FORVIA : il faut sauver les emplois
Question de :
Mme Géraldine Grangier
Doubs (4e circonscription) - Rassemblement National
Mme Géraldine Grangier alerte M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'annonce brutale par le groupe Forvia (ex-Faurecia) de la suppression de 10 000 emplois en Europe d'ici 2028. Sur les 31 sites installés en France, 8 usines Forvia sont situées dans le Nord Franche-Comté. Alors que l'équipementier automobile franco-allemand publie des résultats financiers en hausse pour l'exercice fiscal 2023, Mme la députée s'interroge sur les raisons réelles des telles suppressions de postes. Elle demande à M. le ministre de faire intervenir ses services pour rappeler aux dirigeants de Forvia les règles et justifications nécessaires à la mise en œuvre de tout plan social en France. Enfin, elle lui demande que toute la lumière soit faite sur les obligations et les engagements de Forvia en matière de créations d'emplois dans la mesure où cette multinationale a bénéficié, pour le développement de ses activités, d'importants versements d'argent public et, notamment, de plus de 7 millions d'euros de fonds régionaux.
Réponse en séance, et publiée le 3 avril 2024
SUPPRESSION D'EMPLOIS DANS LES SITES DU GROUPE FORVIA
M. le président . La parole est à Mme Géraldine Grangier, pour exposer sa question, no 731, relative aux emplois dans les sites du groupe Forvia.
Mme Géraldine Grangier . Le pays de Montbéliard, dans le Doubs, dont je suis originaire, est le berceau industriel de l'automobile française, notamment de la marque Peugeot. Avec le passage au tout-électrique, c'est tout un écosystème industriel qui est menacé. Les entreprises sous-traitantes ont dû innover et se diversifier pour ne pas disparaître en 2035, date à laquelle les voitures à moteur thermique ne pourront plus être vendues. C'est le cas de Faurecia, entreprise installée depuis 1975 sur le territoire de la commune de Bavans dans le Doubs.
À la suite de rachats, elle est devenue propriété de PSA en 1997 et s'est hissée parmi les dix premiers équipementiers automobiles mondiaux spécialisés dans l'échappement. Depuis 2021, avec le groupe Hella, Faurecia devient Forvia et compte désormais 160 000 salariés dans une quarantaine de pays, dont 11 000 en France et 3 000 dans le nord de la Franche-Comté.
En développant un pôle de recherche et développement autour de l'hydrogène, Forvia a su prendre un virage industriel et devenir un véritable pôle d'excellence. Alors que l'équipementier a publié des résultats financiers en hausse avec 222 millions d'euros de bénéfices, l'annonce de 10 000 suppressions de postes en Europe inquiète tous les sites français, notamment celui de la branche échappement de Bavans.
La direction affirme qu'elle n'a à ce jour identifié aucun site pour les licenciements et que les suppressions de postes s'opéreront à travers des non-remplacements de salariés partis à la retraite, mais personne n'y croit ! Après une réunion du comité social et économique (CSE) au cours de laquelle aucune de leurs questions n'a reçu de réponses, les syndicats ont exercé leur droit d'alerte économique sur la partie échappement et sur la partie hydrogène la semaine dernière. Ils souhaitent que la direction leur fournisse des explications.
Avec son projet de licenciement, Forvia rassure les marchés boursiers mais menace l'équilibre de tout un territoire économique industriel. Rappelons que l'entreprise a bénéficié de 213 millions d'euros d'aides européennes, de 7,2 millions d'euros de la région Bourgogne-Franche-Comté et qu'en octobre dernier, en présence du secrétaire général pour l'investissement, chargé de France 2030, nous avons inauguré en grande pompe le site Forvia d'Allenjoie, largement subventionné. Quand allez-vous subordonner le versement de l'argent public au maintien des outils de production, du savoir-faire et des emplois sur le territoire français ?
Par ailleurs, j'aimerais savoir ce que le Gouvernement compte faire pour soutenir la filière hydrogène et lui garantir un avenir en France. Porteuse d'espoir, à l'heure des choix contestés en matière de passage au tout-électrique, elle se trouve, elle aussi, gravement menacée.
M. le président . La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement.
Mme Marie Lebec, ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement . Je vous prie de bien vouloir excuser l'absence du ministre délégué chargé de l'industrie et de l'énergie, Roland Lescure, dont vous connaissez l'engagement en faveur de la réindustrialisation de la France. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est très vigilant quant à la situation du groupe Forvia, à la suite des annonces, en février, de la possible suppression de 10 000 emplois en Europe d'ici à 2028.
Le sujet a été évoqué avec plusieurs représentants syndicaux qui ont été reçus ces derniers jours par le ministère, ainsi qu'avec certains membres de la direction. Celle-ci a fait part à plusieurs reprises aux services concernés de sa volonté de clarifier dans les prochains jours les mesures qu'elle compte prendre pour ses sites français. Il ressort de nos discussions qu'elle souhaite privilégier, par rapport aux départs contraints, les départs non contraints, notamment à travers le gel des recrutements et l'attrition naturelle.
Précisons, par ailleurs, que ce redimensionnement ne correspond pas à une volonté de délocalisation de la production mais à une nécessité de réduire la taille de ses effectifs, dans un contexte difficile pour la filière des sous-traitants automobiles dans son ensemble.
L'État veillera toutefois avec la plus grande attention à ce que la réduction du nombre de postes en France corresponde bien à des départs volontaires et que ce processus soit accompagné par les équipes locales afin de s'assurer du respect des règles du droit du travail dans les sites où des réductions de postes seraient annoncées.
M. le président . La parole est à Mme Géraldine Grangier.
Mme Géraldine Grangier . J'insiste sur la nécessité de soumettre les subventions, qui profitent largement à ces entreprises, à certaines conditions comme l'interdiction de délocaliser. Sur le site Forvia de Bavans, les dispositifs de test des moteurs thermiques ont déjà été démontés pour être transférés en Allemagne. Quel sort sera réservé aux ingénieurs qui s'en occupaient ? J'estime les inquiétudes des syndicats fondées, notamment après les déclarations du PDG du groupe, Patrick Koller, selon lesquelles les effectifs affectés à la recherche et développement pourraient être réduits de moitié grâce à l'intelligence artificielle.
Auteur : Mme Géraldine Grangier
Type de question : Question orale
Rubrique : Entreprises
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mars 2024