Question orale n°736 : Urbanisme - PPRT - Quartier des Neiges au Havre

16ème Législature

Question de : M. Jean-Paul Lecoq (Normandie - Gauche démocrate et républicaine - NUPES)

M. Jean-Paul Lecoq alerte M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la problématique des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) en lien avec le rapport de la Cour des comptes sur la « gestion des risques liés aux installations classées pour la protection de l'environnement dans le domaine industriel » (https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/2024-01/20240201-S2023-1508-ICPE-industrielles.pdf, page 30 et annexe 6) et sa réflexion sur les « zones d'effets létaux » liées à des ouvrages d'infrastructures de transport de marchandises dangereuses. La question est en lien avec la PPL n° 3266 de M. le député et avec la question de l'urbanisme dans le quartier des Neiges au Havre.

Réponse en séance, et publiée le 15 mai 2024

QUARTIER DES NEIGES AU HAVRE
Mme la présidente . La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour exposer sa question, no 736, relative au quartier des Neiges au Havre.

M. Jean-Paul Lecoq . Fin 2019, le préfet de la Seine-Maritime a transmis au maire du Havre un porter à connaissance relatif aux « risques technologiques autour des infrastructures de transport de marchandises dangereuses (ITMD) du Grand port maritime du Havre ». Depuis, les 1 800 habitants du quartier des Neiges sont soumis à des restrictions d’urbanisme qui non seulement ne mettent pas en sécurité les habitants exposés aux risques recensés, mais contribuent en plus à la dépréciation de leurs biens – c'est le genre de sujet que vous connaissez bien.

Face à cette situation qui a des répercussions sur la vie actuelle et future dans ce quartier historique du Havre, un travail a été engagé pour réduire le risque à la source. Le stockage de matières dangereuses dans les terminaux portuaires a été réorganisé autant que faire se peut et des études analysent les dangers complémentaires, selon les normes appliquées aux sites Seveso.

Le résultat de ce travail a été présenté aux habitants lors d’une réunion publique organisée le 12 avril dernier. En parallèle de ces démarches, j'avais pris l’initiative de déposer la proposition de loi no 3266 afin que la loi instaurant les plans de prévention des risques technologiques (PPRT) s’applique aux infrastructures de stationnement et de stockage temporaire de matières dangereuses. L’objectif était que les riverains affectés par les études de danger relatives à des ITMD bénéficient de mesures financières permettant une mise en sécurité de leur habitat au même titre que ceux affectés par les études de danger des sites Seveso. Cette proposition de loi, examinée le 17 juin 2021, n’a pas été adoptée.

Dans un rapport consacré aux risques industriels rendu public en février 2024, la Cour des comptes estime pourtant que trop de risques restent ignorés. Elle recommande d’accompagner techniquement et financièrement les communes afin de sécuriser les bâtiments situés en zone de danger, ajoutant que « les ouvrages d’infrastructures de transports de matières dangereuses sont ignorés. » Pour remédier à cette situation, elle recommande « de prévoir des mesures de protection foncière et des travaux pour les zones d’effets létaux qui y sont liées, mais aussi de modifier la législation pour généraliser la mise en place de commissions consultatives analogues aux commissions de suivi de site des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) ».

Grâce à la volonté conjuguée de l’État, des collectivités locales, des industriels faisant naître le risque et des associations de riverains, le PPRT défini sur la zone industrielle du Havre fut, de l’avis unanime, un exemple en matière de mise en sécurité des populations résidant dans les périmètres de danger. Même si la loi ne l’imposait pas, les riverains ont pu bénéficier de la prise en charge intégrale des travaux de mise en sécurité de leur habitat.

Compte tenu de ces éléments et parce qu'il importe de proposer des solutions concrètes aux riverains, je propose qu’un dispositif analogue au PPRT du Havre soit élaboré, sous l’égide de l’État, afin de mettre en sécurité les habitants du quartier des Neiges, situé à seulement 3 kilomètres des habitations bénéficiant des mesures du PPRT.

Je souhaite obtenir votre accord pour missionner M. le préfet de la Seine-Maritime afin qu’il engage ce travail collectif selon les mêmes modalités que celles ayant présidé à l'élaboration du PPRT en vigueur dans la zone industrielle du Havre. Je suggère qu'un projet de loi prenne en compte ce sujet, ou que votre ministère soutienne et enrichisse la proposition de loi que je pourrai alors déposer à nouveau.

Mme la présidente . La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.

M. Patrice Vergriete, ministre délégué chargé des transports . Je vous remercie pour votre question qui évoque des réflexions de la Cour des comptes formulées en marge d'une mission menée en 2022 et 2023 sur le contrôle des installations classées pour la protection de l'environnement. Je salue votre engagement de longue date en faveur de la prévention des risques technologiques.

Permettez-moi de souligner que même si certaines infrastructures de transport de matières dangereuses font l'objet d'études de danger inspirées des ICPE, leur situation n'est pas comparable à celles-ci. Les acteurs impliqués, leurs responsabilités et l'utilisation des résultats des études sont très différents.

En matière de transport de marchandises dangereuses, l'application des règles internationales apporte un haut niveau de sécurité. Cette réglementation, réévaluée tous les deux ans, est au plus près des évolutions techniques. Les matières dangereuses sont conditionnées dans des emballages spéciaux qui résistent aux agressions, aux incendies et à tout ce qui pourrait provoquer leur dispersion dans l'environnement lors du transport. On parle de réduction du risque à la source. Pour cette raison, la probabilité d'accident grave est plus faible que dans les installations industrielles où ces matières sont produites, manipulées ou utilisées.

Cependant, ces accidents très improbables font l'objet d'études de danger au niveau des principales infrastructures de transport. Elles peuvent déboucher sur des mesures ad hoc d'exploitation de l'infrastructure, ce qui permet de réduire encore les risques. Enfin, dans un esprit de responsabilité, le préfet peut proposer de limiter l'urbanisation future en raison des risques présentés par ces installations. Ce sont les porter à connaissance, éléments forts de notre politique de prévention.

Mme la présidente . La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.

M. Jean-Paul Lecoq . Je maintiens qu'il y a un sujet. Alors que nous avons connaissance d'un danger de surpression – une explosion, pour le dire plus vulgairement – et que nous avons la possibilité d'en protéger la population, la prise en charge d'un même risque, entraînant les mêmes conséquences pour les riverains, diffère en fonction de son origine : dans un cas, on finance des infrastructures, comme un changement de fenêtres ; dans l'autre, on ne le fait pas, au seul motif qu'il s'agit de stockage de matières dangereuses. Il y a bien un problème d'égalité des citoyens devant le risque. Nous parlions tout à l'heure d'acceptabilité du risque : c'est un sujet que nous connaissons bien, dans le territoire havrais, et nous sommes prêts à expérimenter certaines solutions, comme je vous le propose, parce que nous avons envie que notre grand port maritime continue de vivre. Nous avons seulement besoin d'être accompagnés, monsieur le ministre.

Données clés

Auteur : M. Jean-Paul Lecoq (Normandie - Gauche démocrate et républicaine - NUPES)

Type de question : Question orale

Rubrique : Urbanisme

Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires

Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 mai 2024

partager