Question écrite n° 1020 :
Caméras VPI (Visualisation des plaques d'immatriculation) de vidéoprotection

17e Législature

Question de : Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho
Essonne (2e circonscription) - Rassemblement National

Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho interroge M. le ministre de l'intérieur sur les conséquences de la position de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) sur le cas des caméras VPI (Visualisation des plaques d'immatriculation) de vidéoprotection. En effet, si les caméras de « contexte » (plan large permettant d'observer un espace comme une place, un parking ou une intersection de routes ne permettant pas une identification précise des personnes ou des véhicules) ne semblent pas poser problème, les caméras de « visualisation des plaques d'immatriculation » (plan étroit permettant de visualiser les plaques d'immatriculation des véhicules en circulations de jour comme de nuit), en revanche, semblent poser difficulté lorsqu'elles sont installées par les municipalités. En ce sens, depuis peu, la CNIL réalise des contrôles de système de vidéoprotection des communes et considère illicite l'usage des caméras VPI en précisant que ces capteurs sont assimilés à un traitement automatisé des plaques d'immatriculation de type LAPI (lecture automatisée des plaques d'immatriculation) au sens de l'arrêté du 18 mai 2009. Or l'usage de systèmes LAPI n'est autorisé que pour la police nationale, la gendarmerie nationale et les douanes. Toutefois, contrairement au système VPI, les traitements LAPI peuvent être rapprochés du traitement automatisé des données relatives aux véhicules volés ou signalés ainsi que du système d'information Schengen. Par ailleurs, la CNIL considère que les municipalités ne peuvent stocker ces données tandis que le maire (même s'il est officier de police judiciaire) et les policiers municipaux n'ont pas le droit d'y accéder. La CNIL exigerait même des communes qu'elles investissent dans de coûteux serveurs et relais qui rapatrieraient immédiatement les images au sein de chaque groupement de gendarmerie ou direction départementale de la sécurité publique (DDSP) sans rien laisser au plan communal. Pourtant, non seulement les référents-sûreté police et gendarmerie ont largement demandé aux communes au travers du diagnostic ou audit de vidéoprotection le déploiement de caméras VPI pour qu'elles obtiennent des subventions et qu'elles optimisent l'efficacité de leur futur système de vidéoprotection contre la délinquance, mais encore, l'État, les régions et les départements les ont largement poussées à y recourir grâce à des incitations techniques et financières au regard de l'intérêt que cela représente, puisque cet outil permet un gain de temps considérable lors des investigations en aidant à la résolution du nombre d'infractions. C'est pourquoi les municipalités ont décidé d'investir dans des systèmes de vidéoprotection en suivant les préconisations des forces régaliennes et ont donc déployé des caméras dit VPI dont l'efficacité n'est plus à démontrer. Or depuis la décision de la CNIL, beaucoup de communes s'interrogent sur la pertinence de continuer à s'équiper ou à développer la vidéoprotection compte tenu de son coût d'investissement et de fonctionnement, si cela ne sert uniquement que la gendarmerie, la police nationale et les douanes, mais jamais la police municipale. D'autant plus que depuis peu, les directions des forces de sécurité intérieure ont rappelé à leurs personnels que les communes n'avaient plus le droit de lire les plaques d'immatriculation en utilisant des algorithmes, mais uniquement de remettre des séquences vidéo n'offrant aucune donnée intelligente permettant de faciliter la recherche de plaque minéralogique ; ce qui impose aux enquêteurs de lire la séquence vidéo et de relever manuellement les numéros d'immatriculation des véhicules. Dès lors, si le principe de ne pas attenter aux libertés individuelles pour assurer la sécurité de tous est louable, c'est sous réserve de ne pas revenir à « l'âge de pierre » de la vidéoprotection. En ce sens, il est intéressant de souligner que le déploiement des caméras LAPI sur les portiques du projet abandonné d'écotaxe n'avait pas soulevé d'inquiétudes de la CNIL dans sa délibération n° 2013-038 du 14 février 2013, qui considérait que les modalités de conservation et l'accès prévu pour les destinataires de ces données étaient pertinents et non excessifs. Aussi, dans la mesure où cette technologie permet d'identifier plus rapidement et facilement les délinquants et ainsi, disposer de plus de personnels sur le terrain pour la sécurité des concitoyens, plutôt que de passer des jours à éplucher des séquences vidéo dans un bureau, il apparaît que priver les polices municipales de cet outil constitue un nouvel obstacle dans le cadre de leurs missions de sécurisation de l'espace public et de protection des administrés. C'est pourquoi elle lui demande si le Gouvernement entend adapter les textes en vigueur afin, d'une part, d'autoriser l'usage des caméras VPI dans le cadre de fonctions de recherches tant par la gendarmerie, la police nationale et les douanes que par la police municipale et d'autre part, éviter des investissements coûteux et contreproductifs aux communes.

Réponse publiée le 3 juin 2025

Les dispositifs de visualisation des plaques d'immatriculation (VPI), dès lors qu'ils consistent à récupérer manuellement les numéros d'immatriculation des véhicules et non à réaliser une lecture optique des caractères de la plaque d'immatriculation, ne relèvent pas du régime juridique applicable aux dispositifs de type LAPI. En revanche, les dispositifs de visualisation des plaques d'immatriculation (VPI) prévoyant la récupération automatique des numéros d'immatriculation des véhicules doivent être considérés comme des LAPI et sont, lorsqu'ils sont mis en œuvre à des fins de police judiciaire ou de police administrative, encadrés par la loi.  Les articles L. 233-1 et L. 233-2 du code de la sécurité intérieure (CSI) autorisent la mise en œuvre de dispositifs fixes ou mobiles de contrôle automatisé des données signalétiques des véhicules en tous points appropriés du territoire et en particulier dans les zones frontalières, portuaires ou aéroportuaires ainsi que sur les grands axes de transit national ou international, à des fins de police judiciaire et de police administrative. Aux termes de l'article L. 233-1 du CSI, les services de police et de gendarmerie et des douanes peuvent mettre en œuvre des dispositifs fixes ou mobiles de contrôle automatisé des données signalétiques des véhicules notamment aux fins de : - prévenir et de réprimer le terrorisme et faciliter la constatation des infractions s'y rattachant ; - faciliter la constatation des infractions criminelles ou liées à la criminalité organisée au sens des articles 706-73 et 706-73-1 du code de procédure pénale, des infractions de vol et de recel de véhicules volés, des infractions de contrebande, d'importation ou d'exportation commises en bande organisée, prévues et réprimées par le dernier alinéa de l'article 414 du code des douanes ; - constater, lorsqu'elles portent sur des fonds provenant de ces mêmes infractions, la réalisation ou la tentative de réalisation des opérations financières définies à l'article 415 du même code ; - permettre le rassemblement des preuves de ces infractions et la recherche de leurs auteurs. Ces dispositions ne sont cependant pas applicables aux polices municipales. Le législateur a seulement autorisé le recours à des dispositifs LAPI par des polices municipales dans d'autres cadres, tels que la constatation des infractions résultant de la violation des règles de circulation relatives à l'usage des voies réservées par l'autorité investie du pouvoir de police de la circulation aux véhicules de transport en commun, aux taxis, aux véhicules transportant un nombre minimal d'occupants, notamment dans le cadre du covoiturage (article L. 130-9-1 du code de la route) et afin de permettre le rassemblement des preuves de ces infractions et la recherche de leurs auteurs, ou tel que la constatation des infractions aux règles de circulation arrêtées (zones à faibles émissions mobilité) et de permettre le rassemblement des preuves de ces infractions ainsi que la recherche de leurs auteurs (article L. 2213-4-2 code général des collectivités territoriales). Enfin, depuis la dépénalisation du stationnement payant en janvier 2018 organisée par la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 MAPTAM (le non-paiement du stationnement payant n'est plus puni d'une contravention, mais est remplacé par une redevance forfaitisée d'occupation du domaine public, le « forfait post-stationnement »), les collectivités territoriales sont autorisées à utiliser des dispositifs LAPI, fixes ou mobiles, afin de procéder à la détection du non-paiement du stationnement payant. Dans les autres cas, les communes ne sont pas autorisées à utiliser ces dispositifs (cf. CE, 27 juillet 2016, Commune de Gujan-Mestras, n° 385091 et CNIL, délib. n° 2014-219, 22 mai 2014). Conscient de l'enjeu auquel vous faites référence, le Gouvernement mène actuellement une réflexion sur les possibilités de faire évoluer la loi pour permettre, dans d'autres cas, le recours à des dispositifs LAPI par les polices municipales. Dans ce cadre, il ne manquera pas d'associer, le cas échéant, les communes pour optimiser et rationaliser l'utilisation de leurs investissements.

Données clés

Auteur : Mme Nathalie Da Conceicao Carvalho

Type de question : Question écrite

Rubrique : Sécurité des biens et des personnes

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 15 octobre 2024
Réponse publiée le 3 juin 2025

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