RÉGIME FISCAL DES TRAVAILLEURS FRONTALIERS FRANCE-SUISSE
Mme la présidente. La parole est à Mme Olga Givernet, pour exposer sa question, n° 88, relative au régime fiscal des travailleurs frontaliers France-Suisse.
Mme Olga Givernet. Avec la crise sanitaire de la covid-19, le télétravail s'est généralisé pour répondre au besoin de distanciation. Dans nos territoires frontaliers, cette nouvelle organisation a nécessité la mise en place d'accords dérogatoires en matière fiscale et sociale. Ces derniers avaient pour objet de préserver le statut de travailleur frontalier et les règles en matière d'imposition des revenus pour les résidents français travaillant en Suisse. Une série d'accords amiables franco-helvétiques ont été conclus. Le premier d'entre eux, datant de mai 2020, a été plusieurs fois prorogé. Le dernier en date, adopté en octobre 2022, est arrivé à terme à la fin de l'année.
Les travailleurs frontaliers ont indiqué être favorables à la pérennisation du recours au télétravail. Dans ce contexte, j'ai défendu, avec plusieurs collègues de la majorité, une résolution européenne visant à l'augmentation de la part de télétravail des travailleurs frontaliers. Adoptée en mars dernier, celle-ci préconise notamment d'offrir aux travailleurs frontaliers la possibilité d'être en télétravail jusqu'à deux jours par semaine sans conséquence fiscale. Le recours au télétravail présente des avantages, mais son volume doit être limité pour préserver les équilibres du bassin d'emploi et des activités économiques.
Dans le sillage de cette résolution, le ministère des finances a engagé en septembre 2022 des discussions avec la Suisse en vue de trouver un accord pérenne sans toucher au régime fiscal des travailleurs frontaliers. Je tiens ici à saluer la méthode employée par les services du Gouvernement, qui ont étroitement associé les parlementaires frontaliers aux travaux. Les objectifs retenus répondent à deux principes : simplicité du dispositif pour les frontaliers et défense des intérêts de la France en matière de rétribution et de protection des bassins d'emploi.
Le 22 décembre, Bercy a annoncé que la Suisse et la France étaient convenues d'une solution consistant à autoriser, dès le 1er janvier 2023, jusqu'à 40 % de télétravail par an, sans remettre en cause l'État d'imposition des revenus pour les frontaliers.
Pouvez-vous, madame la ministre déléguée, nous rappeler les grands axes de cet accord, préciser quels changements il va induire pour les frontaliers et, enfin, esquisser le calendrier de sa mise en œuvre ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels. Par la déclaration conjointe de la France et de la Suisse du 29 juin 2022 concernant la mise en place d'un accord provisoire applicable aux travailleurs transfrontaliers en vue d'aboutir à des règles d'imposition pérennes en matière de télétravail, les deux pays se sont accordés sur l'importance de définir de nouvelles règles d'imposition pérennes en matière de télétravail afin d'accompagner le développement – observé depuis la crise sanitaire – de cette pratique.
Les discussions qui se sont alors tenues entre la Suisse et la France, auxquelles des représentants des cantons ont été étroitement associés – et que vous avez suivies avec attention – ont conduit à un accord sur un régime fiscal pérenne en matière de télétravail.
Concernant les travailleurs relevant de l'accord de 1983 signé entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse, les deux pays se sont accordés pour que l'exercice du télétravail – dans la limite de 40 % du temps de travail, comme vous l'avez précisé – ne remette en cause ni le statut de frontalier, ni les règles d'imposition à la résidence des revenus d'activité salariée qui en découlent.
Concernant les autres travailleurs, un accord sur un régime pérenne a également été trouvé entre les deux États, sous forme d'un avenant modifiant la convention bilatérale de 1966 dont relève leur situation. Celui-ci prévoit de maintenir l'imposition dans l'État de situation de l'employeur si le télétravail effectué n'excède pas 40 % du temps de travail. En contrepartie du maintien du droit d'imposer les revenus d'activité salariée dans l'État de l'employeur, une compensation adéquate est prévue en faveur de l'État de résidence de l'employé.
J'en viens au calendrier. Les dispositions de l'avenant à la convention doivent s'appliquer à compter du 1er janvier 2023. Son entrée en vigueur sera toutefois subordonnée à sa signature puis à sa ratification par chacun des deux États. Le texte sera rendu public lors de sa signature, prévue vers la fin du premier semestre 2023. Dans l'intervalle, la France et la Suisse sont convenues d'en appliquer les modalités, s'agissant du télétravail, par accord amiable.
Le Gouvernement salue votre participation à l'ensemble des réunions de travail qui ont conduit à cet accord équilibré, conclu dans l'intérêt des travailleurs transfrontaliers.
Mme la présidente. La parole est à Mme Olga Givernet.
Mme Olga Givernet. Je tiens à souligner que ce succès est le fruit d'un travail mené entre les élus locaux, sur le terrain, et l'État, qui a pris en considération les spécificités des territoires frontaliers.
Si l'accord que nous avons évoqué concerne le volet fiscal, la dimension sociale fait l'objet d'un accord dérogatoire dont l'application est prévue jusqu'en juin 2023. Nous espérons que celui-ci pourra s'appliquer de la même manière et selon les mêmes critères que l'autre accord.