Protéger les séniors des démarchages abusifs des mutuelles
Question de :
M. Jean-Philippe Tanguy
Somme (4e circonscription) - Rassemblement National
M. Jean-Philippe Tanguy appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les démarchages téléphoniques abusifs opérés par les mutuelles. Au regard de l'augmentation, ces dernières années, des différents démarchages téléphoniques exécutés par les mutuelles reposant sur la vulnérabilité des seniors, il est désormais nécessaire de renforcer les limites d'action de ces démarcheurs abusifs. La protection des personnes âgées est un sujet d'ordre majeur. Bien que de nombreuses mesures sont mises en œuvre, elles sont cependant insuffisantes. Cette insuffisance se justifie par le caractère exotique que représente le concept du démarchage téléphonique pour cette partie vulnérable de la population, véritable proie de ce fléau. Une grande quantité de ces mesures, telle que l'obligation d'attendre 24 heures entre deux appels, est fondamentalement insuffisant, voir grotesque, pour ces personnes trop souvent isolées et vulnérables. L'abus de faiblesse, normalement puni par la loi, devrait être appliqué en l'espèce. Il serait d'ailleurs judicieux, dans une optique de bon sens, d'éviter au maximum le besoin d'application de ces peines en protégeant les potentielles victimes de leurs démarchages sournois. Il est donc important de souligner l'avancée de cette protection pour les particuliers depuis 2020. Cette avancée ne doit pas être vue comme une finalité mais comme le début de grandes mesures, qui une fois appliquées, vont permettre la protection des plus vulnérables. Des solutions tel que Bloctel sont des pistes intéressantes, mais il est pertinent de rappeler que l'inscription de ces listes passe par internet et généralement la part de la population vulnérable est la même qui souffre de carence dans la maîtrise des outils numériques. Ce problème révèle la grande vulnérabilité des aïeuls. M. le député demande donc à M. le ministre quelles mesures il entend mettre en œuvre afin de réduire le démarchage abusif effectué par diverses mutuelles, sur l'ensemble du territoire et notamment dans la Somme. Par ailleurs, il souhaite connaître les statistiques relatives à cette situation (nombre de personnes victimes d'abus de faiblesse pour des raisons similaires, au niveau national ainsi qu'à l'échelle de la Somme).
Réponse publiée le 1er août 2023
Les enquêtes réalisées par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) entre janvier 2021 et avril 2022, dans le secteur de l'assurance, avaient en effet montré que les personnes âgées étaient la cible privilégiée de compagnies peu scrupuleuses, cherchant à leur vendre au cours d'un appel téléphonique une complémentaire santé, avec des discours trompeurs entretenant volontairement la confusion avec la mutuelle de l'assuré. Sur 147 professionnels de l'assurance, près d'un tiers ne respectaient pas la règlementation portant sur la bonne information du consommateur ou la loyauté des pratiques commerciales dans ce secteur. Les services de la DGCCRF avaient alors adressé aux établissements concernés 29 avertissements, 11 injonctions, 7 procès-verbaux pénaux et 2 procès-verbaux d'amendes administratives. Depuis, l'entrée en vigueur au 1er avril 2022 de la loi n° 2021-402 du 8 avril 2021 relative à la réforme du courtage de l'assurance, et la publication de ses textes d'application, ont renforcé la protection des consommateurs contre les pratiques abusives constatées. Ses dispositions s'inspirent directement des recommandations d'un avis du comité consultatif du secteur financier, du 19 novembre 2019, visant à lutter contre le démarchage téléphonique abusif, dénoncé régulièrement par les associations de consommateurs. Depuis le 1er avril 2022, le démarcheur doit recueillir l'accord de l'interlocuteur à la poursuite de la communication dès le début de l'appel. A défaut d'accord, il doit mettre fin à l'appel initial sans délai et s'abstenir de contacter à nouveau le consommateur. Le distributeur doit agir de même dès lors que le consommateur manifeste au cours de l'appel une absence d'intérêt ou son souhait de ne pas donner suite à la proposition commerciale. Après l'appel initial, le distributeur ne peut recontacter le consommateur sans avoir recueilli au préalable son accord exprès et sans respecter un délai de vingt-quatre heures après la réception par le consommateur de l'information précontractuelle. En outre, la signature du contrat est obligatoire et ne peut intervenir au cours d'un appel téléphonique et doit être manuscrite ou électronique. Le distributeur doit informer, sans délai, le consommateur, par écrit ou sur tout autre support durable, de son engagement, des dates de conclusion et de prise d'effet du contrat ainsi que sur son éventuel droit de renonciation. Enfin, le distributeur a l'obligation de conserver l'enregistrement des appels intervenus avant la conclusion du contrat et de les tenir à la disposition des agents de l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et de la DGCCRF, à des fins de contrôle. Le fait pour un distributeur de contrevenir à l'une de ces obligations peut être sanctionné par ACPR et est également passible de la peine d'amende prévue pour les contraventions de 5ème classe lorsque l'infraction est constatée par les agents de la DGCCRF. S'agissant des statistiques relatives au délit d'abus de faiblesse, il appartient à l'autorité judiciaire, pour les faits qui lui sont soumis, de retenir, le cas échéant, cette qualification juridique. La DGCCRF a prévu de poursuivre ses enquêtes dans ce secteur et pourra ainsi constater les effets de ces nouvelles dispositions sur les pratiques commerciales des assureurs et des sociétés de démarchage.
Auteur : M. Jean-Philippe Tanguy
Type de question : Question écrite
Rubrique : Consommation
Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Dates :
Question publiée le 27 juin 2023
Réponse publiée le 1er août 2023