Insécurité qui gangrène la ville de Nîmes - moyens de la justice
Question de :
M. Yoann Gillet
Gard (1re circonscription) - Rassemblement National
M. Yoann Gillet interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'insécurité qui gangrène la ville de Nîmes. Il appelle l'attention de M. le ministre sur les dernières actualités qui confirment une fois de plus que les Nîmois subissent une dégradation continue de leur sécurité. Les trafics de stupéfiants sont présents dans toute la ville, les armes circulent et sont d'ailleurs utilisées fréquemment pour des règlements de comptes et pour des tirs d'intimidation entre bandes rivales. Les quartiers du Chemin-Bas d'Avignon, de Pissevin, de Valdegour et du Mas de Mingue sont particulièrement gangrénés par ces trafics et la présence importante d'armes. Les quartiers résidentiels autour de ces quartiers sensibles sont, eux aussi, comme le centre-ville, impactés par une forte criminalité. Les homicides ou tentatives se multiplient à Nîmes. Le 25 août 2022 un incendie criminel a par ailleurs touché l'école du Mas Roman. Cet acte intolérable, à quelques jours de la rentrée, survient presque un an après l'incendie qui avait touché l'école Paul Langevin, dans le quartier de Pissevin. Dans les quartiers devenus des zones de « non France », les policiers sont devenus des cibles prioritaires. Les services de secours et professionnels de santé sont depuis plusieurs années régulièrement contraints d'être protégés pour pouvoir intervenir dans certains quartiers. Les facteurs font quant à eux leur travail avec la crainte de se faire agresser. Les caillassages de bus du réseau de transport sont nombreux, contraignant régulièrement les chauffeurs à exercer leur droit de retrait. Malgré de nombreuses alertes, la fréquence des tirs, les agressions physiques et l'ultra violence continuent de s'intensifier. En raison de l'inaction des pouvoirs publics, de nombreux habitants envisagent, pour ceux qui le peuvent financièrement, de déménager afin de protéger leurs enfants. Le 21 août 2022, le ministre de l'intérieur a annoncé une augmentation des effectifs de police pour les villes de Montpellier, Béziers et Perpignan. La ville de Nîmes ne se trouve pas dans cette liste. Nîmes est pourtant gangrénée par l'insécurité et la criminalité. Les Nîmoises et les Nîmois sont en danger. Parallèlement à sa demande justifiée d'effectifs de police supplémentaires exprimée auprès du ministre de l'intérieur, M. le député sollicite donc du garde des sceaux, ministre de la justice, le renforcement de l'action pénale et la mise en place d'une réelle politique de répression pour parvenir à la fin du laxisme judiciaire, le laxisme actuellement en vigueur ayant pour conséquence d'avoir dans les rues des délinquants souvent multirécidivistes et des criminels libérés par anticipation ou condamnés trop faiblement. M. le député demande au ministre s'il compte agir enfin ou si sa politique n'est destinée qu'à se faire applaudir par les personnes détenues, comme ce fut le cas à la prison de Fresnes, en juillet 2020, prison où certains délinquants et criminels peuvent désormais faire du karting. Il lui demande par ailleurs si le Gouvernement envisage de réaliser une réforme législative essentielle permettant de pénaliser un nombre plus important de comportements et le retour des peines planchers qui permettent une peine minimale en dessous de laquelle on ne peut descendre. Il est urgent de diminuer les cas de récidives et de supprimer toute possibilité de réduction et d'aménagement de peine en matière d'atteintes à l'intégrité physique par exemple. Enfin, il l'interroge sur ses intentions en matière de renforcement des sanctions pénales applicables aux mineurs vivement souhaité par les Français.
Réponse publiée le 14 mars 2023
La lutte contre la délinquance du quotidien, qui frappe certains quartiers et les citoyens les plus vulnérables, est une priorité du ministère de la Justice qui porte une politique pénale de fermeté. Comme indiqué dans la circulaire de politique pénale générale du 20 septembre 2022, la lutte contre cette délinquance demeure au cœur de la politique pénale des parquets généraux et parquets. L'action en matière de lutte contre les trafics s'inscrit dans un continuum qui va de la production à la revente. Une politique pénale dissuasive est ainsi conduite contre les trafics de stupéfiants qui affectent les conditions de vie au quotidien des français et impacte de manière très délétère la société française toute entière, du règlement de compte à la gestion des profits qu'elle induit. Les Etats-majors de la sécurité ou les groupes locaux de traitement de la délinquance constituent des espaces privilégiés d'échanges d'informations pour définir une politique pénale ferme et adaptée aux enjeux des territoires. Par ailleurs, le ministère de la Justice est pleinement engagé pour lutter contre les troubles causés à l'ordre public, les atteintes aux domiciles ou aux biens des particuliers, ou sur la voie publique, mais aussi vis-à-vis des violences commises dans l'espace public ou dans les transports, des outrages sexistes, des dégradations, des cambriolages. Une attention particulière est en outre portée à la lutte contre les atteintes commises contre les forces de l'ordre, en ce qu'elles constituent une atteinte intolérable à l'Etat. A ce titre plusieurs circulaires [1] et dépêches ont été adressées aux parquets généraux et parquets tendant à la mise en œuvre d'une politique ferme et volontariste. La loi n° 2022-52 du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure vient compléter l'arsenal législatif existant et renforce encore la répression des violences délictuelles commises contre les forces de sécurité intérieure en instituant dans le code pénal une infraction spécifique prévoyant, pour ces violences, des sanctions élevées d'un degré dans l'échelle des peines par rapport à ce qui est actuellement prévu pour les violences aggravées (nouvel article 222-14-5 du code pénal). Ces peines sont également applicables en cas de violences commises contre les membres de la famille de policiers ou gendarmes, ou contre toute personne affectée dans les services de police ou de gendarmerie nationale, de police municipale ou de l'administration pénitentiaire. S'agissant de la réponse pénale et du prétendu laxisme judiciaire évoqué, il peut être rappelé que depuis la fin de la décennie 2000, le taux du prononcé des peines d'emprisonnement ferme ou de réclusion n'a cessé d'augmenter, passant de 26 % à plus de 33 % à la fin des années 2010. Parallèlement, le quantum moyen ferme prononcé s'est accru passant d'environ 9,5 mois au début de la période étudiée, à plus de 11 mois en 2020 et 2021. Le nombre d'années d'emprisonnement ferme ou de réclusion prononcées est donc en hausse tout aussi sensible : les juridictions pénales prononçaient environ 96 000 années d'emprisonnement ferme ou de réclusion à la fin 2000, mais plus de 110 000 à la fin des années 2010 et plus de 119 000 en 2021. Enfin cette augmentation est particulièrement notable en matière délictuelle, le quantum moyen ferme prononcé passant de 69 176 années prononcées au début de la décennie 2000 à plus de 91 000 années prononcées en 2021. Par ailleurs, il convient de souligner qu'en 2021, la moitié des peines d'emprisonnement ferme prononcées était mise à exécution dans les 3 jours suivant l'acquisition de leur caractère exécutoire. Le délai moyen de l'ensemble des peines mises à exécution était de 6,4 mois. Pour les peines de 6 mois et moins, le délai médian était de 2,7 mois, pour un délai moyen de 7,9 mois. S'agissant des peines de plus d'un an, une sur deux est exécutée immédiatement. Le délai moyen d'exécution est de 2,4 mois. 95 % des peines prononcées en présence des condamnés sont mises à exécution. En moyenne, plus la peine est élevée, plus elle est exécutée rapidement. Le ministère de la Justice attache en outre une importance particulière à ce que les peines prononcées par les juridictions puissent être exécutées rapidement et effectivement. Cet impératif est régulièrement rappelé aux parquets, et récemment encore à l'occasion de la diffusion de la circulaire de politique pénale générale du 20 septembre 2022. Le taux de mise à exécution des peines d'emprisonnement ferme est l'un des indicateurs statistiques pénaux analysés trimestriellement et annuellement par la sous-direction de la statistique et des études (SDSE). Un rapport sur l'état et les délais d'exécution des peines est par ailleurs transmis chaque année au garde des Sceaux par les parquets généraux conformément à l'article 709-2 du code de procédure pénale. Avec la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire, le crédit de réduction de peine disparait. L'octroi de remise de peine n'est plus automatique et il est soumis à la notion d'effort et à l'investissement que les détenus présenteront dans le cadre de leur parcours de détention. Enfin, les condamnés à une peine privative de liberté pour certians faits commis notamment à l'encontre des forces de sécurité intérieure ne pourront prétendre qu'à des réductions de peine réduites. Le ministère de la Justice veille ainsi avec une attention particulière à lutter contre la délinquance et à assurer une exécution rapide et effective des peines d'emprisonnement prononcées. [1] Telle la circulaire du 27 mai 2021 relative aux atteintes contre les forces de sécurité intérieure.
Auteur : M. Yoann Gillet
Type de question : Question écrite
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 30 août 2022
Réponse publiée le 14 mars 2023