16ème législature

Question N° 848
de M. Sébastien Jumel (Gauche démocrate et républicaine - NUPES - Seine-Maritime )
Question écrite
Ministère interrogé > Éducation nationale et jeunesse
Ministère attributaire > Éducation nationale et jeunesse

Rubrique > enseignement

Titre > Situation de l'enseignement de l'allemand

Question publiée au JO le : 16/08/2022 page : 3799
Réponse publiée au JO le : 25/10/2022 page : 4905

Texte de la question

M. Sébastien Jumel alerte M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la situation de l'enseignement de l'allemand en France. À quelques mois des soixante ans de la célébration de l'amitié franco-allemande, des classes de germanistes ferment faute de professeurs ou d'élèves partout sur le territoire. La rentrée s'annonce particulièrement compliquée. À l'instar d'un très grand nombre de discipline de l'enseignement secondaire, le nombre d'admis au concours de professeur d'allemand est très largement inférieur au nombre de postes ouverts. En 2021 par exemple, au Capes d'allemand, 156 candidats ont été admis alors que 222 postes étaient ouverts. Un phénomène qui devrait se poursuivre encore cette année, puisqu'au Capes d'allemand, seuls 83 candidats sont admissibles pour 215 postes ouverts, conduisant à ce que 72 % des postes ne soient pas pourvus, soit 155 enseignants manquants. Cette situation n'est malheureusement pas nouvelle : en seize ans, l'allemand a perdu près de 3 500 enseignants. En effet, on compte aujourd'hui environ 6 500 professeurs d'allemand en France contre plus de 10 000 en 2006. De mauvaises rémunérations, des départs à la retraite massifs ont contribué à affaiblir la discipline et l'attractivité du professorat en allemand. Ainsi en septembre 2022, comme depuis de nombreuses années, il faudra recourir à des vacataires ou contractuels. La coopération franco-allemande est pourtant un enjeu central : le 22 janvier 2023, on célébrera le soixantième anniversaire du traité de l'Elysée, traité de réconciliation et de coopération entre la France et l'Allemagne qui avait aussi pour objectif une réconciliation entre les peuples, qui passait notamment par l'apprentissage réciproque de la langue de l'autre. L'allemand est la première langue d'Europe en nombre de locuteurs et la langue de du premier partenaire économique de la France. Cependant, depuis des années l'enseignement de la langue recule : la proportion de collégiens ou lycéens étudiant l'allemand ne cesse de diminuer : environ 15 % aujourd'hui, contre 22,9 % en 1995. Un tel recul conduit à faire reculer dans certains territoires la qualité de l'enseignement de la langue, obligeant à des regroupements de classes et de niveaux, au détriment d'un accompagnement renforcé. Le recul de la qualité de l'enseignement conjugué à d'autres mesures comme la suppression des sections européennes en 2016 par la réforme du collège, ou la suppression partielle des classes bilingues, ont provoqué un effondrement des effectifs des étudiants en allemand dans l'enseignement supérieur. Aussi, les effectifs des élèves en filière LLCE allemand chutent drastiquement chaque année, y compris dans les villes frontalières. Un certain nombre de départements ont fermé dans les universités au cours de la dernière décennie. Du collège à l'université, l'apprentissage de l'allemand et l'ensemble des études germaniques en France sont aujourd'hui plus que jamais menacés. Il souhaite ainsi connaître les mesures qu'il compte prendre pour renforcer l'attractivité de l'enseignement de l'allemand, que ce soit pour soutenir les aspirants professeurs mais également pour améliorer son attrait auprès des élèves.

Texte de la réponse

L'enseignement de l'allemand en France constitue une priorité du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse dans le cadre de la politique de développement de l'enseignement des langues vivantes. Depuis la signature du Traité de l'Élysée le 22 janvier 1963, l'action en faveur de la langue du partenaire s'inscrit de manière continue dans la coopération éducative franco-allemande. Le 22 janvier 2019, à Aix-la-Chapelle, un nouveau Traité a été signé qui prévoit en son article 10 que les deux États « adoptent des stratégies visant à accroître le nombre d'élèves apprenant la langue du partenaire ». Pour remédier à la baisse des effectifs d'élèves apprenant l'allemand, un ensemble de dispositifs éducatifs spécifiques et de conventions partenariales viennent compléter les enseignements de droit commun. Les écoles maternelles franco-allemandes Élysée connaissent une forte dynamique. À la rentrée 2022, 275 écoles maternelles françaises offrent un enseignement en français et en allemand dès les premières années de scolarisation. En élémentaire, les écoles bilingues concernent majoritairement l'allemand (183 330 élèves à la rentrée scolaire 2021). Au collège, environ 80 000 élèves sont inscrits dans un dispositif bilangue. Les sections binationales Abibac poursuivent leur dynamique avec l'ouverture de trois nouvelles sections à la rentrée scolaire 2021 et une ouverture à la rentrée scolaire 2022, ce qui porte leur nombre à 92. La certification en allemand (DSD 1), en partenariat avec la conférence permanente des ministres de l'Éducation et la Culture (KMK), est un outil de reconnaissance des compétences linguistiques pour environ 30 000 élèves. La question de l'attractivité est également au cœur de la réflexion en matière de formation initiale, notamment par le levier de la mobilité et le développement de formations franco-allemandes (via les INSPE) et européennes (via Erasmus+) pour les étudiants qui se destinent à l'enseignement. À ce titre, la redynamisation du programme des assistants de langue allemande est également une piste d'amélioration majeure dans la mesure où parmi les assistants se trouve souvent une partie du futur vivier d'enseignants d'allemand. Dans le cadre de la coopération bilatérale avec l'Allemagne, la stratégie de relance de l'allemand en France sera présentée le 1er décembre 2022, lors de la rencontre des recteurs d'académie et des ministres de l'éducation des Länder. Plusieurs pistes de réflexion sont à l'étude, notamment : le renforcement et la valorisation de la mobilité vers l'Allemagne et les mobilités entrantes ; une coopération plus étroite avec les collectivités territoriales ; l'encouragement au choix du métier de professeur d'allemand ; le renforcement des diplômes franco-allemands ; le pilotage de la carte académique des langues en prenant davantage en compte la place de l'allemand ; la mise en place d'outils d'excellence franco-allemands pour l'enseignement et la formation professionnels, en référence à l'article 10 du Traité d'Aix-la-Chapelle.