Question orale n° 765 :
Réouverture de la rive droite du Rhône aux trains de voyageurs

16e Législature

Question de : M. Hervé Saulignac
Ardèche (1re circonscription) - Socialistes et apparentés

M. Hervé Saulignac appelle l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, sur la réouverture de la rive droite du Rhône au transport ferré de voyageurs. En 2023, les Ardéchois ont pu célébrer un anniversaire peu commun : le cinquantenaire de l'abandon du service public de transports dans leur département. Car, depuis le mois d'août 1973, l'Ardèche n'est plus desservie en transport ferré de voyageurs. Mais, pour la première fois en 50 ans, un projet de réouverture de la rive droite du Rhône au transport ferré de voyageurs recueille pourtant le large assentiment de la population et de l'ensemble des élus locaux, en témoigne le compromis négocié entre les régions AURA et Occitanie qui se sont engagées mutuellement à rouvrir la gare du Teil (07) dans le cadre d'une prolongation de la ligne occitane Nîmes-Pont Saint Esprit jusqu'à Valence. Les financements sont prêts, la gare existe et pourtant le projet, qui programmait une ouverture pour 2020, ne cesse d'être retardé. Après les difficiles négociations financières, c'est désormais l'autorité environnementale qui retarde de deux ans au moins la réalisation de cette opération par l'exigence d'une étude 4 saisons sur l'ensemble de la rive droite, laquelle vient d'être lancée. Une étude présentée comme indispensable alors même que l'impact d'un tel projet sera minime : la gare du Teil n'a jamais été désaffectée, sa réouverture ne modifiera pas le nombre de trains empruntant quotidiennement la rive droite et le seul aménagement nécessaire consiste en l'extension provisoire d'un quai de 166 mètres afin de sécuriser la gare. Cette décision est un non-sens, à rebours des enjeux écologiques qui justifieraient au contraire un soutien accru au transport ferroviaire et qui fait fi de la situation locale : en gare du Teil, les trains occitans circulent, se retournent et repartent à vide, sans que les Ardéchois ne soient autorisés à embarquer. L'État peut aujourd'hui reprendre la main sur ce dossier et enfin corriger une insupportable injustice territoriale : les Ardéchois payent des impôts, au même titre que leurs concitoyens, mais, de blocages en renoncements, ils désespèrent de pouvoir bénéficier un jour du même niveau de service public que leurs voisins. Car le sujet ne s'arrête pas à la seule gare du Teil, mais couvre bien l'intégralité de la rive droite ardéchoise. En 2020, la région AURA a ainsi signé un protocole d'accord avec la SNCF pour une réouverture de la portion Le Teil-Romans avec la desserte d'au moins 3 gares ardéchoises (Le Teil, Cruas, Le Pouzin). À ce jour, ce dossier reste suspendu à un accord avec l'État pour son financement. Dans son discours de politique générale, le Premier ministre s'engageait à l'action et à la levée des blocages bureaucratiques. Dès lors, il lui demande s'il entend, d'une part, accorder une dérogation qui permette aux Ardéchois de prendre le train en gare du Teil pendant la durée de l'étude et, d'autre part, s'engager à une réouverture globale et pérenne de la rive droite du Rhône au transport ferré de voyageurs.

Réponse en séance, et publiée le 15 mai 2024

TRANSPORT FERRÉ SUR LA RIVE DROITE DU RHÔNE
Mme la présidente . La parole est à M. Hervé Saulignac, pour exposer sa question, no 765, relative au transport ferré sur la rive droite du Rhône.

M. Hervé Saulignac . En 2023, en Ardèche, nous avons célébré un anniversaire peu commun : celui de la fin du service public de transport. Les trains de voyageurs ont en effet quitté l’Ardèche en août 1973 ; je suis venu vous demander leur retour.

Cette hypothèse est à notre portée, comme en témoigne le compromis conclu entre les régions Auvergne-Rhône-Alpes (Aura) et Occitanie : il prévoit notamment la réouverture de la gare du Teil dans le cadre de la prolongation jusqu’à Valence de la ligne occitane qui arrive de Nîmes.

Les financements sont prêts, la gare existe, et pourtant le projet ne cesse d’être reporté. Après des négociations financières difficiles, c’est désormais l’Autorité environnementale qui retarde cette opération en exigeant une étude faune-flore sur quatre saisons sur l'ensemble de la rive droite du Rhône – étonnant, quand on sait que l'impact de la réouverture sera négligeable, la gare n’ayant jamais été désaffectée, et que le seul aménagement nécessaire consiste en l’extension d’un quai pour la sécuriser !

Cette demande d’étude est donc absurde : elle nous fait perdre du temps alors que l'urgence écologique commande d'aller vite. Elle est d’autant plus absurde que les trains sont là : ils arrivent en gare du Teil, se retournent et repartent à vide, sans que les Ardéchois puissent monter à bord. Si cela n'est pas de l'humiliation, cela y ressemble.

L’État peut reprendre la main sur ce dossier, rouvrir très facilement la gare du Teil et mettre en œuvre le protocole d'accord signé par la région Aura et la SNCF en 2020 pour une réouverture de la ligne jusqu'à Romans-sur-Isère, assurant la desserte d’au moins trois gares ardéchoises – Le Teil, Cruas et Le Pouzin.

Dans son discours de politique générale, le Premier ministre s'était engagé à lever les blocages bureaucratiques. Dans ce même esprit, je vous demande d'accorder une dérogation qui permette aux Ardéchois de prendre le train en gare du Teil pendant la durée de l’étude, d’une part, et de vous engager à une réouverture globale et pérenne du transport ferré de voyageurs sur la rive droite du Rhône, d'autre part.

Mme la présidente . La parole est à M. le secrétaire d'Etat chargé de la mer et de la biodiversité.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer et de la biodiversité . En l'absence de Patrice Vergriete, je vous lirai sa réponse.

Comme vous le savez, l'État fait une priorité du financement de la régénération des lignes existantes, dont les besoins de financement sont très importants à l'échelle nationale, tout particulièrement en Auvergne-Rhône-Alpes.

Les études concernant le projet de réouverture de la ligne de la rive droite du Rhône, qui inclut la réouverture de trois gares en Ardèche, dont celle du Teil, pourraient relever d'un financement par la région, à laquelle il revient de décider, en tant qu'autorité organisatrice du train express régional (TER), si elle envisage une telle desserte. L'étude devrait tenir compte de l'importance majeure de cette ligne pour le fret ferroviaire.

Après la mise en service de la première portion, en Occitanie, fin août 2022, la gare du Teil n'est utilisée que comme point de retournement des trains, en l'absence d'aménagement ad hoc de la gare. La ligne et les gares ne sont en effet pas sécurisées pour le trafic de voyageurs. La desserte de cette gare suppose que les aménagements nécessaires soient financés par les acteurs concernés en Auvergne-Rhône-Alpes, et que les procédures réglementaires soient respectées.

L'État demeure, en tout état de cause, très attentif à l'avancement du dossier. Il jouera, si besoin, un rôle de facilitateur, comme il l'a fait lors de la première phase de réouverture, en Occitanie. Cela a permis de gagner plus d'une année par rapport à la date de mise en service initialement prévue, sans déroger aux impératifs environnementaux ou en matière de sécurité, notamment s'agissant des passages à niveau, dont vous comprendrez parfaitement le bien-fondé.

La décision de rouvrir la gare du Teil à la desserte de voyageurs depuis Nîmes et Avignon relèvera ensuite des régions, autorités organisatrices du TER, comme vous le savez. En vertu du principe de libre administration des collectivités territoriales, l'État n'interviendra pas dans ces choix.

Je me tiens à votre entière disposition, ainsi que le ministre Patrice Vergriete, et je vous remercie pour votre attention constante au sujet de la mobilité et de la desserte de nos magnifiques territoires.

Mme la présidente . La parole est à M. Hervé Saulignac.

M. Hervé Saulignac . Je vous confirme mon attention constante. J'ai bien noté que l'État jouerait, si besoin, son rôle de facilitateur : le besoin est là, je vous l'assure. Ma question portait sur deux sujets : la réouverture de la ligne de la rive droite du Rhône, dont je concède qu'elle nécessite encore des études et des discussions ; et la réouverture d'une gare accueillant déjà des trains, qui pourrait déjà constituer une première étape.

La sécurisation que vous avez évoquée a été étudiée et est désormais financée. Il s'agit de prolonger un quai de 166 mètres pour s'assurer que les voyageurs puissent fréquenter cette gare dans toutes les conditions de sécurité requises. Or, l'Autorité environnementale exige, pour des raisons que personne ne comprend, une étude faune-flore quatre saisons qui porte sur l'ensemble du sillon, alors que nous voulons simplement permettre à des voyageurs de monter dans un train qui s'arrête chez eux.

Je vous le redis avec conviction : je demande à ce que l'État joue son rôle de facilitateur en intervenant auprès de l'Autorité environnementale – ce n'est pas un interlocuteur difficile à joindre pour l'État – et en accordant, comme cela a déjà été fait par le passé, une dérogation qui permette aux voyageurs de monter dans le train en gare du Teil pendant la durée de cette étude incompréhensible.

Les deux régions, Auvergne-Rhône-Alpes et Occitanie, ont conclu une convention. Nous sommes dans une absurdie bureaucratique totale : des trains arrivent et repartent à vide sans que les voyageurs puissent y monter. Que l'État joue donc son rôle de facilitateur !

Mme la présidente . La parole est à M. le secrétaire d'état.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État . C'est noté s'agissant du rôle de facilitateur. Je suis cependant particulièrement attentif à l'enjeu de la sécurité. Or à l'heure actuelle, la gare ne comporte pas les éléments de sécurité qui permettraient aux voyageurs de pouvoir monter – c'est très important, vous le savez. S'il y avait un accident, c'est vers nous que l'on se retournerait. Cela doit être pris en compte dans la discussion.

Données clés

Auteur : M. Hervé Saulignac

Type de question : Question orale

Rubrique : Transports ferroviaires

Ministère interrogé : Transports

Ministère répondant : Transports

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 mai 2024

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