Conséquences préoccupantes de la généralisation des péages dits « en flux libre»
Question de :
M. Julien Guibert
Nièvre (2e circonscription) - Rassemblement National
M. Julien Guibert alerte M. le ministre des transports sur les conséquences préoccupantes de la généralisation des péages dits « en flux libre», qui se substituent aux barrières traditionnelles sur certaines portions du réseau autoroutier français. Ce nouveau dispositif, présenté comme un progrès technologique, impose aux usagers de s'acquitter du péage après coup, exclusivement par voie dématérialisée, via des plateformes en ligne ou des applications mobiles. En l'absence de paiement dans un délai limité, une majoration automatique est appliquée. Ce système soulève plusieurs difficultés majeures : d'une part, un grand nombre de Français, notamment parmi les personnes âgées, précaires ou éloignées du numérique, ne disposent pas des outils ou des connaissances nécessaires pour s'acquitter correctement du paiement en ligne. Ils découvrent parfois l'existence du dispositif uniquement lorsqu'ils reçoivent une amende, sans qu'aucune information claire ne leur ait été fournie en amont sur le montant du péage, le délai de paiement ou la procédure. D'autre part, l'automatisation du paiement et des sanctions s'inscrit dans une logique de rentabilité pure, déconnectée de toute mission de service public. Or les autoroutes concédées relèvent d'une délégation de service public. Le remplacement des barrières de péage par un système invisible et impersonnel entraîne une suppression de l'information physique, de l'interaction humaine et, in fine, de l'accompagnement de l'usager, au bénéfice exclusif des sociétés concessionnaires. Il ne saurait être question de privatiser les recettes tout en externalisant les difficultés vers les usagers. M. le député s'interroge également sur le cadre juridique de ces pratiques : il apparaît que les majorations appliquées en cas de non-paiement reviennent directement aux sociétés privées, sans intervention de l'État ni encadrement suffisant. Cette dérive, assimilable à un « péage-sanction automatique », accentue le sentiment d'un flicage permanent et d'un recul du service public au profit d'acteurs privés. M. le député demande donc à M. le ministre comment le Gouvernement entend garantir l'accessibilité du paiement aux personnes non connectées ou fragiles numériquement, afin qu'elles ne soient pas injustement sanctionnées. Il lui demande, par ailleurs, si le Gouvernement considère légitime que des majorations financières reviennent directement aux concessionnaires, dans le cadre d'un dispositif de délégation de service public. Enfin, il lui demande si le remplacement du péage traditionnel par ce dispositif dématérialisé n'est pas contraire à l'esprit même de la délégation de service public, qui implique une continuité, une accessibilité et une équité dans la prestation rendue.
Réponse publiée le 18 novembre 2025
Le système de péage en flux libre permet l'identification des véhicules et le paiement sans arrêt. Il est déployé à grande échelle depuis plusieurs années dans d'autres états européens. Il a des impacts positifs en matière de temps de parcours, d'écoulement des flux, de sécurité routière, d'émissions de gaz à effet de serre et de consommation foncière. Du fait de son caractère nouveau à cette échelle en France, la mise en place de ce système, à la demande de l'État, sur l'autoroute A79 en 2022 et sur l'axe A13-A14 en 2024, a constitué un changement important pour les usagers, qu'il a fallu accompagner. Avec l'État, les concessionnaires ont ainsi mis en œuvre une communication forte, avec une importante composante locale, ainsi qu'une séquence de signalisation complète renforcée à l'issue des premiers enseignements de terrain. Les retours sont positifs sur le fonctionnement du système. Concernant les modalités de paiement, des alternatives à la dématérialisation existent via le paiement automatique avec un abonnement télépéage ou dans le réseau de commerces de proximité NIRIO pour permettre les paiements en espèces ou en direct par carte bancaire. L'obligation de payer sous 72h et les modalités de paiement, dont la solution NIRIO, sont précisées sur plusieurs panneaux de signalisation sur les réseaux concernés et s'appliquent au même titre que les autres règles du code de la route identifiées par la signalisation de police. Les majorations que vous évoquez, sont en fait des indemnités forfaitaires encadrées par la réglementation en vigueur. Le défaut de paiement du péage constitue une infraction en application de l'article R.419-2 du code de la route. Dans ce cas, la société concessionnaire établit un procès-verbal et envoie un avis de paiement au titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule. Cet avis inclut le montant du péage non réglé, assorti d'une indemnité forfaitaire de 90 €, réduite à 10 € si le paiement est effectué sous 15 jours. En l'absence de règlement dans les deux mois, une amende forfaitaire majorée de 375 € est émise. Cette procédure et ces montants ont été établis afin de proposer une réponse graduée et proportionnée pour éviter les défauts de paiement. S'agissant d'un système nouveau, l'exploitant permet, en complément, une exonération totale de l'indemnité forfaitaire en cas de règlement sous 10 jours dans le cas d'un premier défaut de paiement.
Auteur : M. Julien Guibert
Type de question : Question écrite
Rubrique : Voirie
Ministère interrogé : Transports
Ministère répondant : Transports
Dates :
Question publiée le 14 octobre 2025
Réponse publiée le 18 novembre 2025