posent cependant encore des problèmes de carte vitale pour les nouveau-nés français ou au sujet du régime de la responsabilité médicale applicable dans un hôpital transfrontalier. Mme la députée souhaite cependant attirer l'attention de M. le ministre sur une problématique bien précise : les patients français ne peuvent pas, contrairement aux patients espagnols, bénéficier d'un traitement de chimiothérapie dans cet hôpital. Ils doivent pour cela faire le trajet jusqu'à l'hôpital de Perpignan, alors qu'ils en sont très éloignés. Elle l'interroge donc pour savoir où en est la convention de site associée en oncologie qui est à l'étude avec le centre hospitalier de Perpignan et qui permettrait enfin d'assurer les chimiothérapies sur le plateau cerdan.
Réponse en séance, et publiée le 3 avril 2024
HÔPITAL TRANSFRONTALIER DE CERDAGNE
M. le président . La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such, pour exposer sa question, no 726, relative à l'hôpital transfrontalier de Cerdagne.
Mme Sandrine Dogor-Such . L'hôpital transfrontalier de Cerdagne fonctionne depuis 2014. Cogéré par la Généralité de Catalogne et le ministère français de la santé et de la prévention, il prend la forme d'un groupement européen de coopération territoriale (GECT), prévu par la convention du 26 avril 2010, signée par la France, l'Espagne et la Généralité de Catalogne. Situé sur le territoire espagnol, au sein de la commune de Puigcerdà, son personnel est à la fois français et espagnol. Les patients viennent également des deux pays, même si leur prise en charge et les systèmes de santé dont ils dépendent sont différents.
La vocation première de l'hôpital est de fournir des soins médicaux aux habitants vivant de part et d'autre de la vallée de la Cerdagne, soit environ 30 000 habitants qui, jusqu'alors, ne disposaient pas d'un accès facile aux soins.
En raison de sa localisation dans les Pyrénées, à proximité de stations de ski espagnoles et françaises ainsi que de centres de haute performance, l'hôpital de Cerdagne est devenu une référence en matière de médecine sportive et de montagne. Il s'agit également d'un établissement dit MCO – c'est-à-dire pratiquant la médecine, la chirurgie et l'obstétrique de proximité –, doté d'un service d'urgence, d'un centre d'hémodialyse et d'un plateau technique complet.
Il convient de mesurer la réalité d'un hôpital binational en l'absence, à l'échelle européenne, d'un cadre juridique intégré portant sur l'organisation et le fonctionnement de la santé transfrontalière. Le défi actuel est d'améliorer la coordination entre les deux systèmes de santé, ainsi que les relations avec l'ensemble du réseau de soins.
La réglementation sanitaire demeure de la compétence des États et la coopération dans le domaine de la santé a surtout lieu à cet échelon, à l'exception de certaines institutions sanitaires européennes. Ainsi, l'hôpital de Cerdagne, situé en territoire espagnol, obéit non seulement aux règles et dispositions juridiques espagnoles, mais aussi à la réglementation économique et sociale en vigueur en Espagne. Cette situation explique pourquoi l'appropriation de l'hôpital par la partie française s'avère plus compliquée.
De nombreux obstacles liés à l'existence d'une frontière administrative et sanitaire ont dû être résolus depuis le lancement du projet. Citons les formalités liées au transport de corps entre l'Espagne et la France – qui ont été simplifiées grâce au décret n° 2017-1122 du 30 juin 2017 –, les problèmes de carte Vitale pour les nouveau-nés français, ou encore le régime de responsabilité médicale applicable dans un hôpital transfrontalier.
Pour ma part, je souhaite appeler l'attention sur un autre problème bien précis. En effet, contrairement aux patients espagnols, les patients français ne peuvent pas bénéficier d'un traitement de chimiothérapie dans cet hôpital. Deux fois par semaine, ils doivent accomplir un aller-retour de quatre heures jusqu'à l'hôpital de Perpignan. Je souhaite donc savoir où en est la convention de site associé en oncologie, qui est à l'étude avec ce centre hospitalier et qui permettrait d'assurer les chimiothérapies sur le plateau cerdan.
M. le président . La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
M. Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la santé et de la prévention . Vous l'avez dit, l'hôpital transfrontalier de Cerdagne est un cas inédit et intéressant, dans la mesure où il est, à ce jour, le seul exemple de service public hospitalier transfrontalier en Europe – et je sais que sa création inspire des réflexions dans d'autres régions françaises. Couvrant un territoire où vivent 35 000 habitants – jusqu'à 100 000 l'été, compte tenu de la fréquentation touristique –, il assure des soins de court séjour en médecine, en chirurgie et en obstétrique, et possède un service d'urgences qui compte plus de 30 000 passages par an. La prise en charge des patients est assurée grâce à la mise en commun de moyens humains et matériels venant autant de France que d'Espagne. L'hôpital rend ainsi un service de proximité de qualité à une population transfrontalière éloignée des grands centres urbains.
S'agissant des orientations pour des activités de recours, celles-ci sont réglées par des conventions de coopération sanitaire avec les hôpitaux de Perpignan, Montpellier et Toulouse pour les patients français, et vers ceux de Manresa et Barcelone pour les patients espagnols. En effet, l'hôpital de Cerdagne ne bénéficie pas de toutes les autorisations sanitaires, notamment celle relative au traitement du cancer.
Cela étant, comme vous l'avez indiqué, depuis un an, les patients catalans peuvent suivre une chimiothérapie au sein de l'hôpital de Cerdagne, les autorités locales ayant autorisé la préparation de cytotoxiques par la pharmacie de l'établissement.
Pour les patients français, une convention de site associé est à l'étude avec le centre hospitalier de Perpignan. Les primo-prescriptions continueraient d'être réalisées dans cet hôpital, puis les patients suivraient leur traitement complet à l'hôpital de Cerdagne. Un tel accès aux soins de proximité est également envisagé pour les chimiothérapies orales, toujours par le centre hospitalier de Perpignan, qui possède une antenne d'hospitalisation à domicile en Cerdagne française depuis le 1er septembre 2023. Nous espérons concrétiser ces avancées dans le courant de l'année, ce qui éviterait le transport par ambulance des patients cerdans vers l'hôpital de Perpignan.
Plus largement, je me réjouis de constater que ce projet apporte la preuve qu'une coopération sanitaire transfrontalière est possible, avec de la confiance et du pragmatisme.
Auteur : Mme Sandrine Dogor-Such
Type de question : Question orale
Rubrique : Établissements de santé
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mars 2024