Situation de souffrance dans les écoles d'art et de design
Question de :
M. Jérôme Guedj
Essonne (6e circonscription) - Socialistes et apparentés (membre de l’intergroupe NUPES)
M. Jérôme Guedj appelle l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la situation de souffrance existant aujourd'hui dans la majorité des écoles d'art et design. Depuis plusieurs mois, le collectif « Écoles d'art et design en lutte » a fait part à Mme la ministre de ses fortes préoccupations concernant la forte dégradation des conditions d'enseignement au sein des écoles d'art et design en France, principalement due au désinvestissement de l'État concernant ces établissements. Aujourd'hui, le secteur est frappé durement par une crise conjoncturelle et structurelle d'ampleur qui met en péril le bon fonctionnement, la viabilité de nombreux établissements. Sur le plan conjoncturel, la crise énergétique, l'inflation, et la hausse du point d'indice des agents de la fonction publique non compensée dans les écoles territoriales plongent des établissements souvent déjà fragiles économiquement parlant dans des situations de déficits budgétaires importants. Sur le plan structurel, les écoles souffrent de problèmes identifiés, analysés et dénoncés depuis maintenant des années, non seulement par les organisations syndicales concernés, mais également par maints rapports de l'Assemblée nationale, du Sénat, de l'Hceres, etc. Ainsi, se pose toujours la question pour les établissements concernés de leurs statuts qui, depuis la réforme dite de Bologne, est paradoxalement inadaptée aux enjeux de l'enseignement supérieur. Les enjeux autour d'une revalorisation du statut des personnels enseignants des établissement public de coopération culturelle (EPCC), apparaissant comme très en-deçà du minimum que devrait garantir l'enseignement supérieur, ou encore de l'alignement des aides et garanties publiques à direction des étudiants des écoles d'art et design sur celles de l'ensemble des étudiants des autres établissement de l'enseignement supérieur sont d'autres éléments structurelles auxquels il apparaît nécessaire d'apporter une réponse dans les plus bref délais. Il résulte de ces multiples problèmes des conditions d'études dégradées, alors même que les études sont de plus en plus coûteuses, et une souffrance au travail de plus en plus extrême, en particulier parmi les équipes administratives et techniques des écoles. Pire encore, l'absence d'actions de la part de l'État en la matière conduit aujourd'hui 2 établissements à être en grave danger, en l'occurrence l'ESAD de Valenciennes (menacé de fermeture) et l'EESI Angoulême-Poitiers (subissant un plan de « sauvegarde » brutal qui s'apparente à un plan social et une refonte pédagogique drastique afin de faire des économies budgétaires). Face à la forte menace qui pèse aujourd'hui sur le devenir de l'ensemble des écoles d'art et de design, le collectif « Écoles d'art et design en lutte » appelle de ses vœux un réengagement majeur de l'État dans l'ensemble des établissements publics d'enseignement supérieur artistique. Un plan d'urgence avec des dotations budgétaires immédiates est ainsi demandé par les acteurs du secteur, à hauteur d'environ 7,2 millions d'euros, afin de faire face à la dimension conjoncturelle de cette crise ainsi que diverses autres mesures venant répondre aux différentes carences structurelles que nous avons énoncées précédemment. De manière globale, ces derniers demandent à ce que l'État se réengage massivement aux côtés des écoles publiques d'enseignement supérieur artistique afin que, a minima, soit correctement préservée la configuration actuelle de ces dernières sur l'ensemble du territoire. Face aux demandes des acteurs du secteur, Mme la ministre a annoncé, le 28 mars 2023, qu'une aide d'urgence de 2 millions d'euros allait être débloquée pour ces établissements, et qu'elle allait créer une mission ministérielle, sous la responsabilité de M. Pierre Oudart, chargé de donner avant l'été des préconisations concernant les réponses à apporter aux problèmes structurels qui touchent ces écoles. Si le député Jérôme Guedj se réjouit de cette première réponse du Gouvernement concernant ce sujet, il constate que cette dernière est loin de répondre aux attentes effectives du secteur, comme expliqué précédemment. Il souhaite donc savoir si elle a pour volonté de faire évoluer sa politique en ce qui concerne les établissements d'enseignements supérieurs et si un réengagement de l'État à la hauteur des demandes des acteurs du secteur est prévu dans les prochaines semaines afin de répondre à la grave crise que ce dernier traverse depuis plusieurs mois.
Réponse publiée le 12 septembre 2023
L enseignement supérieur relevant du ministère de la culture repose sur un réseau de 99 établissements, dont 43 écoles supérieures publiques d art et de design. Celles-ci sont réparties sur l ensemble du territoire français et délivrent des diplômes nationaux, tels que le diplôme national d art, conférant grade de licence, ou le diplôme national supérieur d expression plastique, conférant grade de master. Ces écoles supérieures comptent 10 écoles nationales sous tutelle du ministère de la culture et 33 écoles dites « territoriales ». Ce double réseau hérité de l histoire a connu d importantes évolutions au cours des dernières années : les écoles nationales supérieures d art d une part, gérées par le Centre national des arts plastiques jusqu en 2002, ont été transformées en établissements publics sous tutelle du ministère de la culture, et les écoles territoriales d autre part, qui étaient des régies municipales créées à l initiative des collectivités locales, sont devenues pour la quasi-totalité des établissements publics de coopération culturelle en 2011. Financées très majoritairement par les collectivités locales, les 33 écoles supérieures d art territoriales forment environ 8 400 étudiants et délivrent des diplômes nationaux portant grade universitaire. Ces établissements relevant principalement des collectivités bénéficient à ce titre d un soutien financier du ministère de la culture qui représente en moyenne environ 11 % de leurs ressources globales. Ces écoles supérieures d art territoriales connaissent des difficultés financières, notamment en raison de l inflation et, dans certains cas, d une baisse des contributions des collectivités locales. Comme il est rappelé dans la question écrite, le ministère de la culture a décidé de débloquer 2 M de crédits supplémentaires afin de répondre à l urgence de la situation, ce qui représente une augmentation significative de 14 % de la dotation globale à ces établissements. Le ministère a ainsi engagé sans délai un dialogue avec les collectivités territoriales afin de répartir efficacement cet effort financier en lien avec les autres financeurs publics, en accordant une attention particulière aux établissements où l effort public par étudiant est le moins élevé. Au-delà de cette aide d urgence, le ministère de la culture est conscient des défis structurels auxquels sont confrontés ces établissements, comme le financement pérenne du réseau d écoles, la bonne répartition de l offre de formation sur le territoire, l ouverture à une plus grande diversité de profils, l accessibilité et la lisibilité des parcours de formation, l insertion professionnelle des étudiants et le développement de l apprentissage, ou encore l attractivité internationale. Afin de répondre à ces défis, le ministère a souhaité que la concertation se poursuive et s intensifie entre les ministères concernés, les fédérations d élus et l Association nationale des écoles d art. À cet effet, il a été confié à Monsieur Pierre Oudart, directeur de l'Institut national supérieur d'enseignement artistique Marseille Méditerranée, et ancien délégué aux arts plastiques à la direction générale de la création artistique du ministère de la culture, une réflexion sur les enjeux structurels évoqués dans la question écrite. Le 20 juillet dernier, une délégation des présidents d établissements publics de coopération culturelle, accompagnée de l association nationale des écoles supérieures d art, a également été reçue au ministère de la culture, rue de Valois, pour faire un point sur la situation de ces écoles et sur les premiers effets de l aide d urgence.
Auteur : M. Jérôme Guedj
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignements artistiques
Ministère interrogé : Enseignement supérieur et recherche
Ministère répondant : Culture
Dates :
Question publiée le 4 juillet 2023
Réponse publiée le 12 septembre 2023