16ème législature

Question N° 8959
de M. Julien Odoul (Rassemblement National - Yonne )
Question écrite
Ministère interrogé > Éducation nationale et jeunesse
Ministère attributaire > Éducation nationale et jeunesse

Rubrique > produits dangereux

Titre > Présence d'amiante dans les écoles

Question publiée au JO le : 13/06/2023 page : 5252
Réponse publiée au JO le : 07/11/2023 page : 9946
Date de changement d'attribution: 21/07/2023

Texte de la question

M. Julien Odoul alerte M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la présence d'amiante dans les écoles et les établissements scolaires. Depuis 2005, la loi impose que les écoles et les établissements scolaires disposent de dossiers techniques amiante (DTA) s'ils sont construits avant 1997, date de l'interdiction de l'amiante en France. Cela représente presque 90 % des écoles et 70 % des collèges qui seraient donc concernés par la présence d'amiante. Depuis plusieurs années, partout en France, les associations départementales de défense des victimes de l'amiante (Addeva) se mobilisent sur le sujet. Parmi elles, l'Addeva 89 dans l'Yonne estime qu'il s'agit là d'un « enjeu de santé publique sous-estimé » et « qu'un tiers des écoles primaires en France n'ont pas fait de diagnostic technique amiante (DTA) », un document pourtant obligatoire. Ce qui signifie que dans une école sur trois, on ignore toujours s'il y a de l'amiante dans les bâtiments. En 2016, un rapport de l'Observatoire national de la sécurité (ONS) des établissements scolaires avait déjà alerté les pouvoirs publics. Ce document révélait notamment que la majorité des établissements construits avant 1997 contenaient encore de l'amiante, présente dans les faux plafonds, la colle des dalles de sol ou encore le long de la tuyauterie. Cela représenterait 38 % des écoles, 73 % des collèges, 77 % des lycées généraux et technologiques et 80 % des lycées professionnels en France. Pire encore, parmi les 20 000 chefs d'établissement interrogés par cette étude, 65 % avouent ne pas disposer d'un diagnostic et 70 % des écoles, collèges et lycées ne possèdent pas un dossier technique amiante (DTA) mis à jour de moins de trois ans comme le prévoit la loi. À titre d'exemple, dans la commune de Sens, la ville avait annoncé avoir réalisé un diagnostic technique amiante dans les dix-huit écoles dont elle a la charge au cours de l'année 2017. Le résultat était déjà inquiétant, puisque trois écoles devaient faire l'objet d'actions correctives légères et deux autres devaient faire l'objet d'une recommandation de type AC2, nécessitant des travaux. Toutes les études scientifiques s'accordent à dresser un constat alarmant, à savoir que l'amiante a bien des conséquences graves sur la santé des personnes en contact sur le long terme. Selon une étude de Santé publique France publiée en 2019, 20 professeurs ou personnels des écoles contractent un « mésothéliome pleural ou le cancer de l'amiante » chaque année. Les maladies se déclarant 30 à 40 ans après l'exposition, des enfants ayant fréquenté les établissements avec de l'amiante pourraient eux aussi être concernés. Malgré tout, cela ne semble pas alerter le Gouvernement et ce malgré le nombre de victimes qui ne cesse d'augmenter. Le 19 mai 2023, le tribunal de Paris a d'ailleurs refusé un procès en pénal pour près de 2 000 victimes contaminées à l'amiante qui visait 14 personnes (dirigeants d'entreprises, médecins, ou encore responsables politiques) accusées d'avoir fait retarder l'interdiction de l'amiante, pourtant classé cancérigène depuis la fin des années 1970. Cette décision est injuste pour les victimes, qui n'auront pas droit à un procès alors qu'ils seront contaminés à vie. Il souhaite savoir si sera mis en place un grand plan de désamiantage dans les écoles pour protéger les enfants et le corps enseignant, qui pourraient être nombreux à être contaminés dans les années à venir.

Texte de la réponse

Le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse est très vigilant sur la question de l'amiante, sujet majeur de santé publique et de santé au travail, qui concerne la sécurité des élèves, des enseignants et de toutes les personnes qui travaillent ou fréquentent les écoles et les établissements scolaires. Les communes ont la charge des écoles, les départements celle des collèges et les régions celle des lycées. Les collectivités sont en particulier responsables de la construction, des travaux et de l'entretien des bâtiments scolaires. Dès lors, il leur appartient de repérer et traiter la présence d'amiante dans les écoles. Elles ont ainsi une obligation d'information qui se traduit par la transmission à l'école ou à l'établissement de la fiche récapitulative du « dossier technique amiante » (DTA) dans le délai d'un mois à compter de sa constitution ou de sa mise à jour. Le DTA dans son intégralité est quant à lui tenu à disposition par la collectivité, si des compléments d'information sont nécessaires. Si la collectivité ne le communique pas spontanément, le directeur d'école ou le chef d'établissement le demande afin de mettre en œuvre les mesures de prévention qui en découlent et de donner les informations nécessaires aux personnels et aux usagers. Face aux difficultés récurrentes pour obtenir les DTA constatée en 2008, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a demandé aux ministres de l'intérieur et de l'outre-mer et chargé des collectivités territoriales d'inviter les autorités territoriales, propriétaires des bâtiments, à répondre favorablement aux demandes de communication de ces documents, comme le prévoit l'article R. 1334-28 du code de la santé publique. À cet effet, la direction générale des collectivités locales (DGCL) a élaboré une circulaire (n° INTBO800123C du 27 juin 2008) en direction des préfets de région et de département, ayant pour objet la communication des DTA. Les matériaux amiantés ne sont pas dangereux lorsqu'ils sont dans un bon état de conservation, lorsqu'ils sont recouverts de peinture, de vernis, d'enduit ou encapsulés. Toutefois, ils le deviennent lorsqu'ils sont fragmentés, avec risque de libération de fibres dans l'air sous forme de poussières qui peuvent ainsi être inhalées. En cas de présence de matériaux amiantés dégradés, la collectivité de rattachement met en œuvre des campagnes de contrôles périodiques, des mesures conservatoires et des travaux correctifs pour supprimer tout danger et rendre à l'usage les locaux impactés. Des procédures particulières sont prévues en cas de travaux dans les établissements qui reçoivent du public et les lieux de travail que sont les écoles et les établissements scolaires. Toute opération de travaux sur les bâtiments soumis au DTA fait l'objet d'un diagnostic avant travaux diligenté par le maitre d'ouvrage notamment si le DTA indique une présence potentielle d'amiante. Après travaux, le maitre d'ouvrage fait réaliser des mesures d'empoussièrement (analyses d'air), conformément à la réglementation en vigueur, permettant d'attester que les locaux peuvent être rendus à l'usage en toute sécurité. Le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse agit dans les domaines qui relèvent de sa compétence, à savoir l'information des personnels en tant qu'employeur et l'information de la communauté éducative au sens large. Dès 2005, dans le cadre défini pour la fonction publique par l'État employeur, le ministère a publié un plan d'action amiante pour l'éducation nationale afin de mettre en place un suivi médical adapté en direction des personnels susceptibles d'avoir été ou bien d'être exposés aux poussières d'amiante du fait du métier exercé ou de la discipline enseignée. Plusieurs actions de sensibilisation et d'information ont été menées depuis lors avec la diffusion en 2019 de deux guides d'information détaillés à destination des chefs de services et des agents, d'un livret amiante en 2022 à destination des usagers des écoles présentant notamment les principaux points de la réglementation et les bonnes pratiques à mettre en œuvre par le directeur d'école ou chef d'établissement. La cellule « bâti scolaire » du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse a été créée en 2019 pour notamment contribuer au suivi du traitement des enjeux de santé, de sécurité et d'hygiène dans les écoles et établissements. Concernant l'amiante, elle assure une veille réglementaire en lien avec la direction générale de la santé, les réseaux des inspecteurs académiques Santé et Sécurité au travail et les conseillers de prévention départementaux et académiques, afin d'informer l'ensemble des personnels, et notamment les chefs de service, les directrices et directeurs et les chefs d'établissement. Pour actualiser les données disponibles, le ministre a demandé à ce qu'elle réalise une enquête nationale relative à la présence d'amiante dans les écoles et les établissements scolaires. Cette enquête sera lancée avant la fin de l'année 2023. Le ministère va en parallèle travailler avec les représentants des collectivités territoriales à partir de cet automne pour améliorer l'échange de données en la matière. L'objectif est de disposer d'un état des lieux objectivé qui ouvre à un meilleur partage des informations et une évaluation des mesures de gestion de l'amiante.