Question orale n° 771 :
Action des pouvoirs public face aux espèces potentiellement invasives

16e Législature

Question de : M. Benjamin Lucas-Lundy
Yvelines (8e circonscription) - Écologiste - NUPES

M. Benjamin Lucas-Lundy attire l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur le danger que représente le manque d'action, d'anticipation et de coordination des pouvoirs publics face aux espèces invasives. Ces espèces invasives sont une menace écologique et économique. Ainsi, la prédation des abeilles par le Vespa velutina nigrithorax engendre une baisse significative de leur nombre, freinant leur rôle de pollinisation. Sur les 107 principaux types de culture dans le monde, 91 dépendent de la zoogamie (pollinisation par l'intermédiaire d'animaux). Les insectes pollinisateurs sont donc essentiels. Parmi eux, les abeilles sont responsables de la moitié de la pollinisation des cultures. Le Vespa velutina nigrithorax étant un prédateur des abeilles, sa présence menace le tissu économique agricole du pays avec une baisse de la production de miel, mais aussi une baisse de la productivité (fruitière essentiellement) et une baisse qualitative des productions agricoles alors qu'en France, la production agricole dépendant des insectes pollinisateurs est estimée à une fourchette de 2,3 milliards à 5,3 milliards d'euros par an. Si Vespa velutina nigrithorax, présent sur la liste des espèces exotiques envahissantes préoccupantes pour l'Union européenne publiée en 2016, incarne les dangers écologiques et économiques des espèces invasives, celles-ci sont une menace globale, aggravée par le dérèglement climatique. Les invasions biologiques sont la deuxième cause d'extinction d'espèces sur la planète tout en sapant certains pans de l'économie et constituant une menace sanitaire : ver du cotonnier, fourmi de feu, moustique tigre... Le coût mondial des invasions biologiques est estimé à 1 288 milliards de dollars entre 1970 et 2017. Il lui demande donc quelle stratégie d'anticipation des pouvoirs publics est mise en place pour prévenir l'arrivée de nouvelles espèces potentiellement invasives, telles que les Vespa orientalis ou Vespa mandarinia, absentes pour l'instant du territoire et quelle montée en puissance des cadres de coordination et des moyens des acteurs publics pour faire face aux espèces déjà présentes est prévue.

Réponse en séance, et publiée le 29 mai 2024

LUTTE CONTRE LES ESPÈCES INVASIVES
Mme la présidente . La parole est à M. Benjamin Lucas-Lundy, pour exposer sa question, no 771, relative à la lutte contre les espèces invasives.

M. Benjamin Lucas-Lundy . Je souhaite alerter le Gouvernement sur le danger que représente le manque d’action, d’anticipation et de coordination des pouvoirs publics face aux espèces invasives.

Avec cette question, je me fais l’écho de plusieurs apiculteurs professionnels ou amateurs que j'ai rencontrés, notamment Benoît Carpentier, dans la Somme, que je veux remercier pour son éclairage sur le sujet.

Les espèces invasives représentent une menace écologique et économique. Ainsi, la prédation des abeilles par le Vespa velutina nigrithorax entraîne une baisse significative de leur nombre, freinant leur activité de pollinisation.

Or, sur les 107 principaux types de culture dans le monde, 91 dépendent de la zoogamie, c’est-à-dire de la pollinisation par l’intermédiaire d’animaux. Les insectes pollinisateurs sont essentiels. Parmi eux, les abeilles sont responsables de la moitié de la pollinisation des cultures.

Le frelon dit asiatique étant un prédateur des abeilles, sa présence menace le tissu économique agricole du pays, puisqu'il est à l'origine d'une baisse de la production de miel, mais aussi de la productivité – fruitière essentiellement –, ainsi que d'une baisse qualitative des productions agricoles. Je rappelle qu’en France, la production agricole dépendant des insectes pollinisateurs est estimée entre 2,3 milliards et 5,3 milliards par an.

Si le Vespa velutina nigrithorax, présent sur la liste des espèces exotiques envahissantes préoccupantes pour l’Union européenne depuis 2016, incarne les dangers écologiques et économiques des espèces invasives, celles-ci constituent une menace globale, aggravée par le dérèglement climatique.

Les invasions biologiques, qui représentent la deuxième cause d’extinction d’espèces sur notre planète, sapent des pans entiers de l’économie et constituent une menace sanitaire – c'est le cas du ver du cotonnier, de la fourmi de feu ou encore du moustique tigre. Le coût mondial des invasions biologiques est estimé à 1 288 milliards de dollars pour la période comprise entre 1970 et 2017.

Madame la ministre, pouvez-vous me préciser quelle stratégie d’anticipation des pouvoirs publics est prévue pour prévenir l’arrivée de nouvelles espèces potentiellement invasives, telles que le Vespa orientalis ou le Vespa mandarinia, absentes pour l’instant de notre territoire ? Par ailleurs, dans quelle mesure les cadres de coordination et les moyens des acteurs publics connaîtront-ils une montée en puissance pour faire face aux espèces déjà présentes ?

Mme la présidente . La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté.

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la ville et de la citoyenneté . Les espèces exotiques envahissantes sont, comme vous l'avez rappelé, une des causes d’érosion de la biodiversité. Les différents vecteurs d’introduction sur le territoire national sont liés à l’intensification des échanges mondiaux – ce qui ne surprendra personne –, mais aussi, bien sûr, aux changements climatiques.

Par ailleurs, le commerce d’espèces animales et végétales favorise l’introduction de nouvelles espèces et de leurs pathogènes associés, dont les impacts sont non seulement environnementaux, mais également économiques et sanitaires.

La réglementation européenne et nationale en la matière interdit, à partir du moment où une espèce est réglementée, son importation, sa détention, son transport, sa production ou sa commercialisation. Les éventuels stocks commerciaux résiduels doivent être soit éliminés, soit cédés à des établissements spécialisés. À ce jour, aux quatre-vingt-huit espèces réglementées au niveau européen s’ajoutent six espèces réglementées uniquement en métropole, dont le frelon oriental.

Afin de prendre en considération les menaces émergentes, la liste des espèces exotiques envahissantes évolue constamment. La Commission européenne prépare ainsi une révision incluant le frelon géant japonais. La France appuiera cette proposition afin de pouvoir agir rapidement.

En complément, le Gouvernement déploie plusieurs actions : une stratégie nationale spécifique, élaborée en 2017 ; un plan d’action concernant les voies d’introduction, établi en 2022 ; plus récemment, la stratégie nationale pour la biodiversité 2023-2030. Cette dernière comprend une mesure spécifique relative aux espèces exotiques envahissantes. De surcroît, le plan « pollinisateurs » 2021-2026 décidé par le Gouvernement prévoit des mesures visant les espèces exotiques envahissantes, plus particulièrement le frelon asiatique. Le fonds Vert permet de financer des actions de gestion, d’animation et de sensibilisation d’acteurs locaux ainsi que des projets de recherche et d'innovation. Enfin, les filières professionnelles sont invitées à établir des codes de gouvernance pour lutter contre le développement des espèces envahissantes.

S'agissant plus spécifiquement du frelon asiatique, le Sénat a récemment adopté, avec le soutien du Gouvernement, une proposition de loi visant à établir un plan national de lutte, décliné au niveau départemental. Il constitue selon nous un outil de lutte et de coordination très intéressant qui doit néanmoins, pour être plus efficace, s’appuyer sur un financement multipartite et un pilotage rassemblant l’ensemble des acteurs concernés sur nos territoires.

Données clés

Auteur : M. Benjamin Lucas-Lundy

Type de question : Question orale

Rubrique : Animaux

Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires

Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 mai 2024

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