Situation de la MLF
Question de :
M. Stéphane Vojetta
Français établis hors de France (5e circonscription) - Renaissance
M. Stéphane Vojetta attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger, sur la situation de la Mission laïque française (MLF). La MLF en tant qu'acteur majeur de l'éducation française à l'étranger, est confrontée à des défis financiers menaçant sa capacité à maintenir la qualité de ses services éducatifs. Des annonces récentes ont signalé une augmentation importante des frais de scolarité dans tous les établissements gérés par la MLF en Espagne. Dans ce contexte, M. le député souhaite obtenir des éclaircissements sur les mesures prises pour évaluer la situation financière actuelle et prévisionnelle de la MLF. Il lui demande si un audit exhaustif a été réalisé afin d'examiner toutes les solutions possibles et de minimiser l'impact sur les familles et les établissements. De plus, il souhaite savoir dans quelle mesure l'aide financière envisagée pourra soulager les parents face à cette augmentation des frais de scolarité.
Réponse en séance, et publiée le 29 mai 2024
MISSION LAÏQUE FRANÇAISE
Mme la présidente . La parole est à M. Stéphane Vojetta, pour exposer sa question, no 790, relative aux établissements scolaires de la Mission laïque française en Espagne.
M. Stéphane Vojetta . Le réseau d'enseignement français à l’étranger scolarise 400 000 élèves, dont un tiers est français. Chaque famille paye en moyenne 8 000 euros par an et par enfant pour avoir le privilège de le scolariser dans le système d'enseignement public français.
Pour ces familles, il s'agit d'un investissement et, parfois, d'un sacrifice, qui démontrent leur attachement à la France et leur confiance dans notre système d'enseignement à l'étranger.
En Espagne, cette confiance est mise à mal. Dix de nos vingt-trois établissements y sont gérés par la Mission laïque française (MLF), association régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, et ont été soumis à des décisions de la MLF qui ont provoqué une crise de confiance parmi les familles et les communautés éducatives concernées.
D’abord, ce fut l'annonce sans concertation préalable du déconventionnement du lycée Molière de Villanueva et du lycée français d’Alicante. Puis, récemment, l'annonce, à nouveau brutalement assénée aux parents d'élèves, d’augmentations, allant de 10 à 20 %, des frais de scolarité dans les dix établissements de la MLF en Espagne.
L'association les justifie par un prétendu risque de cessation de paiements alors que ses comptes, audités, disposent de 80 millions d’euros de fonds propres et qu'aucun avertissement n'a été émis.
À Alicante, Las Palmas, Murcie, Palma, Reus, Saragosse, Séville, Tenerife, Valladolid et Villanueva, c’est la consternation. Les familles, déjà soumises à rude épreuve par l’inflation, encaissent un nouveau choc. Surtout, elles perdent toute visibilité sur la trajectoire à moyen terme des frais de scolarité, voire sur la viabilité de ces établissements. De nombreuses familles envisagent désormais de les quitter et il est urgent de les rassurer.
Face au manque de transparence et à une gestion marquée par l’absence de dialogue et de concertation, j'ai formulé plusieurs demandes, reprises par les élus des Français de l'étranger et par les représentants des parents d'élèves.
Il faut un audit financier qui clarifie les marges de manœuvre actuelles et prévisionnelles de la MLF et propose des alternatives pour épargner aux familles ces augmentations brutales.
En outre, un changement radical de la gouvernance de la MLF est nécessaire. Il faut notamment lui imposer une obligation de transparence et de concertation avec les élus, les parents et les services de coopération et d'action culturelle de nos ambassades.
Où en sont ces demandes légitimes ?
Mme la présidente . La parole est à Mme la ministre déléguée à l'agriculture et à la souveraineté alimentaire.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée à l'agriculture et à la souveraineté alimentaire . Le ministre de l’Europe et des affaires étrangères ne pouvant être présent, il me charge de vous répondre. Le réseau des établissements français dans le monde participe au rayonnement de notre modèle éducatif et à l'influence de la France. Les établissements de la Mission laïque française y contribuent pleinement puisque ses élèves représentent un cinquième des effectifs du réseau de l’enseignement français à l’étranger.
L’action de la MLF s’inscrit d’ailleurs dans une longue histoire ; c'est un partenaire primordial qu'il nous tient à cœur de préserver.
Le ministère de l’Europe et des affaires étrangères a pleinement conscience de la situation financière délicate dans laquelle se trouve l’association. L’État la soutient – il a accepté le report du paiement de la contribution due à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) pour 2024.
Nous serons également attentifs au plan de redressement qui permettra à la Mission de sortir de cette situation. Enfin, l’accord-cadre entre la MLF et l’AEFE sera repensé.
L’audit interne mené par les services financiers de la Mission a permis de formuler des recommandations, présentées lors du conseil d’administration de janvier dernier. Des efforts sont nécessaires, avec une priorité pour les établissements de la zone Europe, qui rencontrent les plus grandes difficultés à l’échelle du réseau.
Le plan de redressement adopté par l'association est une nécessité, au vu des comptes qu'elle a publiés avant son assemblée générale de février 2024. Ces efforts sont la condition de la pérennité de l’association et de ses établissements.
La MLF étant une association indépendante, le calcul interne du redressement opéré sur les établissements européens lui revient entièrement, mais tout a été fait pour que la hausse des frais de scolarité soit limitée et pour que l’impact sur les familles soit le plus modéré possible.
Soyez certains que le ministre suit, et suivra, la situation avec la plus grande attention.
Mme la présidente . La parole est à M. Stéphane Vojetta.
M. Stéphane Vojetta . Vous avez raison, la Mission laïque française est un partenaire essentiel et une association indépendante. Mais elle bénéficie de 500 agents détachés de l'éducation nationale et de plus de 15 millions d'euros de financements publics. Elle a signé un accord-cadre avec l'AEFE et ses élèves bénéficient également du système de bourses scolaires, financé par le contribuable français. Il est donc légitime que la représentation nationale exige un droit de regard accru sur la gestion de ce prestataire, en charge d'une mission de service public essentielle pour ses utilisateurs.
Je me réjouis que le ministère ait répondu à ma demande d'audit de la situation financière, mais un audit interne n'est pas suffisant.
Il faut transformer la gouvernance de la MLF : les ministères et l'AEFE doivent disposer d'un droit de regard ; les associations de parents d'élèves et les représentants des employés du réseau doivent participer à la prise de décisions, qui doit être concertée.
Je vous encourage à travailler non seulement sur le plan de sauvetage de la Mission à moyen terme, mais surtout à la remise à plat de sa gouvernance pour aboutir à un travail en symbiose au sein de cet écosystème.
Auteur : M. Stéphane Vojetta
Type de question : Question orale
Rubrique : Français de l'étranger
Ministère interrogé : Commerce extérieur, attractivité, francophonie et Français de l’étranger
Ministère répondant : Commerce extérieur, attractivité, francophonie et Français de l’étranger
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 mai 2024