Question écrite n° 1081 :
Réglementation applicable au port d'un couteau de poche

17e Législature

Question de : M. Pierre Cordier
Ardennes (2e circonscription) - Droite Républicaine

M. Pierre Cordier appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la réglementation applicable au port de couteau de poche, assimilé à une arme blanche de catégorie D, au même titre que les haches, les machettes, les poignards de combat, les matraques télescopiques, les bombes lacrymogènes ou les poings américains. La jurisprudence des tribunaux était jusqu'ici assez souple et tenait compte des traditions régionales et paysannes. Cependant, depuis le 17 avril 2024 dans les zones dépendant des parquets de Bobigny, Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, Montpellier, Nantes, Nice, Pontoise, Rennes, Saint-Étienne, Toulouse et depuis le 2 mai pour celles sous tutelle du tribunal judiciaire de Paris, les autorités expérimentent la mise en place d'une amende forfaitaire délictuelle (AFD) de 500 euros en cas de port ou transport « sans motif légitime » d'une arme de catégorie D. Cette décision inquiète vivement les habitants des territoires ruraux car le paiement de cette amende forfaitaire de cinquième classe entraîne automatiquement l'inscription au casier judiciaire de la personne sanctionnée. Par ailleurs, l'amende pour port d'un couteau de poche entraîne aussi une inscription au Fichier national des personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes (Finiada), sans aucun recours possible, alors que ce fichier est normalement réservé aux personnes dont le profil est considéré comme incompatible avec la détention et l'usage d'armes suite à une condamnation judiciaire grave, un traitement psychiatrique, une plainte pour violence, harcèlement ou une décision préfectorale. Il faut alors vendre toutes les armes que l'on possède sous peine de confiscation sans indemnisation par les autorités. S'il est tout à fait souhaitable de lutter contre la violence malheureusement en hausse dans tous les territoires, il ne faut pas pour autant criminaliser tous les citoyens qui portent un couteau de poche. Il lui demande par conséquent quelles sont les mesures qu'il envisage pour permettre aux citoyens d'avoir sur eux un couteau de poche pour un usage quotidien (petits travaux, loisirs, repas...).

Réponse publiée le 3 juin 2025

Face à l'urgence sécuritaire que connaît notre pays, et des exemples récents d'attaques aux couteaux en France comme à l'étranger, le port d'armes de catégorie D, poignards et couteaux-poignards, sans motif légitime, doit être particulièrement et sévèrement réprimé. L'article L. 317-8 du code de la sécurité intérieure prévoit une peine d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende pour le port d'une arme de catégorie de D sans motif légitime. Le fait de se rendre à une action de chasse ou de reconstitution historique est un motif légitime. Mais tous les autres types de couteaux, également ceux appelés « de poche », parce qu'ils sont susceptibles de blesser ou tuer s'ils sont détournés de leur usage, peuvent être considérés comme représentant un danger pour la sécurité publique. L'actualité nous le rappelle dramatiquement trop souvent. Ainsi, l'article R. 311-2 du code de la sécurité intérieure précise que « tous objets susceptibles de constituer une arme dangereuse pour la sécurité publique » relèvent de cette catégorie de classement. Dès lors, le port ou transport de ces objets est en effet susceptible de constituer une infraction si les conditions du contrôle ne permettent pas de justifier d'un motif légitime à détenir ce type de couteau dit « de poche ». Cette appréciation des circonstances de temps, de lieux et de contexte est opérée au cas par cas par les forces de sécurité intérieure et sous le contrôle de l'autorité judiciaire y compris dans le cadre de la procédure expérimentale de l'amende forfaitaire délictuelle (AFD) menée depuis le 17 avril 2024 pour le port ou transport d'arme de catégorie D. Toutefois, la mise en œuvre de cette procédure exige la reconnaissance des faits par son auteur. Le versement de l'amende forfaitaire délictuelle pour les faits de port ou transport d'arme de catégorie D vaut ainsi reconnaissance de culpabilité et entraîne l'inscription de cette infraction au casier judiciaire de l'individu. En application de l'article L312-3 du code de la sécurité intérieure, l'inscription de cette mention au bulletin n° 2 du casier judiciaire entraine également celle de l'individu au fichier national des interdits d'acquisition et détention d'armes (FINIADA). Celui-ci peut toutefois, dans les conditions prévues à l'article 775-1 du code de procédure pénale, saisir le procureur de la République d'une requête en effacement de la condamnation à son bulletin n° 2, afin de faire lever par le préfet son inscription au FINIADA. Cette expérimentation est actuellement mise en œuvre dans les ressorts des tribunaux judiciaires de Rennes, Lille, Nantes, Bobigny, Pontoise, Bordeaux, Lyon, Saint-Etienne, Marseille, Nice, Montpellier, Paris et Toulouse. Elle instaure la possibilité d'éteindre l'action publique en cas de remise volontaire de l'arme à l'agent verbalisateur, et le versement d'une amende forfaitaire d'un montant nominal de 500 euros, pouvant être minoré à 400 euros et majoré à 1000 euros. La circulaire du ministre de la Justice du 7 novembre 2024 relative au contrôle de la procédure d'amende forfaitaire délictuelle rappelle que le déploiement de la procédure de l'AFD doit s'inscrire en cohérence avec la politique pénale déclinée localement par l'autorité judiciaire, tout en veillant aux contraintes et enjeux de ces territoires. Le recours à la procédure de l'AFD doit, par conséquent, être adapté aux spécificités locales, à l'état de la délinquance constatée et aux actions de prévention et de lutte contre la délinquance. En outre, des instructions ont été données aux forces de sécurité intérieure dans le cadre de l'expérimentation de l'AFD en matière de port ou transport d'arme de catégorie D, insistant sur le nécessaire discernement dans son application et les enjeux d'acceptabilité sociale de cette mesure. Ainsi et sous le contrôle de l'autorité judiciaire, il reviendra aux forces de sécurité intérieure d'apprécier, lors du contrôle, le danger que représente une arme blanche et si l'arme relève de la catégorie D s'agissant des conditions de port et transport. les premiers retours d'expérience démontrent que sont verbalisées des personnes errant en centres urbains à proximité des gares. En conclusion, l'expérimentation menée depuis le 17 avril 2024 concernant l'AFD pour le port ou transport d'arme de catégorie D ne vise pas à « criminaliser tous les citoyens qui portent un couteau de poche », mais à apporter une réponse pénale adaptée à une situation particulière de délinquance en s'assurant du discernement des intervenants, sous le contrôle de l'autorité judiciaire.

Données clés

Auteur : M. Pierre Cordier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Armes

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 22 octobre 2024
Réponse publiée le 3 juin 2025

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