16ème législature

Question N° 9427
de M. Sylvain Carrière (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Hérault )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et souveraineté alimentaire
Ministère attributaire > Agriculture et souveraineté alimentaire (Ministre déléguée)

Rubrique > produits dangereux

Titre > Impact des pesticides génétiques sur les pollinisateurs

Question publiée au JO le : 27/06/2023 page : 5673
Date de changement d'attribution: 16/04/2024

Texte de la question

M. Sylvain Carrière attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les nouveaux pesticides émergents. L'ONG Pollinis a publié le 20 juin 2023 un nouveau rapport à l'encontre des nouveaux pesticides génériques émergents. En effet, suite au nouveau règlement sur l'usage durable des pesticides présenté en juin 2022 par la Commission européenne, les pesticides chimiques que l'on connaissait depuis les années 1970, sont voués à voir leur usage réduit à hauteur de 50 % d'ici 2030. Cependant, les géants de l'industrie des produits pesticides ne comptent pas perdre un marché aussi juteux et s'adaptent à la réglementation, proscrivant uniquement les pesticides chimiques, en développant de nouveaux produits dits à ARN interférents (ARNi). Ces derniers ont pour vocation de détruire peu à peu l'organisme des insectes ciblés en s'attaquant à l'expression génétique des fonctions vitales de certains insectes catégorisés comme « ravageurs ». Trois méthodes d'application sont ainsi utilisées : la diffusion par pulvérisation, son injection directement dans la sève des cultures ciblées par l'intermédiaire des plantes génétiquement modifiées (OGM) et sa transmission par des micro-organismes au contact de la plante ou des insectes ciblés. Un ciblage des insectes à tuer afin de continuer le business as usual de l'agriculture intensive nécessaire à l'agro-industrie donc. Mais cette méthode, au-delà de perpétuer une vision anthropocentrée de la biodiversité, avec une sélection des insectes bons et de ceux ravageurs, est en réalité trompeuse. En effet, selon le rapport de l'ONG Pollinis, « ces nouveaux pesticides génétiques pourraient éliminer indistinctement de nombreux insectes pollinisateurs et précipiter leur déclin tout aussi efficacement que les pesticides chimiques qu'ils sont censés remplacer ». Suite à une analyse bioinformatique réalisée par l'ONG sur les 26 produits pesticides à ARNi et sur 2 500 espèces de pollinisateurs, le bilan est alarmant. 136 espèces de pollinisateurs pourraient être victimes d'effets hors cible en raison d'une similarité génétique supérieure à 80 % avec les insectes ciblés. Parmi elles 65 espèces de papillons, 33 espèces d'abeilles solitaires, 18 espèces de diptères et 10 espèces de bourdons dont certaines menacées d'extinction, ainsi que 5 espèces d'abeilles mellifères. Alors que 70 à 90 % des plantes à fleur dépendent de la pollinisation animale, alors que sont quantifiées par des études depuis de nombreuses années la corrélation entre déclin des populations de pollinisateurs et perte de rendement agricole, la mise sur le marché de nouveaux pesticides s'attaquant à ces espèces est une aberration. Pire, dans la nouvelle typologie des pesticides, ceux-ci pourraient être qualifiés de produits de « biocontrôle » à « faible risque », alors même que l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) n'a pu étudier la dangerosité potentielle. On ouvre donc la porte à des réactions en chaîne dont la dangerosité n'est pas correctement évaluée, dans une opacité permanente et continue sur les compositions des produits pesticides. Il lui demande donc s'il va engager une évaluation des risques, stricte et rigoureuse, des pesticides ARNi par une agence indépendante en accord avec le principe de précaution des Nations unies, ainsi que la suspension immédiate de tous les essais en plein champ.

Texte de la réponse