Question écrite n°770 : Mesures pour améliorer et rendre plus efficiente la lutte contre les incendies

16ème Législature

Question de : M. André Chassaigne (Auvergne-Rhône-Alpes - Gauche démocrate et républicaine - NUPES)

M. André Chassaigne interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur les mesures à prendre pour améliorer et rendre plus efficiente la lutte contre les incendies. L'accroissement du réchauffement climatique se traduit par un déficit pluviométrique chronique, une sécheresse des sols, une raréfaction de l'eau de surface, des températures extrêmes, un taux d'humidité de l'air très bas et parfois par des vents tourbillonnants. Ces conditions, couplées aux actions volontaires ou involontaires des activités humaines et au manque d'entretien des massifs forestiers, génèrent en été et même en intersaison, et sur des régions auparavant épargnées, des incendies de plus en plus fréquents, violents et destructeurs. Associés à l'indispensable travail au sol des équipes de sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, les largages d'eau par voie aérienne sont particulièrement efficaces. Au regard de l'amplification des incendies et de l'importance d'une intervention rapide et puissante, la flotte actuelle des avions de lutte contre les incendies a besoin d'être encore renforcée, avec une plus grande disponibilité d'appareils, ce qui nécessite d'en acheter de nouveaux, mais aussi l'adaptation d'aéronefs existants. La ligne de fabrication des Canadairs, suspendue depuis des années, devrait être relancée par un niveau de commandes désormais suffisant du nouveau modèle DHC-515, passées par plusieurs pays européens et dans le cadre de rescUE, qui consiste à accumuler des matériels à travers le territoire européen en prévention de la survenance de situations d'urgences. Cependant, les livraisons de ces matériels ne sont pas attendues avant 2026, alors que les Canadairs actuels CL-415 sont victimes de pannes récurrentes ou vont atteindre leur limite d'âge. La flotte est aussi constituée de 7 Dash-8 plus récents et plus rapides mais qui doivent faire le plein au sol. Parallèlement, Airbus vient de tester avec succès des largages d'eau par des A400M modifiés en équipant les soutes de ces avions de transport de réserves d'eau amovibles. L'armée française dispose aujourd'hui de 19 de ces avions militaires ultra-modernes et puissants, pouvant voler plus bas, à vitesse plus faible et de nuit, avec une capacité de largage de 20 000 litres, 3 fois supérieure au Canadair. Par contre, ces appareils doivent se ravitailler au sol, un dispositif spécial pouvant permettre de les remplir en quelques minutes seulement. Des A400M équipés d'un kit interchangeable pourraient être utilisés dès 2023 si les autres essais de sécurité sont concluants et selon les disponibilités des armées. Au regard des incendies dramatiques de cet été 2022 dans des régions qui étaient aujourd'hui plutôt épargnées, comme en Nouvelle-Aquitaine, un état des lieux des bases aériennes et autres espaces pouvant permettre la pose d'A400M est indispensable pour qu'ils puissent être activés quand les risques d'incendies alentour sont importants. En effet, les chances de stopper un départ de feu sont directement liées à la rapidité et à la puissance de l'intervention, surtout aérienne. Il lui demande de l'informer sur les décisions qu'il compte prendre pour accroître durablement et rapidement le nombre, la disponibilité et la capacité opérationnelle en région de la flotte des avions de lutte contre les incendies.

Réponse publiée le 27 décembre 2022

La saison feux de forêt 2022 fait d'ores et déjà partie des 3 saisons les plus importantes en termes de sollicitation des moyens aériens (après 2003 et 2017) sur ces 20 dernières années. La flotte aérienne, dimensionnée au regard de l'activité moyenne constatée ces dernières années, doit donc être revue à la hausse. Le groupement des moyens aériens (GMA) de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) met tout en œuvre pour améliorer et rendre plus efficiente la lutte contre les incendies. Le GMA dédie 450 personnels à l'utilisation, à l'entretien et au fonctionnement des 22 avions du groupement d'avions de la sécurité civile (GASC) et des 35 hélicoptères du groupement d'hélicoptères de la sécurité civile (GHSC). Le GMA s'attèle à l'anticipation des besoins et moyens aériens ce qui comprend la prise en compte de l'amortissement et de l'entretien des flottes. Concernant l'avenir de la flotte des Canadairs, il est prévu d'atteindre une cible de 16 appareils, dans un premier temps par un complément d'appareils, puis par le renouvellement complet de la flotte existante. Le 7 mai 2020, la DGSCGC a demandé le lancement d'un marché d'acquisition de 2 DHC515 (future déclinaison du CL415) cofinancés par le programme RescUE de la Commission européenne. Au terme d'un long processus entre les 6 pays candidats (France, Espagne, Italie, Croatie, Grèce, Portugal), la DG ECHO de la Commission et la société Viking (désormais De Havilland Canada), le lancement de la chaîne de production a été officiellement annoncé le 31 mars 2022, sécurisant ainsi le programme avec 22 commandes. 90 % des coûts d'acquisition de 2 appareils par pays seront couverts par la DG ECHO, soit 12 appareils (2 pour la France) ; les 10 supplémentaires seront à la charge de chaque pays acquéreur. Grâce au fait que la France ait été le premier pays à avoir contracté une subvention GRANT avec la Commission européenne, elle est prioritaire dans le calendrier de livraison des appareils. Selon les prévisions les plus optimistes, le premier avion français serait attendu en 2026, le deuxième en 2027. L'estimation des coûts est particulièrement difficile à ce stade puisque l'on ne peut connaître à l'avance le prix final après négociation. L'ordre de grandeur se monte aujourd'hui à 55 millions d'euros TTC par avion, soit 110 millions d'euros TTC au total avec les hausses économiques pour les deux premiers appareils. Ce marché d'acquisition prévoira, une possibilité d'acquisition en fond propre pour la France de 2 appareils. Par ailleurs, le Président de la République a acté le renouvellement des 12 canadairs et l'augmentation de la flotte pour la porter à 16 appareils incluant les deux acquis avec la Commission. Afin de pouvoir passer les marchés au plus vite et donc d'être livré assez rapidement après les deux premiers, les autorisations d'engagement sont prévues dès le projet de loi de finances 2023. La flotte des Dash, initialement composée de 2 avions en 1995, a connu une évolution majeure en janvier 2018 avec la notification d'un marché passé par la Direction Générale de l'Armement (DGA) au profit de la DGSCGC pour l'acquisition de 6 appareils neufs supplémentaires aux capacités multi rôles améliorées. Le dernier avion sera livré au 1er semestre 2023. L'action des Dash, complémentaire à celle des Canadair, est dimensionnante pour parvenir à maîtriser et contenir les feux, notamment par le dépôt de retardant comme cela s'est vu durant l'été. De manière très complémentaire, la DGSCGC emploie depuis 2020 lors de la saison feux de forêt, 2 hélicoptères bombardiers d'eau d'une capacité de largage de 4 tonnes, loués à une société privée. Par ailleurs, devant l'ampleur des feux de l'été dernier, la DGSCGC a réquisitionné jusqu'à 8 hélicoptères supplémentaires. En outre, elle étudie la possibilité d'acquisition de 2 hélicoptères lourds multirôles (capacité de 4000 litres en bombardier d'eau) dans le cadre du programme RescUE. Les locations d'hélicoptères seront poursuivies et complétées à l'été 2023. Par ailleurs, le renouvellement de la flotte d'hélicoptères prévu dans la LOPMI, permettra de disposer à terme d'une capacité de largage de 800 à 1000 litres grâce à la puissance accrue de ces nouveaux appareils. Ils seront déployés dans les départements disposant d'une base hélicoptère. Ces hélicoptères devraient disposer à terme d'une capacité de travail de nuit pour le largage d'eau. La souplesse de l'organisation opérationnelle actuelle permet de s'adapter aux besoins et d'organiser des détachements opérationnels sur des sites identifiés en fonction de l'analyse des risques. Ainsi, il est pour cela nécessaire de disposer d'outil d'analyse des risques uniformes sur tout le territoire y compris dans les secteurs géographiques jusqu'alors moins habitués à la gestion des risques feux de forêt. Cette analyse uniforme permettra alors une meilleure gestion et répartition des moyens nationaux (à la fois aériens mais également terrestres). Enfin, concernant les moyens aériens disponibles sur le marché en terme de capacité de bombardement d'eau, la direction générale de la sécurité civile rencontre régulièrement les industriels travaillant sur le développement de tels aéronefs. De nombreuses expérimentations sont en cours (ex de l'A400 M) et de nombreux projets sont envisagés, mais ne seront pas commercialisées d'ici l'été 2023. La DGSCGC mènera cependant dans les prochains mois une étude approfondie sur ces nouvelles capacités, afin d'en étudier leur opérationnalité et efficacité.

Données clés

Auteur : M. André Chassaigne (Auvergne-Rhône-Alpes - Gauche démocrate et républicaine - NUPES)

Type de question : Question écrite

Rubrique : Sécurité des biens et des personnes

Ministère interrogé : Intérieur et outre-mer

Ministère répondant : Intérieur et outre-mer

Dates :
Question publiée le 9 août 2022
Réponse publiée le 27 décembre 2022

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