16ème législature

Question N° 9072
de M. Francis Dubois (Les Républicains - Corrèze )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et souveraineté alimentaire
Ministère attributaire > Agriculture et souveraineté alimentaire

Rubrique > élevage

Titre > Rapport Cour des comptes, réduction cheptel bovin, conséquences pour la filière

Question publiée au JO le : 20/06/2023 page : 5432
Réponse publiée au JO le : 03/10/2023 page : 8771

Texte de la question

M. Francis Dubois alerte M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les conclusions du récent rapport rendu par la Cour des comptes relatif aux « soutiens publics aux éleveurs de bovins » qui recommandent notamment une réduction de 30 % du cheptel bovin français pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre et diminuer ainsi l'empreinte carbone du pays. Cette proposition est tout simplement une attaque incompréhensible contre les éleveurs et elle a plongé le monde agricole, notamment en Corrèze où l'élevage bovin est très présent, dans la consternation. Les éleveurs corréziens s'adaptent sans cesse pour répondre aux exigences toujours plus fortes de la société. Ils portent une agriculture d'excellence et majoritairement labellisée. Ils jouent un rôle économique, social et touristique majeur dans les territoires ruraux. Ils participent en outre à façonner les paysages des campagnes et de fait, à assurer le maintien de la biodiversité. De telles préconisations contribuent à entretenir l'agri-bashing dont sont de plus en plus victimes les éleveurs. La mise en œuvre d'une telle mesure mettrait par ailleurs en grand péril l'agriculture et la souveraineté alimentaire de la France. Avec le changement climatique, les sécheresses fréquentes et intenses amènent naturellement une baisse de productivité des prairies, qui contraint les exploitations de ruminants à réduire leurs troupeaux. Cette diminution drastique du nombre d'animaux entraîne une décapitalisation qui pose problème pour accompagner les transmissions, les installations et le renouvellement de la population agricole. Réduire davantage le cheptel français rendrait la France encore plus dépendante d'autres pays : alors que, selon la FNSEA, déjà 25 % de la viande bovine en France est importée, les Français se retrouveraient obligés d'importer massivement de la viande bovine venue de l'autre bout du monde, issue d'une agriculture moins qualitative, moins durable, moins respectueuse de l'environnement. Le bilan carbone serait sans aucun doute beaucoup plus lourd. S'il convient de prendre en compte le changement climatique en agriculture, ce n'est certainement pas en affaiblissant la filière d'élevage bovin, filière d'excellence de l'agriculture française. En conséquence, il lui demande sa position sur ce rapport et quelle suite il entend lui donner.

Texte de la réponse

Le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a tenu à faire savoir qu'il était pleinement conscient du sentiment d'incompréhension et d'exaspération que cette publication a soulevée au sein du monde agricole, et plus particulièrement chez les éleveurs. Il a ainsi rappelé son soutien en s'exprimant publiquement à ce sujet devant la représentation nationale. En cette occasion, il a rappelé que lorsqu'il s'agit d'agriculture, et d'élevage en particulier, le débat public est trop souvent caractérisé par la méconnaissance des réalités du modèle d'élevage actuel et par le dogmatisme, les stigmatisations ou les caricatures qui y sont liées. Et c'est dans cet esprit que le Gouvernement, à travers la voix de la Première ministre, a réaffirmé le 30 mai 2023 que la France pouvait être fière de son modèle d'élevage bovin et a affirmé qu'il avait un avenir. C'est la raison pour laquelle la France s'est montrée déterminée à soutenir l'élevage à travers la nouvelle politique agricole commune, l'élevage étant la filière la plus soutenue, ou dans le cadre des relations commerciales, en s'opposant à l'accord avec le Mercosur. Ce choix est d'ailleurs cohérent avec les objectifs gouvernementaux en matière de transition environnementale et de préservation de la biodiversité. En effet, le modèle d'élevage français présente la particularité d'avoir de nombreuses externalités positives. Un hectare de prairie permanente permet ainsi l'absorption annuelle de 403 kilos de dioxyde de carbone (CO2). Chaque année, les prairies stockent ainsi 8 millions de tonnes de CO2 en France. L'élevage est également le garant du réseau de haies et d'autres infrastructures agro-écologiques qui participent à la préservation de la biodiversité, la lutte contre les incendies dans de nombreuses régions et au maintien de paysages ouverts. C'est enfin l'élevage qui produit les engrais organiques nécessaires à l'agriculture biologique. Le monde de l'élevage est aujourd'hui au cœur de nombreux défis, tels que l'évolution de la démographie agricole, les aspirations nouvelles des actifs agricoles, l'évolution des pratiques alimentaires ou encore l'adaptation et l'atténuation du changement climatique. Dans ce contexte, il faut donc construire un nouveau cadre, dans lequel l'élevage aura toute sa place ; c'est tout le sens du Pacte et loi d'orientation et d'avenir agricoles. Ce pacte sera l'occasion de réaffirmer que la France a besoin d'éleveurs et que sa souveraineté alimentaire passe aussi par cette reconnaissance.