16ème législature

Question N° 94
de M. Didier Le Gac (Renaissance - Finistère )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Travail, plein emploi et insertion
Ministère attributaire > Travail, plein emploi et insertion

Rubrique > transports par eau

Titre > Amiante dans la réparation navale- ACAATA- Dispositif de repérage avant travaux

Question publiée au JO le : 03/01/2023
Réponse publiée au JO le : 11/01/2023 page : 68

Texte de la question

M. Didier Le Gac appelle l'attention de M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion sur la question de l'amiante dans la réparation navale. Depuis 1997, l'utilisation de l'amiante est interdite en France, il est donc normal que les dispositifs ouvrant droit aux départs anticipés des salariés soient appelés à disparaître. Néanmoins, tous les secteurs d'activités industrielles ne sont objectivement pas concernés de la même manière : c'est le cas de la réparation navale. Ainsi, avec l'annonce en 2020 de la fin du bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA), les salariés concernés dans les ports français, comme à Brest, se sont fortement mobilisés face aux risques toujours présents d’exposition accidentelle à des poussières d'amiante, en particulier sur des navires battant pavillon étranger. Parallèlement le Gouvernement a souhaité mettre en place un dispositif de « repérage avant travaux » ( RAT) spécifique au secteur maritime et allant beaucoup plus loin que le diagnostic technique amiante existant jusque-là. Ce dispositif va évidemment dans le bon sens. Toutefois, le RAT ne s'applique qu'en France et a provoqué depuis sa mise en œuvre de très importantes distorsions de concurrence entre chantiers navals français et européens, sans parler même des chantiers hors Union européenne. En effet, le RAT implique coûts et délais supplémentaires à la charge de l'armateur du navire. Les conséquences de cette réglementation sur les carnets de commandes des industriels de la réparation navale se sont immédiatement fait sentir dans tous les ports français, notamment à Brest où des centaines d'emplois sont concernés. Dans un souci pourtant essentiel de protection des salariés, le code du travail français a donc déséquilibré un marché très concurrentiel en ignorant les spécificités techniques liées aux navires. Alerté de ces difficultés par les professionnels et les organisations syndicales, les parlementaires se sont mobilisés et le ministère du travail et celui de la santé ont saisi l'IGAS au printemps 2022 pour étudier la situation. Malheureusement, les conclusions de cette mission n'ont pu être communiquées. Néanmoins, s'il semble que la fin du régime de l'ACAATA soit repoussée jusqu'en 2027, il souhaiterait savoir quand l'arrêté confirmant ce report sera signé. De même, des incertitudes et imprécisions demeurant concernant le RAT, il lui demande s'il est toujours applicable et s'il l'est, dans quelles conditions.

Texte de la réponse

AMIANTE DANS LA RÉPARATION NAVALE


Mme la présidente. La parole est à M. Didier Le Gac, pour exposer sa question, n°  94, relative à l'amiante dans la réparation navale.

M. Didier Le Gac. Comme vous le savez, l'utilisation de l'amiante est interdite en France depuis 1997. Ce matériau reste néanmoins présent dans le monde du travail, à des degrés différents selon les secteurs d'activité industrielle concernés. S'il est un secteur pour lequel cette question reste sensible, c'est bien celui de la réparation navale, dont les salariés se sont régulièrement mobilisés.

C'est la raison pour laquelle je me félicite de la décision très récente du Gouvernement de prolonger, par un arrêté publié au Journal officiel du 31 décembre dernier, le bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata) jusqu'au 31 décembre 2027, alors que le dispositif devait prendre fin en septembre 2022. C'est une très bonne nouvelle pour les salariés de tous les ports français concernés, notamment celui de Brest, dans ma circonscription.

Parallèlement, le Gouvernement a souhaité créer un dispositif de repérage avant travaux (RAT) de l'amiante spécifique au secteur maritime, bien plus poussé que le diagnostic technique qui existe déjà. Si l'initiative est louable, ce RAT, dont la charge incombe aux armateurs, ne s'applique qu'en France et a déjà entraîné, depuis son entrée en vigueur, de très importantes distorsions de concurrence entre les chantiers navals français et les autres chantiers européens – sans parler, évidemment, des chantiers extracommunautaires.

Très vite alertés de ces difficultés par les professionnels et les organisations syndicales, les parlementaires, dont je fais partie, se sont mobilisés. Le ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion et celui de la santé et de la prévention semblent avoir accepté de surseoir au dispositif, puisqu'ils ont conjointement saisi l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), au printemps 2022, pour évaluer la pertinence de la mise en œuvre du RAT. Malheureusement, les conclusions de cette mission ne nous ont toujours pas été communiquées.

Au vu des incertitudes qui demeurent donc concernant le RAT, ma question est la suivante : est-il toujours applicable, et dans quelles conditions ? Des chantiers seront-ils désignés pour expérimenter sa mise en œuvre ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels. La prévention des risques liés à l'exposition des travailleurs à l'amiante est une priorité de la politique de santé au travail du Gouvernement. En ce qui concerne le secteur de la réparation navale, je vous confirme que l'arrêté du 19 juin 2019 relatif au repérage de l'amiante avant certaines opérations réalisées dans les navires, bateaux, engins flottants et autres constructions flottantes est entré en vigueur le 1er janvier 2020 et est donc, depuis ce jour, pleinement applicable.

Toutefois, eu égard aux difficultés signalées, le Gouvernement a, en début d'année 2022, chargé l'Igas et l'Inspection générale de l'environnement et du développement durable (Igedd) d'identifier les modalités permettant de garantir le caractère pleinement opérationnel du dispositif de repérage de l'amiante avant travaux, tout en tenant compte des contraintes spécifiques à la réparation navale. Conformément aux recommandations émises à l'été 2022 à l'issue de cette mission, le Gouvernement a créé un groupe de travail pluridisciplinaire chargé de déployer une feuille de route, dont l'objectif est d'accompagner les professionnels dans l'application de ce dispositif. Ce groupe, dont la première réunion s'est tenue le 13 décembre, travaillera pendant environ dix-huit mois pour identifier et suivre la mise en œuvre des leviers permettant d'assurer la pleine application du repérage de l'amiante avant travaux dans le secteur de la réparation navale.

S'agissant de l'harmonisation européenne des règles applicables à ce secteur d'activité, la révision en cours de la directive sur l'amiante ainsi que les travaux engagés par la Commission européenne sont l'occasion, pour la France, de promouvoir son dispositif réglementaire ainsi que la nécessaire convergence des outils déployés pour prévenir l'exposition des travailleurs à l'amiante à l'échelle européenne.

Enfin, en ce qui concerne l'Acaata, je vous confirme que l'arrêté du 29 décembre 2022 a repoussé la clôture des périodes d'inscription des établissements de la réparation navale au 31 décembre 2027, le temps, précisément, de déployer les différentes conclusions du groupe de travail relatif au repérage de l'amiante avant travaux.