Question écrite n° 8504 :
Démarchage téléphonique abusif, arnaques, et Bloctel

16e Législature

Question de : Mme Louise Morel
Bas-Rhin (6e circonscription) - Démocrate (MoDem et Indépendants)

Mme Louise Morel appelle l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications, sur le phénomène du démarchage abusif et des arnaques téléphoniques en France. Malgré le lancement du service Bloctel en 2016 et l'inscription de plusieurs millions de français à ce service depuis lors, le démarchage et les arnaques téléphoniques restent massifs. Le démarchage téléphonique, qui s'apparente à un véritable harcèlement commercial, n'a pas été limité par Bloctel. Près de 7 ans après sa mise en place, le dispositif s'avère inefficace en raison de dérogations bien trop extensives et de sanctions insuffisamment dissuasives. En effet, de nombreuses entreprises pratiquant le démarchage téléphonique ne prennent pas connaissance de la liste des personnes inscrites sur Bloctel et ce, malgré l'amende pouvant aller jusqu'à 75 000 euros encourue ; sans parler des arnaqueurs qui, bien sûr, s'en départissent sciemment. Les désagréments de cette situation, en particulier pour les personnes vulnérables, âgées ou malades, sont nombreux : dérangements à toute heure, suppression quotidienne des notifications d'appel en absence, filtrage des appels entrants, etc. En dépit de plusieurs questions écrites sur le sujet au cours de la législature précédente et des réponses associées du ministère de l'économie, il semble que cette problématique n'ait à ce jour pas trouvé de solution satisfaisante. Alors que le système de l'opt-in est utilisé pour les courriels et les SMS, c'est-à-dire que le consommateur doit expressément accepter de recevoir des sollicitations, c'est le consentement par défaut du consommateur qui est admis dans le cadre du démarchage téléphonique. Face à l'échec des listes d'opposition, de nombreux pays d'Europe sont ainsi passés au système de l'opt-in. Aussi, elle lui demande s'il entend mettre en œuvre ce système en France, ainsi que sur les mesures que le Gouvernement entend prendre afin d'améliorer le système Bloctel pour stopper enfin ce fléau.

Réponse publiée le 5 décembre 2023

Dans le souci de protéger les consommateurs, notamment les plus fragiles d'entre eux, d'un démarchage téléphonique intempestif et intrusif, le code de la consommation interdit cette pratique à l'égard de ceux qui sont inscrits sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique BLOCTEL. Ce dispositif compte aujourd'hui près de 5,2 millions d'inscrits et 10,7 millions de numéros de téléphone sont enregistrés sur BLOCTEL. La loi n° 2020-901 du 24 juillet 2020 visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux est venue renforcer ce dispositif. Dans le cadre des débats parlementaires, le législateur a décidé de ne pas adopter un régime de consentement préalable des consommateurs pour le démarchage téléphonique, dit « opt-in ». La plus grande efficacité d'un système "d'opt-in", en termes de protection des consommateurs contre le démarchage téléphonique abusif n'étant pas démontrée, s'agissant tout particulièrement des sollicitations émanant d'opérateurs installés à l'étranger et il pourrait, en outre avoir des conséquences dommageables sur les emplois dans les centres d'appels situés sur le territoire national. Le législateur a estimé préférable de renforcer le dispositif BLOCTEL en vigueur, permettant au consommateur de s'opposer gratuitement au démarchage téléphonique. L'ensemble des mesures d'application de la loi du 24 juillet 2020 visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux ont désormais été prises. Ainsi, le décret n° 2021-1528 du 26 novembre 2021 relatif aux conditions de reconduction tacite de l'inscription sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique et à la nature des données essentielles devant être rendues publiques par le gestionnaire de cette liste, est paru au JORF 28 novembre 2021. Ce décret détermine la nature des données essentielles de l'activité exercée par le gestionnaire de la liste d'opposition au démarchage téléphonique devant être rendues publiques dont « le nombre de réclamations déposées par les consommateurs ». C'est dans ce cadre que le gestionnaire actuel de la liste d'opposition au démarchage téléphonique, WORLDLINE, publie ces données essentielles - incluant le nombre de signalements déposés par les consommateurs - sur le site internet BLOCTEL : https://www.bloctel.gouv.fr/donnees-essentielles. Outre ce décret, un autre décret déterminant les jours et horaires ainsi que la fréquence auxquels la prospection commerciale par voie téléphonique non sollicitée peut avoir lieu, y compris en vue de la fourniture de journaux, de périodiques ou de magazine est paru le 14 octobre 2022 au Journal officiel (Décret n° 2022-1313 du 13 octobre 2022), à la suite de la consultation du conseil national de la consommation (CNC). Ce décret est entré en vigueur le 1er mars 2023 et encadre mieux le démarchage téléphonique auprès des consommateurs, qui est ainsi autorisé uniquement du lundi au vendredi, de 10 heures à 13 heures et de 14 heures à 20 heures. Il est, en revanche, interdit le samedi, le dimanche et les jours fériés. La prospection commerciale par voie téléphonique en vue de la fourniture de journaux, de périodiques ou de magazines entre également dans le champ d'application du décret. Cet encadrement s'applique aussi bien aux personnes non inscrites sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique BLOCTEL qu'à celles inscrites mais sollicitées dans le cadre d'un contrat en cours. Toutefois, il ne s'applique pas si le consommateur a donné son consentement exprès et préalable pour être appelé. Ce décret précise également qu'un consommateur ne peut pas être sollicité par voie téléphonique à des fins de prospection commerciale plus de quatre fois par mois (période de trente jours calendaires) par le même professionnel ou par une personne agissant pour son compte. Il convient de noter que cet encadrement de la fréquence des appels inclut les tentatives d'appels du professionnel envers un même consommateur. Enfin, lorsque le consommateur refuse ce démarchage au cours de la conversation téléphonique, le professionnel s'abstient de le contacter ou de tenter de le contacter avant l'expiration d'une période de soixante jours calendaires révolus à compter de ce refus. La violation de ces règles est sanctionnée de l'amende administrative prévue à l'article L. 242-16 du code de la consommation (75 000 € d'amende pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale). Par ailleurs, après l'interdiction de prospection commerciale par voie téléphonique en matière de rénovation énergétique prévue par la loi ° 2020-901 du 24 juillet 2020, la loi n° 2022-1587 du 19 décembre 2022 visant à lutter contre la fraude au compte personnel de formation et à interdire le démarchage de ses titulaires, face aux pratiques dénoncées et constatées dans le domaine de la formation professionnelle, a créé une nouvelle interdiction de sollicitation téléphonique dans ce secteur d'activités. La DGCCRF poursuit une action répressive résolue pour sanctionner les professionnels qui ne respectent pas leurs obligations légales et, de manière plus générale, les pratiques délictuelles qui s'y rattachent. Ainsi, en 2022, près de 2 100 établissements ont été contrôlés dont environ 60 % ne respectaient pas la règlementation relative au démarchage téléphonique et ont donné lieu à l'émission d'environ 3,4 millions d'euros d'amende. Les sanctions prononcées sont publiées sur le site de la DGCCRF et sur les comptes de ses réseaux sociaux, notamment « twitter » et « facebook », dans le cadre de sa politique du « name and shame » pour mieux informer les consommateurs sur les sociétés sanctionnées et renforcer l'effet dissuasif des sanctions. Ces publications sont également reprises sur le site internet bloctel.gouv.fr. Le Gouvernement est pleinement conscient que pour beaucoup de nos concitoyens, les appels téléphoniques, non désirés et répétés, effectués à tout moment de la journée, dans le but de leur vendre un produit ou de leur fournir un service qu'ils ne souhaitent pas, constituent une véritable nuisance. Il continuera donc à agir pour renforcer la lutte contre ces pratiques.

Données clés

Auteur : Mme Louise Morel

Type de question : Question écrite

Rubrique : Publicité

Ministère interrogé : Transition numérique et télécommunications

Ministère répondant : Petites et moyennes entreprises, commerce, artisanat et tourisme

Dates :
Question publiée le 30 mai 2023
Réponse publiée le 5 décembre 2023

partager